(1697) Histoire de la Comédie et de l’Opéra « HISTOIRE ET ABREGE DES OUVRAGES LATIN, ITALIEN ET FRANCAIS, POUR ET CONTRE LA COMÉDIE ET L’OPERA — CHAPITRE I. Abrégé de la Doctrine de l’Ecriture Sainte, des Conciles et des Pères de l’Eglise, touchant la Comédie. » pp. 2-17
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(1697) Histoire de la Comédie et de l’Opéra « HISTOIRE ET ABREGE DES OUVRAGES LATIN, ITALIEN ET FRANCAIS, POUR ET CONTRE LA COMÉDIE ET L’OPERA — CHAPITRE I. Abrégé de la Doctrine de l’Ecriture Sainte, des Conciles et des Pères de l’Eglise, touchant la Comédie. » pp. 2-17

CHAPITRE I.
Abrégé de la Doctrine de l’Ecriture Sainte, des Conciles et des Pères de l’Eglise, touchant la Comédie.

Je commence cet Abrégé par celui des passages de l’Ecriture Sainte, des canons des Conciles, et des Ouvrages des Saints Pères contre les Spectacles, parce que c’est le fondement de tout ce qui a été écrit sur cette matière.

Je ferai cette Tradition courte, et en même temps raisonnée, pour ne pas copier ceux qui en ont fait avant moi, et pour ne pas fatiguer les Lecteurs que les longs ouvrages rebutent.

Si je faisais une longue Dissertation, j’aurais ramassé toutes les maximes de l’Ancien et du Nouveau Testament, par lesquelles le Saint Esprit nous a donné des armes pour combattre la Comédie. Je me contenterai d’en rapporter les plus importantes.

Nous lisons dans le chapitre quatrième des Proverbes v. 23. « Appliquez-vous avec tout le soin possible à la garde de votre cœur, parce qu’il est la source de la vie. » Dans L’Ecclésiastique, chap. 3. v. 27. « Celui qui aime le péril y périra. » Et dans le chap. 9. v. 8. « Détournez vos yeux d’une femme parée, et ne regardez pas curieusement une beauté étrangère. » v. 9. « Plusieurs se sont perdus par la beauté de la femme, et la passion s’allume comme un feu en la regardant. »

En Saint Mathieu, chap. 5. v. 28. « Quiconque regardera une femme avec un mauvais désir, a déjà commis l’adultère dans son cœur. » Chap 18. v. 6. « Si quelqu’un est un sujet de chute et de scandale à un de ces petits, qui croient en moi ; il vaudrait mieux pour lui qu’on lui pendît au col une de ces meules qu’un âne tourne, et qu’on le jetât au fond de la mer. » Dans l’Epitre aux Ephésiens, chap. 5. v. 3. « Qu’on n’entende pas seulement parler parmi vous de fornication ni de quelque impureté que ce soit, ni d’avarice. » v. 4. « Qu’on n’y entende point de paroles déshonnêtes, ni de folles, ni de bouffonnes, ce qui ne convient pas à votre vocation ; mais plutôt des paroles d’actions de grâces. »

Or il faut convenir, qu’on ne peut aller à la Comédie sans exposer son cœur au péril de la tentation, au lieu de le conserver avec soin ; on y regarde avec une entière liberté, des femme qui font tous leurs efforts pour plaire ; et presque toutes réussissent, car on sait leur conduite. Un Chrétien peut-il être attentif à la suite d’une intrigue d’amour, qu’on insinue par des expressions d’autant plus dangereuses, qu’elles sont plus spirituelles et plus agréables, sans que ce mal s’imprime dans son esprit et dans son cœur ? N’y a-t-il pas souvent des équivoques, des paroles bouffonnes ? Par conséquent ces passages que j’ai rapportés, suffisent pour faire voir qu’on trouve des armes dans l’Ecriture Sainte pour combattre les Comédies, quoiqu’elles ne contiennent ni idolâtrie, ni impureté grossière.

