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316. (1760) Lettre à M. Fréron pp. 3-54

On les voit sortir des bras des Filles de l’Opera pour aller signer sur les Autels de Plutus qu’ils n’aiment pas les Commis pitoyables : un procès verbal doit toujours être prêt à les dédommager des frais d’une nuit voluptueuse. […] Quel est l’homme raisonnable qui ne préferera pas un Comédien à un Commis aux Aides, quel est l’homme raisonnable qui n’aimera pas mieux être Comédien et qui ne se croira pas meilleur Chrétien sur la Scène où il fait profession d’être l’organe de la vertu, de la raison et de la vérité, que d’être le vil instrument de la cupidité de nos voraces Financiers. […] Il veut que les Epoux s’aiment avec excès, il ne met aucune borne à leur attachement réciproque. […] Aucun de mes Censeurs n’a dit ni écrit, quoique les Officiers français enchantés de la grandeur d’âme de leur vainqueur l’aient dit à tout le monde, que ce Monarque ayant à sa table quelques Généraux français prisonniers, il leur tint ce propos qui prouve bien que je puis aimer ma Patrie sans lui déplaire. […] On peut d’autant mieux me pardonner d’aimer à la fais mon Maître et ma Patrie, que je ne suis pas de taille à porter le mousquet ni pour ni contre, et que quand bien même j’en aurais la force j’avoue très humblement que je n’en aurais point le courage.

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