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221. (1759) Remarques sur le Discours qui a pour titre : De l’Imitation par rapport à la Tragédie « Remarques sur le discours qui a pour titre : De l’Imitation par rapport à la Tragédie. » pp. 350-387

J’entends encore ce tissu ingénieux, qui forme si adroitement le nœud de la Piece, que le Spectateur cherche avec inquiétude comment le Poëte pourra le dénouer, & qui le dénoue ensuite si heureusement & d’une maniere si convenable au reste de la Tragédie, que le dénouement paroît sortir du nœud même sans que le Poëte ait été obligé de l’aller chercher bien loin, d’emprunter des secours étrangers pour sortir de l’embarras où il s’est mis, & de faire en quelque sorte une seconde Piece pour finir la premiere, comme il est arrivé à Corneille même dans les Horaces. […] Outre cet avantage qui est commun à la Tragédie avec tous les ouvrages bien ordonnés, il y en a un qui lui est propre, ou qu’elle ne partage presque qu’avec la Comédie, & le Poëme Epique ; c’est de préparer au Spectateur le plaisir de la surprise, en disposant de telle maniere la suite des événements, qu’il en naisse un étonnement & une espece d’admiration différente de celle dont j’ai déja parlé, parce que c’est une grande révolution qui la produit, plûtôt qu’une grande vertu, quoiqu’il arrive souvent que l’une & l’autre se réunissent & fassent par leur concours une double impression sur notre esprit. […] Nous aimons à prévoir les événements qui doivent arriver, par le désir que nous avons de tout connoître, & de satisfaire la curiosité de notre esprit.

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