Je passe aux Conciles de l’Eglise. Le Canon 62. du Concile d’Elvire, tenu l’an 305. porte : « Si les Comédiens veulent embrasser la Foi Chrétienne, nous ordonnons qu’ils renoncent auparavant à cet exercice, et qu’ensuite ils y soient admis, de sorte qu’ils n’exercent plus leur premier métier : que s’ils contreviennent à ce Décret, qu’ils soient chassés et retranchés de l’Eglise. Le Canon 67. du même Concile ajoute : Il faut défendre aux femmes et aux filles Fidèles ou Catéchumènes, d’épouser des Comédiens : que s’il y en a qui en épousent, qu’elles soient excommuniées. » Le Canon 5 du 1. Concile d’Arles, tenu l’an 314 s’explique en ces termes : « Quant aux Comédiens, nous ordonnons qu’ils soient excommuniés tant qu’ils feront ce métier. » Le 2. Concile d’Arles, tenu en 452. a renouvelé le Canon précèdent.

Le 6. Concile général, tenu à Constantinople en 680. condamne les Comédies et les Danses qui se font sur le théâtre, et prononce contre les contrevenants, si c’est un Ecclésiastique, qu’il soit déposé ; et si c’est un Laïque, qu’il soit excommunié. On voit que ce Concile ordonne les mêmes peines que les précédents ; cependant il est certain que l’Idolâtrie ne paraissait plus sur les théâtres, dans l’intervalle du temps qui s’est passe jusques à ce Concile.

Le Concile de Bourges, tenu l’an 1584. Canon 4. commande expressément aux Chrétiens de fuir les danses, les Comédies et les mascarades.

Dieu a inspiré aux Princes d’entretenir cette défense par leurs Lois, puisque Philippe Auguste dans le 12 Siècle, chassa de sa Cour les Comédiens, au rapport de Dupleix Historien. Nous lisons dans l’Office de S. Louis, du Bréviaire de Paris ; que ce Saint Prince chassa de son Royaume les Bateleurs et les Joueurs de farce. Il n’y avait point encore sous son Règne de Comédiens en France.

Depuis qu’on n’a plus tenu de Conciles, les Evêques ont conservé cette discipline contre la Comédie, par leurs Synodes et par leurs Rituels.

Saint Charles Borromée a fait composer un Livre particulier contre la Comédie, où l’Auteur dit que les Comédies sont mauvaises, au moins à cause des circonstances qui les accompagnent, et de leurs effets ; c’est pour cela qu’elles sont défendues. Ce Livre a été traduit en Français, et Imprimé à Toulouse en 1662.

Le Rituel de Châlons en Champagne de 1649. défend de recevoir pour parrains au Baptême, les Comédiens. M. Jean de Gondy Archevêque de Paris, déclara dans son Syndicon en 1624. qu’il fallait priver les Comédiens de l’usage des Sacrements, et de la sépulture Ecclésiastique. M. de Harlay Archevêque de Paris l’a fait imprimer en 1674. Le Rituel de Paris, imprime en 1654. porte la même défense.

Je ne rapporterai point les termes dont se servent les Rituels de Sens, l’Alet, de Langres, de Coutances, de Bayeux, de Reims ; mais tous ces Rituels ordonnent les mêmes peines contre les Comédiens. Il y a des Rituels particuliers, qui excommunient ceux qui assistent aux Spectacles les jours de Fêtes et de Dimanches, pendant le Service divin ; c’est ce qu’on publie au Prône de tous les Dimanches, dans toutes les Paroisses de Paris, pour faire souvenir les peuples, que c’est encore un plus grand péché d’assister aux Spectacles les jours de Fêtes, pendant le Service divin.

Aussi pour empêcher les fidèles de Paris, de se laisser entraîner par les compagnies aux Spectacles, on chante des Vêpres du saint Sacrement, pendant le temps que l’on représente ces Spectacles ; et c’est pour cette raison, qu’on appelle ces Vêpres, des Saluts.

