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65. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 4 « CHAPITRE VI. Du sérieux et de la gaieté. » pp. 128-149

C'est un état de modération, de sagesse et de calme, où l'homme se possede, ne se laisse point vivement affecter, agit avec réflexion, donne à chaque chose son juste prix. […] L'air dissipé, le style badin, le ton comédien, déprécie le discours, décrédite l'Auteur, verba sapientiam statera ponderabantur ; dans le maintien décent et posé d'un homme qui s'écoute et se respecte soi-même, est occupé de son objet, ne parle et n'agit qu'à propos, ne dit que des choses utiles et réfléchies ; enfin dans la nature et l'importance des objets dont on parle. […] Quand la nature agit, le sérieux perce partout et répand sur tout un fonds, un air de sagesse qui jusque dans le jeune homme inspire autant de respect que la futilité donne du mépris pour le vieillard. […]  » Toujours équitable, il examine, il écoute, agit, comme la sagesse, avec poids et mesure ; charitable, il craint, jusques dans ses plus innocentes railleries, de jamais blesser le prochain, car il est impossible aux railleurs de choisir si bien la matière, de mesurer si bien les coups, de peser si bien les circonstances, les intérêts, le goût, la sensibilité de tout le monde, qu'on n'aille souvent trop loin. […] Voyez ce respectable Magistrat, supérieur à tous les intérêts et à toutes les passions, inébranlable au milieu des agitations des parties, du tumulte du barreau, des secousses de la sollicitation, il ne voit que la vérité, il n'agit que pour la justice : « Si fractus illabatur orbis, impavidam ferient ruinæ.

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