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220. (1781) Lettre à M. *** sur les Spectacles des Boulevards. Par M. Rousseau pp. 1-83

recourir aux expédiens, & c’est toujours ce qui arrive. […] Cette dissipation continuelle dans laquelle vivent les partisans des Trétaux, ne leur permettant pas de se livrer à aucun genre d’étude, il arrive de toute nécessité que leur esprit dépérit, & que les dispositions qu’ils annonçaient pour tel ou tel talent, meurent faute de culture. […] Il n’arrive point une dispute par an, aux Théatres, même au Parterre, & peut-être, pourrais-je dire hardiment qu’il ne se passe point de jour ou de nuit sans que le Boulevard ne nous offre quelque catastrophe sanglante ; ainsi, l’objection contre les Théatres de la Nation, est sans fondement, & quand bien même elle serait juste, la Cause des Trétaux n’en serait certainement pas meilleure. […] C’est ce qui m’est arrivé plus d’une fois, & à quelques-uns de mes amis, qui, attirés par la curiosité, n’étaient pas moins jaloux que moi de savoir jusqu’où le scandale pouvait pousser l’effronterie, & qui n’ont pu soutenir les excès. […]  : Tel individu, qui paraît jetté comme au hasard sur la terre, pour y végéter dans la classe la plus obscure du Peuple, peut, si on ne lui donne que des idées saines, mâles, dignes, en un mot, de l’excellence de son être, faire un jour un grand homme, un homme vraiment utile à son Pays ; ce qui, certes, n’arrivera jamais, si nous continuons de penser qu’il faut amuser les oisifs & les bas Peuple, par des farces & des pantomimes ordurieres.

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