Cet Abrégé des Conciles, des Synodes et des Rituels, doit convaincre que l’Eglise a toujours condamné et condamne encore à présent les Comédies de ce siècle, comme celles des siècles passés ; qu’elle des regarde comme de très grands désordres, puisqu’elle emploie contre les Comédiens, les peines les plus rigoureuses, savoir, l’excommunication, la privation de l’usage des Sacrements, même à la mort, et ensuite de la sépulture Ecclésiastique : en quoi elle renouvelle la plus grande sévérité des premiers siècles, puisqu’elle met les Comédiens au rang des blasphémateurs, des concubinaires et des usuriers publics.

On peut conclure de tout cela, que ceux qui disent qu’il est permis d’aller à la Comédie, se moquent et méprisent les censures de l’Eglise, puisqu’ils entretiennent par leur présence et par leur argent, les Comédiens dans la désobéissance à l’Eglise, et contribuent autant qu’il est en eux à leur damnation.

Quant à la Tradition des Pères de l’Eglise, je m’arrêterai seulement à ceux des premiers siècles, particulièrement à Tertullien, S. Cyprien, S. Jean Chrysostome, S. Basile, S. Ambroise, et S. Augustin, parce qu’on veut abuser de quelques expressions de ces Pères, pour en conclure qu’ils n’ont condamné les Spectacles qu’à cause de l’Idolâtrie, ou des représentations honteuses et impudiques.

Je conviens que ces Saints Pères ont condamné les Spectacles par ces deux motifs ; mais je prétends qu’ils les ont de plus condamnés pour d’autres désordres, qui se trouvent dans les Opéra et les Comédies de notre siècle.

Je commencerai par Tertullien, dans son Livre des Spectacles, chapitre 4. où il s’exprime en ces termes : « Peut-on dire que les Spectacles ne sont pas défendus dans la sainte Ecriture, puisqu’elle condamne toute sorte de concupiscence ? Car comme la Concupiscence comprend l’avarice, l’ambition, la gourmandise, la luxure ; elle comprend aussi la volupté : Or les spectacles sont une espèce de volupté. »

Par là l’on voit que cet ancien Père condamne les Spectacles, à cause de la volupté, qui est un motif différent de l’Idolâtrie. Il se sert encore d’un autre motif, pour détourner les Fidèles des Spectacles ; c’est dans le chap. 25 du même Livre, où il parle de la manière suivante : « Un homme pensera à Dieu dans ces lieux où il n’y a rien de Dieu ? Apprendra-t-il à être chaste, lorsqu’il se trouve tout transporté, et comme enivré du plaisir qu’il prend à la Comédie ? Il n’y a rien de plus scandaleux dans tous les Spectacles, que de voir avec quel soin et quel agrément, les hommes et les femmes y sont parés : l’expression de leurs sentiments conformes ou différents pour approuver ou pour désapprouver les choses dont ils s’entretiennent, ne servent qu’à exciter dans leurs cœurs des passions déréglées. Enfin nul ne va à la Comédie qu’à dessein d’y voir et d’y être vu.  » Le même Tertullien presse les Chrétiens de fuir les Théâtres, par les périls auxquels ils s’exposent, sur la fin du chap. 27 où il suppose que tout ce qui se passe à la Comédie, soit généreux, honnête, harmonieux, charmant et subtil : « Regardez tout cela , dit-il, comme un breuvage de miel dans une coupe empoisonnée, et considérez qu’il y a plus de péril à se laisser emporter à la volupté, qu’il n’y a de plaisir à s’en rassasier. »

Saint Cyprien, dans le Traité des Spectacles qu’on lui attribue, a suivi les maximes de Tertullien. Voici ses paroles : « Que dirai-je des vaines, et inutiles occupations de la Comédie, et des grandes folies de la Tragédie ? Quand même ces choses ne seraient pas consacrées aux idoles, il ne serait pas néanmoins permis aux fidèles Chrétiens, d’en être les acteurs, ni les spectateurs ; et quelques innocentes qu’elles fussent, ce ne serait toujours qu’un dérèglement de vanité, qui ne convient point à ceux qui font profession de Christianisme. Nous devons garder soigneusement nos yeux et nos oreilles. On s’accoutume facilement aux crimes dont on entend souvent parler. L’esprit de l’homme ayant une pente au mal, que ne fera-t-il pas, s’il est encore porté par les exemples des vices de la chair, auxquels la nature se laisse aller si aisément ? » Ce passage fait assez voir les sentiments de saint Cyprien sur les Spectacles.

