Les regles mêmes de l’art exigent même le contraste du vice & de la vertu. […] Son goût pour l’art dramatique, qu’il paroît fort aimer, ne lui permet pas de faire généreusement le sacrifice de la scène à la vertu, il cherche des distinctions frivoles pour lui ménager quelques momens. […] Les contes de Lafontaine, si propres à corrompre, sont incomparablement plus pernicieux sur la scène que dans son livre, & c’est la malheureuse manie du sieur Sedaine & de bien d’autres comiques, de donner une existence, une vie, une action precisément à ce qu’il y a de plus mauvais dans ces trop célebres conteurs ; ils vont tirer de cet arcenal des passions des armes meurtrieres, qu’ils mettent tout dans la main des acteurs & des actrices, pour blesser les cœurs innocens ; ils ont soin de choisir les glaives les plus tranchans, & emploient tout leur art à les aiguiser. […] Dans l’Eloge du Chancelier de l’Hôpital, par l’abbé Remi, Avocat au Parlement, couronné à l’Académie Françoise & justement condamné par la Sorbonne, on trouve ces mots, p. 10 : Catherine de Médicis, investie par des hordes d’histrions & d’esclaves, qui nous apportoient de l’Italie tous les vices d’une nation dégénérée, toutes les fourberies d’une politique monstrueuse, tous les besoins du luxe, l’art meurtrïer de la finance, la fureur épîdémique du jeu, le goût de la débauche que la nature abhorre, & la lâche audace des empoisonnemens & des assassinats, jusqu’alors inconnus chez un peuple qu’honoroient la bravoure & la loyauté ; Catherine de Médicis, insensible sur les calamités publiques, ne songeant qu’à ses plaisirs, à sa vanité, à son ambition, multiplia les spectacles, ordonna des fêtes, prodigua l’or à ses bouffons, tourmenta ses ministres, se repentit & s’applaudit tour-à-tour d’avoir choisi l’Hôpital pour Chancelier. […] Le plus grand mérite auprès de ces sages maîtres de la langue, est le talent de l’art dramatique.