(1574) Epître de saint Cyprien contre les bateleurs et joueurs de farces « Epître de saint Cyprien contre les bateleurs et joueurs de farces. » pp. 423-426
/ 1079
(1574) Epître de saint Cyprien contre les bateleurs et joueurs de farces « Epître de saint Cyprien contre les bateleurs et joueurs de farces. » pp. 423-426

Epître de saint Cyprien contre les bateleurs et joueurs de farces.

L’argument.

Saint Cyprien en la 10. Epître du premier livre écrivant à Eucratius, montre assez en quelle horreur et détestation les Chrétiens avaient anciennement les Bateleurs et joueurs de farces, Comédies et Tragédies, et autres choses semblables, jusqu’à priver de la sainte Communion ceux qui s’adonnaient à cet art : Il déclare le semblable en cette Epître, que le Chrétien doit fuir tous Spectacles et Jeux publics, de quelque sorte que ce soit : où de premier coup il s’attache à ceux qui abusaient des témoignages de la S. écriture pour approuver telles folies : puis discourant par toutes les espèces des Spectacles, en fait le diable auteur, et l’Idolatrie mère : rappelant les Chrétiens à contempler plutôt les œuvres de Dieu, et les saintes écritures, comme les vrais spectacles des vrais enfants de Dieu. Tertullien a écrit de cette même matière, beaucoup plus amplement, car il décrit l’origine, et espèces de ces Jeux et Spectacles, les appareils, les prix et joyaux, et tout ce qui en dépend.

Cyprien au Peuple persistant en l’Evangile, Salut.
C omme je suis grandement marri et dolent en mon cœur, lorsqu’il ne se présente aucune occasion de vous écrire (car ce m’est grande perte et dommage, de ne point parlementer avec vous) aussi n’y a-t-il rien, qui me rende plus joyeux et allègre, que quand derechef il il se présente quelque occasion. Il m’est avis que je suis avec vous, quand par lettres je parle à vous. Or combien que je sache que vous êtes assurés, qu’il est ainsi que je dis, et que ne doutez aucunement, que mon dire ne soit véritable : si est-ce qu’il est apparent et manifeste, qu’il est ainsi. Car quand on ne laisse échapper aucune occasion, adonca on montre l’affection qu’on a. Donc combien que je certain, que vous n’êtes pas moins graves en sainte vie et bonne conversation, que fermes et entiers en la foi : toutesfois pource qu’ilb n’y a pas faute de gens délicats, favorisant et soutenant les vices, et leur donnant autorité, voire qui pis est, abusantc de l’autorité des saintes et divines écritures, pour soutenir les vices, comme si ce ne fût point mal fait se trouver aux Spectacles publics pour se récréer (car la vigueur de la discipline ecclésiastique est tellement abâtardie et écouléed, et déchoit si fort de mal en pis, qu’il n’est plus jàe question d’excuser les péchés, ainsf de les approuver et avouer.) J’ai été d’avis en peu de paroles, non de vous instruire, mais admonester, de peur que si les plaies ne sont bien liées, et serrées, elles viennent à s’engregerg, et causer une plus dangereuse maladieh. Car il n’y a mal qui s’éteindei plus difficilement, que celui lequel retourne aisément, quand la multitude d’un commun consentement l’avoue, et encore se plaît à l’excuser. C’est qu’il y a des fidèles, et qui s’attribuent le nom de Chrétiens, lesquels n’ont point de honte de soutenir, et défendre par l’autorité des saintes écritures, les superstitions des Gentils, mêlées avec leurs spectacles et jeux publics, et avouent leur idolatrie. Car quand un Chrétien se trouve au spectacle, pour assister à ce que les Gentils font en l’honneur de quelqu'unj de leurs idoles, c’est approuver l’idolatrie Gentile, et fouler au pied la vraie et divine religion en contuméliek du vrai Dieu. Je suis honteux de déclarer ici les lieux et passages, desquels ils usent pour soutenir leur dire. En quel lieu, disent-ils, sont ces choses écrites ? où sont-elles défendues ? Elie est le chariot d’Israël : et même David a dansé devant l’arche. Nous lisons les Psaltérions, les Trompettes, les Tambours, les Flûtes, les Harpes, les Fifres. L’Apôtre aussi faisant mention de la lutte, que nous avons contre les malices spirituelles, propose un combat, en outre il prend