(1667) Traité de la comédie et des spectacles « Sentiments des Pères de l'Eglise sur la comédie et les spectacles — 12. SIECLE. » pp. 187-190
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(1667) Traité de la comédie et des spectacles « Sentiments des Pères de l'Eglise sur la comédie et les spectacles — 12. SIECLE. » pp. 187-190

12. SIECLE.

SAINT BERNARD

Dans le Traité de la conversion des Mœurs, Chap. II.

Quant à la vue des Spectacles vains, que sert-elle au corps, ou quel bien apporte-t-elle à l'âme et Certes vous ne trouverez point que l'homme tire quelque profit de la curiosité. Les divertissements sont de pures niaiseries: et je ne sais quel plus grand mal je lui pourrais souhaiter que la durée de ces vains, amusements qu'il recherche, et de cette inquiétude curieuse dont il est charmé, et qui lui fait haïr la paix et la douceur d'un heureux repos. Il est bien clair qu'il n'y a rien de solide en tous ces plaisirs, puis qu'on n'en aime que le mouvement passager par lequel ils succèdent les uns aux autres, et non pas leur continuation et leur durée. Que si les vanités ne sont que des choses vaines, comme nom seul le marque assez clairement ; Il faut nécessairement que le travail qu'on emploie à des choses vaines soit aussi vain qu'elles: O gloire ! Ô gloire, dit un Sage, qu'êtes-vous parmi la plupart des hommes, qu'une vaine enflure que le cœur conçoit par l'oreille ? Et cependant combien cette vanité heureuse, ou plutôt cette vaine félicité produit-elle de malheurs ?

C'est de là que vient l'aveuglement du cœur, selon ce qui est écrit : O mon peuple, ceux qui vous appellent heureux, vous trompent. C'est de là que viennent les peines fâcheuses    des soupçons, et les cruels tourments de la jalousie, etc.

Certes ce n'est pas tant une folie, qu'une infidélité d'aimer des choses si basses, ou plutôt des choses de néant, et d'estimer si peu cette gloire que nul œil n'a vue, que nulle oreille n'a ouïe, que nul esprit humain n'a imaginée, ces biens et ces trésors que Dieu a préparés pour ceux qui l'aiment.

JEAN DE SALISBERY
Evêque de Chartres

Dans le 1. Livre des Vanités de la Cour, Chap. 8.

Notre siècle s'attachant à des fables e à de vains amusements, ne prostitue pas seulement les oreilles et le cœur à la vanité ; mais il flatte aussi son oisiveté par les plaisirs des yeux et des oreilles ; et il allume le feu de l'impureté cherchant de toutes parts ce qui est propre à entretenir les vices.

L'oisiveté est l'ennemie de l'âme, qui la dépouille de toutes ses inclinations vertueuses ; C'est pourquoi un très savant homme donne ce conseil : Que l'ennemi du genre humain, dit-il, vous trouve toujours occupé, afin qu'avec autant de bonheur, que de prudence, vous vous couvriez de vos occupations, comme d'un bouclier contre toutes ses tentations : Il faut fuir l'oisiveté comme une dangereuse Sirène ; et cependant les Comédiens nous y attirent. L'ennuy se glisse aisément dans un esprit vide qui ne se peut supporter lui-même, s'il n'a quelque volupté pour se divertir: C'est pour cela que l'on a introduit les Spectacles, et tous ces appareils de la vanité, ou s'occupent ceux qui ne peuvent vivre sans quelque amusement ; Mais c'est un dérèglement pernicieux ; car l'oisiveté leur serait encore plus avantageuse qu'une si honteuse occupation.

Estimez-vous un homme sage qui se plaît à écouter et à voir ces niaiseries ? J'avoue qu'un homme de bien peut honnêtement se donner quelque plaisir modéré : Mais c'est une chose honteuse à un homme grave de s'avilir, et de se souiller par ces sortes de divertissements infâmes. Un homme d'honneur ne doit point regarder les Spectacles, et particulièrement ceux qui sont déshonnêtes, de peur que l'incontinence de sa vue ne soit un témoignage de l'impureté de son âme ; C'est avec raison que Périclès étant Préteur reprit Sophocle son collègue, en ces termes: Il faut qu'un Magistrat n'ait pas seulement les mains pures, mais les yeux même ; C'est pourquoi un homme à qui la puissance Royale donnait une grande licence, faisait cette prière à Dieu: Détournez mes yeux afin qu'ils ne regardent point la vanité; car il savait bien qu'il est certain que la vue cause une infinité de maux ; ce que le Prophète Jérémie déplore dans ses Lamentations ; Mes yeux, dit-il, ont ravi mon âme comme une proie.

Vous ne doutez point que l'autorité des Pères de l'Eglise n'ait interdit la sacrée Communion aux Comédiens e aux Farceurs; d'où vous pouvez juger quelle peine méritent ceux qui les favorisent, Si vous vous représentez que les coupables des crimes, et leurs complices doivent être également punis. Ceux qui donnent aux Comédiens, dit Saint Augustin, pourquoi leur donnent-ils, si ce n'est parce qu'ils se plaisent au mal que font ces personnes infâmes ? Or celui qui se plaît au mal, et qui l'entretient est-il homme de bien.