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101. (1819) La Criticomanie, (scénique), dernière cause de la décadence de la religion et des mœurs. Tome II « La criticomanie. » pp. 1-104

Il est aujourd’hui peu de bourgeois, de commis, d’artistes et ouvriers même, qui ne commencent par avoir une maîtresse, une bonne amie, qu’ils entretiennent ou aident pendant quelque temps, qu’ils déshonorent, qu’ils avilissent et abandonnent ensuite ordinairement. […] Pour éviter ce ridicule, elles ont abandonné les livres, et se sont lancées dans les affaires ; leurs boudoirs ressemblaient à des cabinets d’agence ; elles voyaient des hommes d’état, des politiques ; on les rencontrait souvent aux audiences des ministres ; mais leurs démarches, qui étaient souvent heureuses et utiles, ont été qualifiées de menées, et leurs personnes traitées d’intrigantes et encore tournées en ridicule. […] C’est aussi le tableau affligeant que je me suis fait des résultats de cette nouvelle prostitution, et la conviction où je fus qu’elle serait encore très nuisible, qui m’ont porté à composer cet écrit, à reprendre la défense des indigents et des mœurs, que les progrès d’une cataracte dont j’ai le malheur d’être affecté m’avaient fait abandonner. […] En effet, ne faut-il pas être doué d’une excessive vertu, d’une extrême délicatesse, être bien austère, bien rigoriste, avoir beaucoup d’humeur et plus d’impatience encore qu’Alceste ; c’est-à-dire, être plus grand Misantrope, pour s’abandonner à gourmander, à satiriser indistinctement les personnes, ou leurs vices, leurs défauts, leurs travers et les goûts, les habitudes, les écrits, des paroles, des mots, des frivolités ; à frapper sans mesure, sans égards, des traits cruels du ridicule, la cour et la ville, hommes, femmes, tous les rangs, tous les ordres ?

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