exemple de la lice, et propose une couronne comme le prix et joyau : pourquoi donc ne sera-t-il pas loisible à un Chrétien, de regarder ce qui est couché en la sainte écriture ? Je dirai en cet endroit qu’il vaudrait mieux à ceux-ci, n’avoir aucune connaissance des lettres, que de les lire en cette façon. Car c’est détourner les paroles et exemples, qui nous sont proposés pour nous exhorter à la vertu Evangélique, à soutenir et défendre les vices : pour ce que ces choses-là ne sont pas écrites, afin de les aller voir ès spectacles, ains pour exciter de plus en plus nos esprits et entendements, d’être plus diligents ès choses profitables, puisque les Ethniquesl le sont tant ès choses qui ne leur apportent aucune utilité. C’est donc un argument et motif de nous exciter à vertu, et non une permission ou liberté d’aller regarder l’erreur des Gentils : afin que l’esprit fût plus induit à embrasser la vertu Evangélique, à cause des divins loyersm qui nous sont proposés, vu que par la calamité de tous travaux et douleurs, nous est permis d’accourcir et abréger ce chemin terrestre. Car qu’Elias soit le chariot d’Israël, cela ne fait rien pour preuve des jeux publics, nommés Circenses. Car il ne courut oncquesn en lieu public. Et quant à ce que David dansa devant Dieu, n’aide en rien les Chrétiens fidèles, qui sont assis sur le Théâtre. Car jamais il ne dansa une fable lascive des Grecs, avec mouvements déshonnêtes, branlant ses bras ça et là. Les Psaltérions, les Trompettes, les Flûtes, et les Harpes ont chanté Dieu et non point une Idole. Parquoi cela n’est pas prescrire, qu’on regarde choses illicites, C’est une ruse et finesse du diable, de changer les choses bonnes et saintes en mauvaises et profanes. Du moins que la honte leur donne la loi, puisque les saintes écritures ne le peuvent. Car l’écriture pourvoit davantage à beaucoup de choses, quando elle commande : aussi quand elle se tait de quelque chose, pour garder modestie, c’est alors qu’elle la défend et prohibe davantage. Si la vérité s’étendait jusqu'à parler de tout, elle eût eu mauvaise opinion de ses fidèles : car même il est plus utile bien souvent de taire quelques choses èsp commandements, que les exprimer : et souventesfoisq ils admonestent, lorsqu’ils sont retranchés de l’écriture : et aussi encore qu’ils soient écrits, on n’en sonne mot, pource qu’en lieu des préceptes, la sévérité parler ce que l’écriture a omis. Qu’un chacun seulement délibère en soi-même, et parle avec la personne de sa profession : jamais il ne fera rien déshonnête : car la sentence laquelle ne se devra à autre qu’à soi-même, aura plus de poids et d’autorité. Qu'est-ce donc que l’écriture a défendu ? Elle a prohibé de regarder ce qu’elle prohibe de faire. Elle a condamné, dis-je, toutes ces espèces de spectacles, et jeux publics, quand elle a ôté l’Idolatrie mère de tous jeux, dont tous ces monstres de vanité et légèreté sont sortis. Car quel spectacle, y a-t-il, sans Idole ? quel jeu sans sacrifice ? quel combat, qui ne soit consacré à un homme mort ? qu’a à faire le Chrétien fidèle entre ces choses, s’il fuit Idolatrie ? que dit-il, lui qui est déjà saint ? Il prend récréation ès choses détestables. Pourquoi approuve-t-il les superstitions contre Dieu, lesquelles il aime en les regardant ? Au reste qu’il entende, que toutes ces choses sont inventions des diables et non de Dieu. Le Chrétien exorcise impudemment les diables en l’Eglise, puisqu’il loue leurs voluptés ès Spectacles : et vu qu’il a une fois renoncé au diable, et qu’au baptême tout le droit qu’il y avait, a été retranché : à la vérité puisqu’après Jésus-Christ il va au diable au Spectacle, il renonce à Jésus-Christ, comme il avait fait au diable. Idolatrie, ainsi que j’ai dit, est la mère de tous les jeux, laquelle afin que les Chrétiens fidèles aillent à elle, les amadoue et flatte par le plaisir des yeux et des oreilles. Romulus fut le premier qui consacra les Circenses à Consus, comme Dieu de conseil, pour ravir les Sabines. Les autres jeux ont été institués pour amassert le peuple, lorsque la famine avoit saisi la ville, comme Comédies, et