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356. (1758) Lettre de J. J. Rousseau à M. D’Alembert « JEAN-JACQUES ROUSSEAU. CITOYEN DE GENÈVE, A Monsieur D’ALEMBERT. » pp. 1-264

Cet exemple est sous vos yeux : je le tire de votre patrie, c’est celui du Tribunal des Maréchaux de France, établis juges suprêmes du point d’honneur. […] Tels sont les préjugés que les Rois de France, armés de toute la force publique, ont vainement attaqués. […] Je vois que Paris, la Capitale de la France et le gouffre des richesses de ce grand Royaume, en entretient trois assez médiocrement, et un quatrième en certains temps de l’année. […] Les deux sexes réunis journellement dans un même lieu ; les parties qui se lieront pour s’y rendre ; les manières de vivre qu’on y verra dépeintes et qu’on s’empressera d’imiter ; l’exposition des Dames et Demoiselles parées tout de leur mieux et mises en étalage dans des loges comme sur le devant d’une boutique, en attendant les acheteurs ; l’affluence de la belle jeunesse qui viendra de son côté s’offrir en montre, et trouva bien plus beau de faire des entrechats au Théâtre que l’exercice à Plainpalais ; les petits soupers de femmes qui s’arrangeront en sortant, ne fût-ce qu’avec les Actrices ; enfin le mépris des anciens usages qui résultera de l’adoption des nouveaux ; tout cela substituera bientôt l’agréable vie de Paris et les bons airs de France à notre ancienne simplicité, et je doute un peu que des Parisiens à Genève y conservent longtemps le goût de notre gouvernement.

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