« Tous les jours à la Cour, les Evêques, les Cardinaux, et les Nonces du Pape ne font pas difficulté d’assister à la Comédie ; et il n’y aurait pas moins d’imprudence que de folie, de conclure que tous ces grands Prélats sont des impies et des libertins, parce qu’ils autorisent le crime par leur présence : c’est bien plutôt une marque que la Comédie est si pure et si régulière, qu’il ne peut y avoir de honte ni de scrupule à s’y trouver. […] où il décide le contraire par ces paroles : « A l’égard de ceux qui vont à la Comédie, il y en a qu’il serait indécent et scandaleux d’y voir assister, comme sont les Religieux, et surtout les plus réformés ; et je vous avoue que j’aurais de la peine à les sauver du péché mortel, aussi bien que les Evêques, les Abbés et tous les gens constitués en dignité Ecclésiastique. […] Il soutient qu’elle est supposée, qu’il a cherché partout sans l’avoir pu trouver ; qu’il n’est pas probable qu’un saint Evêque, tel qu’était saint Charles, ait fait une Ordonnance pour permettre la Comédie, lorsqu’on trouve le contraire dans le premier concile Provincial de Milan, où ce saint Archevêque parle avec ses Suffragants en ces termes : « Nous avons, dit-il, trouvé à propos d’exhorter les Princes et les Magistrats, de chasser de leurs Provinces les Comédiens, les Farceurs, les Bateleurs, et autres gens semblables de mauvaise vie, et de défendre aux Hôteliers et à tous autres sous de grièves peines, de les recevoir chez eux. […] Il remarque que si l’on observait tout ce que ce saint Evêque ordonne à ceux qui veulent aller à la Comédie, les Théâtres seraient bientôt fermés, et il trouve son discours aussi propre à en détourner que ceux des saints Pères, par les dangers qu’il y fait voir ; de même qu’un homme sage ne voudrait pas manger d’une viande, si celui qui la lui présenterait, l’avertissait qu’elle est capable de lui faire un mal considérable. […] On a écrit de Rome, que les Comédiens de Paris qui se présentèrent à la Confession au Jubilé de l’année dernière 1696. croyant que c’était un temps de grâce pour eux, comme pour les autres pécheurs, parce que les Confesseurs avaient le pouvoir d’absoudre des cas réservés ; surpris néanmoins que les Confesseurs leur eussent refusé l’absolution, s’ils ne promettaient par écrit de ne plus monter sur le Théâtre, avaient présenté une Requête au Pape, dans laquelle ils remontrent qu’ils ne représentent à Paris que des Pièces honnêtes, purgées de toutes saletés, plus propres à porter les Fidèles au bien qu’au mal, et inspirant de l’horreur pour le vice et de l’amour pour la vertu ; et ils prient le Pape de répondre si les Evêques ont droit de les excommunier.