Tragédies, et ces jeux furent puis après dédiés à Cérès et Bacchus, et aux autres Idoles et morts. Ces jeux de prix Grégeoisu, ou en chants, ou en instruments de musique, ou en voix, ou en forces, ont pour leurs chefs, divers diables : et toute autre chose qui émeut et attire les yeux des Spectateurs, ou attraitv les oreilles, si on regarde son origine et institution, on trouvera que la cause est ou une Idole, ou un diable, ou un mort. Ainsi le diable cauteleux et ruséw pource qu’il savait qu’on a en horreur la nue et simple idolatrie, il l’a entremêlée de Spectacles, afin que sous ombre de passe-temps et récréation, elle fût aimée. Qu’est-il besoin d’en dire davantage ? ou déchiffrer les espèces monstrueuses des Sacrifices, qui se sont ès jeux entre lesquels quelquefois un homme est l’hostie, par le larcin du sacrificateur, lorsque le sang découlant du gosier de ce pauvre misérable, tout chaud et tout bouillant reçu dedans une coupe, est jeté sur la face de l’Idole, et cruellement bu, comme si elle avait soif : et entre les plaisirs et passe-temps, que prennent les Spectateurs, ils voient mourir quelques-uns, afin que par tel Spectacle sanglant, ils apprennent à exercer toute cruauté : comme si la rage et furie d'un chacun particulier ne lui suffît point, s’il ne l’apprenait même en public.
On nourrit en délices une bête cruelle, pour le supplice d’un homme, afin qu’à la vue des Spectateurs, elle s’effarouche plus cruellement : on instruit une bête, laquelle par aventure eût été plus douce de sa nature, si on ne lui eût baillé quelque gouverneur pour la rendre plus cruelle. Parquoy15 afin que ie me taise, de tout ce que l’idolatrie approuve plus largement, combien sont vains ces jeux de prix, comme les débats ès couleurs, les contentionsy ès chariots, s’éjouir de ce que un tel cheval a mieux couru, se lamenter et plaindre, de ce qu’il n’a pas assez bien fait son devoir, regarder quants ansz peut avoir le cheval, connaître les Consuls, dire leur âge, raconter leur maison et lignée, et les pères grands, et les bisaïeuls : tout cela n’est-ce pas chose oiseuse, voire à mieux dire, n’est-ce pas une chose vilaine et déshonnête, et qui ne sert de rien ? qu’un homme, dis-je, raconte par cœur toute la race d’un tel et tel cheval, et sans méprendre discouriraa légèrement ce qui touche ce lieu et Spectacle ? Et si tu l’interroges de ce qui appartient à Jésus-Christ, il n’en sait rien : ou bien s’il le sait, tant plus est-il malheureux. Et si derechef je l’interroge, par quel chemin il est parvenu à ce Spectacle, il confessera, que çaab été par le bourdeauac, par les corps nus des femmes abandonnées, par paillardise publique, par déshonneur public, par lasciveté accoutumée, et par la commune contumélie, et outrage de tous. Et ores quead je ne lui objecte point ce que par aventure il a commis, si est-ce qu’il a vu, ce qui n’était pas loisible de faire, et par appétit désordonné a conduit ses yeux, pour regarder un Spectacle d’Idolatrie, ayant été si téméraire, que de mener avec soi le saint Esprit au bourdeau s’il eût pu, pour ce que se hâtant d’aller voir ces jeux publics, et suivant sa coutume, ayant encore avec soi l’Eucharistie, la porter entre les corps des paillardes, méritant plus grièveae damnation d’avoir pris plaisir à contempler tels Spectacles. Mais afin que je passe outre, et que je vienne à parler des impudentes farceries et railleries de ces jeux publics, j’ai honte de raconter ce qui s’y dit, j’ai honte aussi d’accuser ce qui s'y fait : les ruses et finesses des joueurs, les tromperies des adultères, les impudicités des femmes, les sornettes et brocards des plaisanteurs, les vilains flatteurs, même les pères de famille vêtus de longues robes, ores tout hébétés, ores insensés en toutes choses, et déshonnêtes pour beaucoup de causes et raisons. Et combien que ces méchants en leurs farceries n’épargnent personne, de quelque sexe, état, ou condition qu’elle soit, si est-ce, que tous courent à la foule voir tels Spectacles. Ils prennent passe-temps et délectation à cette vilénie, ou de connaître l’oisiveté, ou de l’apprendre : on vient en affluence en ce bourdeau de honte publique, en cette instruction de déshonnêteté, afin qu’on ne fasse moins en secret, ce qu’on apprend en public : et même entre les lois on enseigne tout ce que les lois défendent et prohibent. Que fait un fidèle Chrétien entre ces choses, auquel il n’est pas loisible même de penser aux vices ? Pourquoi prend-il plaisir ès simulacres et représentations de paillardise et souillure, afin qu’ayant mis bas toute modestie il soit plus hardi à commettre tels crimes ? Car en s’accoutumant de voir telles méchancetés, il apprend aussi à les faire. Celles qui par leur malheur se sont abandonnées à impudicité, se cachent au bourdeau public, et consolent leur vilénie par telles cachettes, et ores qu'elles aient mis en vente leur pudicité elles ont néanmoins vergogne de se montrer : Mais ce monstre public se fait à la vue de tout le monde, et telle turpitude surpasse le fait des pauvres femmes éhontées. Car on cherche occasion par le regard des Spectacles de commettre adultère. On ajoute à cette infamie une autre infamie condigneaf : à savoir un homme ayant tous les membres rompus pour faire des soubresauts, voire un homme plus dissolu et efféminé que n’est une femme, sachant bien le métier de passe-passe et de la langue et des mains, et pour un je ne sais quel, qui n’est ni mâle ni femelle, toute une Cité s’émeut entièrement pour aller voir danser, et jouer des vilénies et ordures anciennes. Voilà comme on aime ce qui n’est pas licite, de manière qu’on propose ce que l’âge même avait caché, par ainsi tels impudiques sont tant débordés, qu’ils ne se contentent pas d’user de leurs maux présents, s’ils ne proposent aussi en public ce en quoi les anciens ont offensé longtemps devant. Il n’est pas licite, dis-je aux Chrétiens fidèles de se trouver à tels Spectacles : il ne leur est pas licite totalement : ni semblablement écouter ceux, que la Grèce envoie de toutes parts, instruits de ses arts vaines et frivoles, pour chatouiller les oreilles : l’un sonnant de la trompette bellique, l’autre de clairons, l’autre jouant de la flûte, chants piteux et lugubres, l’autre entre les danses avec une harmonieuse voix d’un homme, s’efforçant de toute son haleine, qu’à grand force il tire du profond de ses entrailles, fredonnant des doigts sur les pertuisag des flûtes, maintenant lâchant son vent, maintenant l’enfermant dedans, et le retirant, maintenant le lâchant par certains pertuis, et l’espardantah en l’air, déchiquetant le son distinctement et par articles, s’efforce parler des doigts, se montrant ingrat envers l’ouvrier, qui lui a donné la langue. Que dirai-je du soin et fâcherie inutile des personnes, que l’on introduit ès Comédies ? des fureurs et insaniesai merveilleuses de ceux, qu’on introduit ès Tragédies ? et autres cris et hurlements épouvantables ? Et combien que telles choses ne fussent point consacrées aux Simulacres et Idoles, si est-ce que les fidèles Chrétiens ne s’y doivent pas trouver : pource que combien qu’elles n’eussent en soi aucun crime, elles ont toutefois en soi une bien grande vanité et fort mal séante à un Chrétien. Car c’est une autre folie manifeste marchander à des hommes oiseux d’être battuaj : et estimer aussi une grande et première victoire, faire jeûner son ventre outre mesure, sous ombre d’une couronne gourmande qu’on aura acceptée par un marché vilain et déshonnête : être pareillement si malheureux, que présenter son visage aux coups, pour plus malheureusement engraisser son ventre. Et quant aux luttes, ne sont-ce pas choses vilaines ? voir deux hommes s’enserrer l’un dedans l’autre, et se tenir embrassés déshonnêtement ? Tiens-toi en tel combat, regarde bien qui sera victorieux, tant que tu voudras, si est-ce que là toute honte et modestie est vaincue. En voici un autre qui saute tout nu, un autre à force de bras jette en haut une boule d’airain, toute telle gloire est folie, et pour dire en un mot, qu’il n’y ait point de Spectateur, tout ira en fumée. Les fidèles Chrétiens (comme nous avons dit par plusieurs fois) doivent fuir tous tels Spectacles tant frivoles, tant