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4. (1692) De la tragédie « De la tragédie ancienne et moderne. » pp. 148-162

Les Dieux et les Déesses causaient tout ce qu’il y avait de grand et d’extraordinaire sur le Théâtre des Anciens, par leurs haines, par leurs protections ; et de tant de choses surnaturelles, rien ne paraissait fabuleux au Peuple, dans l’opinion qu’il avait d’une société entre les Dieux et les hommes. […] Celui-ci a revêtu ses Dieux de nos faiblesses, pour les ajuster à la portée des hommes : celui-là élève ses Héros jusqu’à pouvoir souffrir la comparaison des Dieux : « Victrix causa Diis placuit, sed victa Catoni. »g Dans Virgile, les Dieux ne valent pas des Héros : dans Lucain, les Héros valent des Dieux. […] Ainsi l’esprit de superstition causa la déroute des armées ; et celui de lamentation fit qu’on se contenta de pleurer les grands malheurs, quand il fallait y chercher quelque remède. […] Comme les Dieux causaient les plus grands crimes sur le Théâtre des Anciens, les crimes captivaient le respect des Spectateurs, et on n’osait pas trouver mauvais ce qui était abominable. […] Les désordres causés par ces sortes de Jeux, furent représentés au Parlement de Paris d’une manière très vive et très forte en 1541 par le Procureur du Roi.« Pendant lesdits jeux, dit-il, parlant du Mystere de la Passion, et des Actes des Apostres), le commun peuple dès huit à neuf heures du matin ès jours de Fêtes délaissait sa Messe Paroissiale, Sermon et Vêpres pour aller èsdits jeux garder sa place, et y être jusqu’à cinq heures du soir ; eutd cessé les Prédications, car n’eussent eu les Prédicateurs qui les eût écoutés.

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