Saint Basile dans son Hom. 4. in Hexameron, condamne de même les Chansons de l’Opéra : « Ils vont , dit-il, avec ardeur, écouter certaines chansons qui ne respirent que la mollesse, et qui ne tendent qu’à corrompre les mœurs, et qui font naître dans l’esprit des auditeurs déjà assez déréglés d’eux-mêmes, toute sorte d’impuretés, d’une manière qu’ils ne peuvent jamais se rassasier de ces chansons. »

Je m’étendrai d’avantage sur les passages de saint Jean Chrysostome, parce qu’il expose et ses sentiments, et la discipline de l’Eglise sur la Comédie.

Ce saint Docteur examine d’abord, dans l’Homélie 15. au peuple d’Antioche cette question, si c’est un péché d’aller à la Comédie, par ces paroles : « Plusieurs s’imaginent qu’il n’est pas certain que ce soit un péché de monter sur le Théâtre, et d’aller à la Comédie : mais quoiqu’ils en pensent, il est certain que tout cela cause une infinité de maux ; car le plaisir que l’on prend aux spectacles des Comédies, produit l’impudence, et toutes sortes d’incontinences. D’ailleurs nous ne sommes pas seulement obligés d’éviter les choses mêmes qui nous paraissent indifférentes, et qui portent insensiblement au péché : car comme celui qui marchant sur le bord d’un précipice quoiqu’il n’y tombe pas, ne laisse pas d’être dans la crainte, et qu’il arrive souvent que la crainte le trouble et le fait tomber dans ce précipice : de même celui qui ne s’éloigne pas du péché, mais qui en est proche, doit vivre dans l’appréhension ; car il arrive souvent qu’il y tombe. »

Ne peut-on pas dire la même chose de nos Comédies ? Y a-t-il moins de danger ? N’y a-t-il pas de funestes exemples de plusieurs personnes, dont la réputation était hors d’atteinte, et qui ont levé le masque à force d’aller au Théâtre ?

