Le fard est un reméde, & vous n’en avez pas besoin, vous n’avez ni tache à couvrir, ni défaut à réparer sur votre visage : Non ulla tuæ medicina figuræ ; l’amour n’aime point l’artifice, les ornemens de l’art loin de plaire, dégoutent : Amor formæ non amat artificium. […] Une belle femme n’a pas besoin de ces remedes. […] Phriné qui, quoique courtisanne, n’ufoit point de fard, croyant n’en avoir pas besoin ; jouant un jour avec des femmes fardées, un jeu où il faut que chacune fasse ce que fait la conductrice du jeu, s’avisa pour se moquer d’elles, de laver son visage, & obligea toutes les autres d’en faire autant ; le blanc & le rouge dont elles étoient couvertes, s’étant ainsi délayés & fondus, les roses & les lys s’en allerent dans la serviette où elles s’essuyerent, & laisserent voir leurs rides, & la pâleur de leur teint. […] L’Impératrice Poppée n’usoit point de fard, étant parfaitement belle, elle n’en avoit pas besoin, il auroit plutôt terni qu’embellison visage. Les femmes qui en usent se rendent, malgré elles, justice sur leur laideur ; elles sentent qu’elles ont grand besoin du secours de l’art, mais elles ne veulent pas sentir le tort qu’elles se font ; elles défigurent le peu d’agrément qu’elles ont, par les ravages que le blanc & le rouge font sur leur visage, & par le mépris qu’elles inspirent à ceux qui s’en apperçoivent.