On s’était livré à tout ce qui pouvait agiter l’âme, et lui faire sentir du plaisir par cette agitation ; et rien ne découvre mieux cette volonté secrète, que l’indignation contre les personnes qui n’ont pas su troubler notre repos. […] Ainsi les sens n’y sont pas seulement séduits par l’extérieur, mais l’âme y est attaquée par tous les endroits où sa corruption est sensible. […] L’âme était déjà si languissante et si faible lors même que les objets étaient éloignés, et elle était si touchée de leur seule idée lorsqu’ils n’étaient présents qu’à sa mémoire ; que sera-ce donc quand sa faiblesse sera livrée aux passions des autres, et qu’elle sera assez imprudente pour admettre dans son cœur tant de mouvements étrangers, et assez aveugle pour savoir gré à tous ceux qui les lui ont inspirés ? […] Au lieu de travailler à guérir les plaies qu’ils ont faites à l’âme, et à la délivrer de la dépendance où elle est à leur égard, on fortifie les liens qui l’asservissent, on les multiplie, et on la contraint en quelque sorte à être toute dans les yeux et dans les oreilles.