Mais aujourd’huy, comme je vous l’ay marqué tout au long dans l’Entretien du Cercle, presque tout le monde aime à railler, & à rire, aux dépens des bonnes mœurs, de la pureté, & de la Religion ; c’est l’esprit empoisonné du temps, qui se répand, & se glisse par tout ; on l’aime en soy, on l’aime dans les autres, & ceux qui sçavent mieux s’en aquitter, sont les plus aplaudis. […] Ce mêtier, apris à une si méchante école, étant secondé, par les inclinations naturelles, & ne laissant, que les idées d’une douceur efféminée, ce jeune homme, & cette jeune fille, commencent à mettre en pratique, ce qu’on leur a si bien enseigné sur le Théatre : L’innocence est attaquée, l’on aime sa foiblesse dans l’attaque, & en suite arrivent les grandes chûtes, à qui la comédie a donné les commencemens. […] Toutes ces choses au contraire desseichent infiniment le cœur, & le rendent incapable de tous les mouvemens, que la grace y pourroir insurüer : Vous n’en pouvez pas doûter, Madame, si jamais vous avez aimé la comédie, comme vôtre ame alors a esté éloignée de la dévotion, pour laquelle vous n’aviez, qu’un extréme dégoût, parce que vous astiez toute pénétrée du dégoût de la comédie. […] Je ne diray pas, que c’est pécher mortellement, d’aller à la comédie ; mais je diray, qu’à plusieurs c’est péché mortel, d’y aller : La verité de cette proposition ne se prend pas simplement du spectacle, mais encore des dispositions particulieres de la personne, Elle est, par exemple, d’un tempérament doux & très-sensible ; elle a un cœur, qui prend aussi-tôt feü ; l’imagination en est vive & forte, pour conserver la molesse, & l’impureté des images ; la volonté en est naturellement foible, & facile, pour se laisser aller à toutes ces representations ; elle a l’expérience de ces desordres secrets, qu’elle a plûtôt aimez, qu’elle n’a combatus. […] Jugez sur ce pied, Madame, où vous en pourrez venir, si vous aimez le divertissement de la comédie.