VIII.
On se trompe fort en croyant que la Comédie ne fait aucune mauvaise impression sur soi parce que nous ne sentons point qu'elle excite en nous aucun mauvais désir. Il y a bien des degrés avant que d'en venir à une entière corruption d'esprit et de cœur ; et c'est toujours beaucoup nuire à l'âme que de ruiner les remparts qui la mettaient à couvert des tentations. C'est beaucoup lui nuire que de l'accoutumer à regarder ces sortes d'objets sans horreur et avec quelque sorte de complaisance, et de lui faire croire qu'il y a du plaisir à aimer et à être aimé. L'aversion qu'elle en avait lui servait de dehors qui fermaient l'entrée au Diable; et quand ils sont ruinés par la Comédie, il y entre ensuite facilement. Il y a souvent longtemps que l'on commence à tomber quand on vient à s'en apercevoir. Les chutes de l'âme sont longues ; elles ont des préparations et des progrès, et il arrive souvent qu'on ne succombe à des tentations que parce qu'on s'est affaibli dans des occasions de peu d' importance.