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11. (1694) Maximes et Réflections sur la Comédie « III. Si la comédie d’aujourd’hui est aussi honnête que le prétend l’auteur de la Dissertation. » pp. 5-9

Pour moi, je l’ai vu cent fois déplorer ces égarements : mais aujourd’hui on autorise ce qui a fait la matière de sa pénitence et de ses justes regrets, quand il a songé sérieusement à son salut, et si le théâtre Français est aussi honnête que le prétend la dissertation, il faudra encore approuver que ces sentiments dont la nature corrompue est si dangereusement flattée, soient animés d’un chant qui ne respire que la mollesse. […] Il ne sert de rien de répondre, qu’on n’est occupé que du chant et du spectacle, sans songer aux sens des paroles, ni aux sentiments qu’elles expriment : car c’est là précisément le danger, que pendant qu’on est enchanté par la douceur de la mélodie, ou étourdi par le merveilleux du spectacle, ces sentiments s’insinuent sans qu’on y pense ; et plaisent sans être aperçus. Mais il n’est pas nécessaire de donner le secours du chant et de la musique à des inclinations déjà trop puissantes par elles-mêmes ; et si vous dites que la seule représentation des passions agréables dans les tragédies d’un Corneille et d’un Racine, n’est pas dangereuse à la pudeur, vous démentez ce dernier, qui, occupé de sujets plus dignes de lui, renonce à sa Bérénice, que je nomme parce qu’elle vient la première à mon esprit ; et vous, qui vous dites Prêtre, vous le ramenez à ses premières erreurs.

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