Dans l’Homélie 3. de David et de Saul, ce Saint nous donne un échantillon de l’exactitude de la discipline, et de la pénitence de son siècle : écoutons-le avec attention : « Je crois que plusieurs de ceux qui nous abandonnèrent hier, pour aller aux Spectacles, sont aujourd’hui présents ; je voudrais les reconnaître publiquement, afin de leur interdire l’entrée de ces Lieux sacrés, non pas pour les laisser toujours dehors ; mais pour les rappeler après leur amendement. Comme les pères chassent de leurs maisons et de leurs tables leurs enfants qui se laissent emporter à la débauche, non pour les en bannir éternellement ; mais pour les faire devenir meilleurs par cette correction ; les Pasteurs en usent de même, lorsqu’ils séparent les brebis galeuses d’avec les autres, afin qu’étant guéries de leurs maladies, elles retournent avec celles qui sont saines sans aucun péril : car autrement, s’ils les laissaient parmi les autres, elles infecteraient tout le troupeau. C’est pour ce sujet que je voudrais pouvoir reconnaître ces personnes ; mais encore qu’elles nous soient inconnues, elle ne peuvent néanmoins se dérober aux yeux du Verbe éternel : j’espère qu’il touchera leur conscience, et qu’il leur persuadera de sortir volontairement, leur faisant connaître qu’il n’y a que ceux qui se portent à faire pénitence, qui soient véritablement dans l’Eglise. Au contraire, ceux qui vivant dans le dérèglement demeurent dans notre communion, quoiqu’ils soient ici présents de corps, ils en sont néanmoins séparés plus véritablement que ceux qu’on a mis dehors, de sorte qu’il ne leur est pas encore permis de participer à la sainte Table. Car ceux qui selon les Lois divines ont été chassés de l’Eglise et demeurent dehors, donnent par leur conduite quelque bonne espérance, qu’après s’être corrigés des péchés pour lesquels ils ont été chassés de l’Eglise, ils y rentreront avec une conscience pure. Mais ceux qui se souillent eux-mêmes, et qui étant avertis de se purifier des taches qu’ils ont contractées avant que d’entrer dans l’Eglise, se conduisent avec impudence, ils aigrissent l’ulcère de leur âme, et rendent leur mal plus grand ; car il y a bien moins de mal à pécher, que d’ajouter l’impudence au crime qu’on a commis, et de ne vouloir pas obéir aux ordres des Prêtres. On me dira, Le péché que ces personnes ont commis, est-il si grand, qu’il mérite qu’on leur interdise l’entrée des lieux sacrés ? Je ne vous déclarerai pas leur crime par mes discours ; mais par les propres paroles de celui qui doit juger toutes les actions des hommes : Celui, dit-il, qui verra une femme avec un mauvais désir, a déjà commis l’adultère dans son cœur. » Si une femme négligemment parée, qui passe par hasard dans la place publique, blesse souvent par la seule vue de son visage celui qui la regarde avec trop de curiosité ; ceux qui vont aux Spectacles non par hasard, mais de propos délibéré, et avec tant d’ardeur, qu’ils abandonnent l’Eglise par un mépris insupportable pour y aller ; ceux qui regardent ces femmes infâmes, auront-ils l’impudence de dire qu’ils ne les voient pas pour les désirer, lorsque les paroles, les voix, les chants impudiques et tendres les portent à la volupté ? Car si en ce lieu où l’on chante les Psaumes, où l’on explique la parole de Dieu, où l’on craint et respecte sa divine Majesté, la concupiscence ne laisse pas de s’y glisser secrètement dans les cœurs comme un subtil larron : ceux qui sont toujours à la Comédie, où ils ne voient et n’entendent rien de bon, comment pourront-ils surmonter la concupiscence ? C’est pourquoi je prie et conjure ces personnes de se purifier par la confession, par la Pénitence et par tous les autre remèdes salutaires, des péchés qu’ils ont contractés à la Comédie, afin qu’ils puissent être admis à entendre la parole de Dieu. Car ces péchés ne sont pas médiocres, puisqu’on y voit des femmes qui ont perdu toute honte, qui paraissent hardiment sur un Théâtre devant le peuple, qui ont fait une étude de l’impudence, qui par leurs regards et par leurs paroles répandent le poison de l’impudicité dans les yeux et dans les oreilles de tous ceux qui les regardent et qui les écoutent : enfin tout ce qui se fait dans toutes ces représentations malheureuses ne porte qu’au mal ; les paroles, les habits, le marcher, la voix, les chants, les regards des yeux, les mouvements du corps, le son des instruments, les sujets même et les intrigues des Comédies, tout y est plein de poison, tout y respire l’impureté. Toutes ces choses devraient donc porter ceux qui les voient, non pas à rire, mais à pleurer. Mais je vous montrerai, me direz-vous, des personnes à qui ces Jeux n’ont point fait de mal. N’est-ce pas un assez grand mal que d’employer si inutilement le temps, et d’être aux autres un sujet de scandale ? Quand vous ne seriez pas blessé de ces représentations, n’est-ce rien que vous y ayez attiré les autres par votre exemple ? Comment donc êtes-vous innocent, puisque vous êtes coupable du crime des autres ? Tous les désordres que causent parmi le peuple ces hommes corrompus et ces femmes prostituées, retombent sur vous : car s’il n’y avait point de Spectateurs de Comédies, il n’y aurait ni Comédiens ni Acteurs ; ainsi ceux qui les représentent et ceux qui les voient, s’exposent au feu éternel. C’est pourquoi quand vous seriez assez chaste pour n’être point blessé par la contagion de ces Jeux, ce que je crois impossible, vous ne laisseriez pas d’être sévèrement puni de Dieu, comme étant coupable de la perte de ceux qui vont voir ces folies, et de ceux qui les représentent sur le Théâtre. » Je laisse faire de bonne foi l’application de tout ce discours de saint Jean Chrysostome : n’est-ce pas une peinture de nos Comédies, et une réponse à toutes les excuses de notre siècle ? Je ne rapporterai rien ici de saint Ambroise et de saint Augustin, parce que j’en parlerai dans la suite.