Sainct Paul mesme pour nous exciter à l’amour de la Vertu, & à la haine du vice, s’est seruy des termes de luttes, de combats, de courses ; de palmes & de victoires ; pourquoy donc sera t’il moins permis aux Chrestiens d’assister à vne representation qu’aux anciens ; pourquoy leur deffendra t’on des choses que la Saincte Escritute authorise si solemnellement. […] Car quelle impudence d’appliquer les Oracles Diuins de la Saincte Escriture à la deffẽce des vices, puisque son intention est de nous en faire conceuoir l’horreur, & de nous porter à l’amour de la perfection Euangelique ; & que si elle a des lieux & des passages qui semblent en quelque façon s’accorder à leurs sentiments, on ne les y a pas couchés en faueur des spectacles, & des Chrestiens qui y assistent : mais au contraire pour nous donner dans leur sens mysterieux la connoissance des fruits que nous en pouuõs tirer, & pour nous animer à l’amour des bonnes choses, puisque les Payens mesmes s’échauffent si fort après des sottises, dont ils ne peuuẽt esperer de gloire, & qui ne leur sçauroient produire que de la peine. C’est donc prendre les choses du bon costé que d’expliquer ces allegories pour l’amour de la vertu ; puisque dans les saincts Cahiers on les a obseruées si soigneusement à céte seule intention, & non pas pour donner cours à la vanité de ces Spectacles, qui sont les fruits de la superstition payenne ; ouy, la sainte Escriture l’a fait pour allumer on nos cœurs le desir de la perfection euangelique, & nous faire obtenir vn iour les recompenses que le Ciel nous prepare à l’issuë de céte vie, qui ne se peuuent mieux abreger que par les trauaux & les calamitez dont elle est accompagnée. […] Tous les Demons president diuersement à ces disputes de course, de force, de vigueur des nerfs, de voix & d’instruments, qui ont pris origine dans la Grece ; les Demons sont arbitres de ces assemblées : Et si l’on recherche soigneusement la source de toutes ces illusions & de ces charmes trompeurs qui gaignent si subtilement la veuë & les oreilles d’vn spectateur, on la découurira dans vn mort, dans vn Idole, ou dãs vn Diable : c’est ainsi que ce rusé aduersaire preuoyant que l’Idolatrie route nuë & sans fard paraistroit mõstrueuse, & qu’elle dõneroit plus d’horreur que d’amour, s’auisa de la reuestir des spectacles, afin qu’auec le foïble plaisir dont ils sont meslés, elle pût cacher sa laideur sous vn visage est ranger. […] Ainsi vn hõme qui est souple de tous ses mẽbres quoy qu’il ait le corps affoibly de débauches ; vn hõme qui ne merite pas le nom de fẽme pour ses dissolutiõs ; bref vn ie ne sçay qui, vn voluptueux, vn mõstre en nos iours qui n’est ny hõme ny femme, a biẽ le pouuoir de ietter le desordre dans vne ville, & de donner par ses bouffõneries vn credit absolu aux salles plaisirs & aux fables du temps passé, qu’il fait reuiure dans la scene : C’est de céte façon que nôtre nature defectueuse nous porte à l’amour des choses illicites ; & que les hommes pour authoriser leurs vices recherchent les memoires des anciens afin d’en tirer quelques mauuaises actions qui ont esté la proye de plusieurs siecles, & que l’aage deuroit auoir estouffées, ces squelettes qui sont fraischement sorties de la poussiere & du tombeau, paraissent sur le theatre ; & comme si les voluptez n’auoient pas assez d’empire d’elles mesmes, on expose aux Spectateurs ces exemples de l’impudicité de nos ancestres, pour leur en donner dauantage.