dommageables et sacrilèges, et garder diligemment nos yeux et nos oreilles : car nous nous accoutumons bien aisément aux vices, desquels nous oyonsak parler. Car vu que l’esprit de l’homme s’adonne de soi-même à vices et péchés, que fera-t-il s’il a des exemples d’une nature corporelle glissante, et facile à tomber ? Et si de soi-même il trébuche, que fera-t-il s’il est excité ? Parquoy il le faut retirer de là. Le Chrétien a des meilleurs Spectacles s’il veut. Il a des vrais et profitables passe-temps s’il se veut récréer. Et afin que j’omette les choses qu’il ne peut encore contempler pour le présent, il peut regarder et admirer la beauté de ce monde : qu’il contemple comme le soleil va d’Orient en Occident, et que par tel mouvement il rappelle les jours et les nuits par réciproque succession : qu’il contemple comment la lune par ses accroissements et décroissements, signe les cours des temps et saisons : qu’il regarde ces beaux rangs des astres reluisants, et éclairant d’en haut avec leur subit mouvement : qu’il regarde les parties de toute l’année avec leurs alternations, et semblablement les jours avec les nuits distingués par les intervalles et espaces des heures : le contrepoids de la terre tant pesante, avec les montagnes : le cours des rivières avec leurs fontaines et sources : la grande étendue de la mer, avec ses flots et rives : qu’il contemple l’air étendu au milieu conjoint avec les autres Eléments, lequel de sa subtilité, donne force et vigueur à toutes choses, maintenant étant couvert de nuées, et engendrant les pluies, maintenant se montrant beau, clair, et serein : il pourra voir aussi qu’en tous ces Eléments il y a des habitants : comme en l’air, l’oiseau : en l’eau, le poisson : en la terre, l’homme. Que toutes ces choses, dis-je, et autres œuvres divines soient les Spectacles des fidèles Chrétiens. Y a-t-il Théâtre fait et bâti de main d’homme, qui puisse estre comparé à ces œuvres ? Quoiqu’il fût construit de pierres grosses et merveilleuses, ce ne sont que morceaux et pièces de montagnes : et ores que les lambris fussent dorés, et reluisants à merueilles, la lueur et splendeur des astres les surpasse infiniment. Une personne qui se connaîtra enfant de Dieu, jamais ne se donnera de merveilles des œuvres humaines : Et à la vérité, celui qui peut admirer autre chose que Dieu, se précipite du haut degré et sommet de sa noblesse. Que le Chrétien fidèle s’adonne aux saintes écritures, car là trouvera des Spectacles dignes de sa foi. Il verra comme Dieu crée le monde, comme il fait l’homme avec les autres animaux : comme il façonne sa machine, et la rend meilleure et plus belle : il connaîtra comme le monde se baigne en ses péchés, il verra les justes naufrages, les loyers des gens de bien, et les supplices des méchants : il apprendra comme les mers ont été séchées pour passer le peuple de Dieu, et comme l’eau est sortie du rocher pour le peuple d’Israël : il contemplera les moissons venant du ciel, et non point des greniers humains : il regardera comme les fleuves ont donné passage, leurs eaux étant amassées à dextre et à senestre : il verra ès aucunsla foi combattant contre le feu : Les bêtes cruelles surmontées et apprivoisées par la piété et religion des autres : il verra pareillement plusieurs avoir été ressuscités des morts, et plusieurs corps jà consumés être sortis de leurs sépulchres, pour se réunir à leurs âmes : et surtout verra un merveilleux et admirable Spectacle, à savoir le diable, lequel avait triomphé de tout le monde, gésir tout étendu, sous les pieds de Jésus-Christ. N’est-ce pas là un beau Spectacle, frères ? n’est-il pas plaisant ? n’est-il pas nécessaire ? toujours contempler son espérance, et ouvrir les yeux pour son sauvemental ? c’est là un Spectacle, lequel on peut voir même la vue étant perdue : c’est là un Spectacle, qui n’est point proposé ni par un Préteur, ny par quelque Consul : mais par celui qui est seul, et devant, et sur toutes choses, voir duquel sont toutes choses, à savoir le Père de notre Seigneur Jésus-Christ : auquel soit louange, et honneur ès siècles des siècles, Ainsi soit-il.