C’en étoit un encore de dorer les cheveux, l’histoire des voyages rapporte que les Negres sur la Côte d’or, & dans l’intérieur de l’Afrique, les Sauvages dans la Guyane & dans l’intérieur de l’Amérique méridionale, le long de l’Orenoque, où il y a beaucoup d’or, & où il se fait même un commerce de poudre d’or, ces peuples en répandent non seulement sur leur tête, mais sur-tout le corps, après l’avoir oingt de quelque matiere grasse, où elle s’attache, ce qui, en se séchant, forme une croute émaillée d’or, qu’ils trouvent fort agréable ; ce n’est pas le goût François, il n’y a point de femme qui pour l’usage de sa toilette, ne préfere le blanc & le rouge à la poudre d’or. […] les cheveux serpentent, & entrelacés de furies forment le plus parfait contraste avec les ondulations des cheveux flottans de l’amour : en saisissant les nuances attachées aux différents genres, on reconnoît la main d’un habile artiste ; l’art du Coëffeur des Dames tient donc au génie , c’est un art libre & libéral. […] Pour cela elles assujetissent leurs cheveux avec des boucles & des peignes ; souvent d’or, d’argent, de pierres précieuses, ordinairement en tresses pendantes, croisées, rétroussées, qui serpentent, où elles attachent des diamants, de petites plaques d’or, de fleurs artificielles. […] Leurs oreilles sont aussi percées, tout autour, pour y attacher des pierreries en demi-cercle, leurs colliers, leurs bracelets, leurs bagues, leurs jarretieres sont du plus grand prix. […] C’est le revenant bon de leur chaste métier ; on a partagé cette tête creuse, on en a conservé le derriere, en le perfectionnant ; ce n’est plus qu’une calote ; elle avoit autrefois des cheveux empruntés, soit en peinture, ou en plâtre, ou réellement attachés, ce qui faisoit des chevelures blondes, noires, bouclées, frisées au gré de l’acteur, aussi-bien que les sourcils & la barbe, selon son goût ; on a conservé le derriere qu’on a rendu plus commode par des perruques à reseau, qu’on porte par-tout, aulieu que les anciens masques ne pouvoient servir que sur le théatre ; ils auroient été aussi incommodes que ridicules, par ce moyen, à peu de frais, & sans embarras, le vieillard rajeunit, la laide s’embellit, l’abbé, le magistrat se déguisent, la femme se travestit en homme, & l’homme en femme, on prend comme sur le théatre, les attributs du rôle qu’on veut jouer, & ce qui est très-commode, la moitié de la toilette se fait chez le baigneur, d’où l’on porte une très-belle tête toute faite, qu’on adapte au visage qu’on vient de fabriquer, ainsi se continue la comédie ; car la vie d’un joli homme, d’une jolie femme, n’est dans l’exacte vérité, qu’une comédie perpétuelle, où l’on joue les mœurs, la Réligion & le bon sens ; ces masques mobiles de la tête, font quelquefois sur le théatre & dans les piéces, les plus ridicules, le spectacle le plus comique, César qui étoit chauve, ne trouva d’autre coëffure pour cacher ce défaut, qu’une couronne de laurier.