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365. (1667) Lettre sur la Comédie de l'Imposteur « Lettre sur la Comédie de l’Imposteur » pp. 1-124

Panulphe est plus fort, « c’est à crier contre les visites que reçoit Madame », et dit sur cela, voulant seulement plaisanter et faire enrager la Vieille, et sans qu’il paraisse qu’elle se doute déjà de quelque chose, « qu’il faut assurément qu’il en soit jaloux », ce qui commence cependant à rendre croyable l’amour brutal et emporté qu’on verra aux Actes suivants dans le saint Personnage. […] Interdite en partie de son aventure, en partie irritée du doute où il témoigne en quelque façon être de son amour, elle lui répond « qu’elle fera ce qu’il lui conseillera ». […] Enfin elle fait son message, et il le reçoit avec une joie qui le décontenance, et le jette un peu hors de son rôle : et c’est ici où l’on voit représentée mieux que nulle part ailleurs, la force de l’amour, et les grands et les beaux jeux que cette passion peut faire par les effets involontaires qu’il produit dans l’âme de toutes la plus concertée. […] Enfin, insensiblement ému par la présence d’une belle personne qu’il adore, qui effectivement avait reçu avec beaucoup de modération, de retenue et de bonté la déclaration de son amour ; qui le cajole à présent, et qui le paie de raisons assez plausibles, il commence à s’aveugler, à se rendre, et à croire qu’il se peut faire que c’est tout de bon qu’elle parle, et qu’elle ressent ce qu’elle dit. […] Or comme la Raison produit dans l’âme une joie mêlée d’estime, le Ridicule y produit une joie mêlée de mépris ; parce que toute connaissance qui arrive à l’âme produit nécessairement dans l’entendement un sentiment d’estime ou de mépris, comme dans la volonté un mouvement d’amour ou de haine.

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