(1754) La Comédie contraire aux principes de la morale chrétienne « La comédie contraire aux Principes de la Morale Chétienne. — XI. Son opposition à l’Evangile. » pp. 23-24
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(1754) La Comédie contraire aux principes de la morale chrétienne « La comédie contraire aux Principes de la Morale Chétienne. — XI. Son opposition à l’Evangile. » pp. 23-24

XI.

Son opposition à l’Evangile.

Est-il possible après ce qui vient d’être dit sur la Comédie considérée en elle-même, est-il possible de se dissimuler à soi-même l’opposition décidée de ses maximes à celles de l’Evangile ? Ici tout est mis en œuvre pour effacer les traits du vieil homme, l’attacher à la croix, & lui substituer l’image du nouveau : là tout est employé pour défigurer le nouvel Adam, & faire revivre l’ancien. Le but de celui-là est de subjuguer la triple concupiscence & de fermer toute avenue au vice dont elle est la source : le dessein de celle-ci est de l’affranchir de tout joug, & de lui donner toute liberté. Au jugement de l’un, l’orgueil est en abomination aux yeux de Dieu, l’impureté un crime si horrible qu’il ne veut pas même qu’il soit nommé, la passion pour les richesses une véritable idolatrie, le faux point d’honneur une injustice criante qui entreprend même sur les droits du Très-haut, qui s’est réservé la vengeance : au jugement de l’autre l’humilité est une bassesse, la patience une lâcheté, la mortification une folie, la pauvreté presqu’un crime, l’affliction un tourment, l’humiliation un supplice, & la modestie un vain scrupule.

N’est-ce pas-là attaquer de front Dieu lui-même ? N’est-ce pas braver le Tout-puissant ? N’est-ce pas le piquer de jalousie, lui qui ne cédera pas sa gloire à d’autres ? De quelles malédictions ne charge-t’il point cette malheureuse Cité qu’on oppose à celle de ses enfans qu’on veut égorger ? Quand nous ne les prononcerions point en son nom, la pierre même du Téâtre, le bois même qui le compose, crieroit malheur à celui qui bâtit une ville de sang, & qui la fonde dans l’iniquité.
En imposerons-nous encore après cela, quand nous dirons d’après S. Augustin, qu’un bon chrétien ne se trouve pas au Théatre, non vult bonus christianus ire spectare  ; que l’amour des spectacles dépouille des richesses précieuses de la justice, istorum pectus justitiæ divitiis expoliatur  ; qu’il est un encens agréable aux démons, & que c’est le brûler en quelque sorte sur leurs autels, que de se plaire aux spectacles. Ista facientes quasi thura ponunt dæmoniis de cordibus suis.
Devra-t’on être surpris d’entendre S. Charles mettre toujours ces malheureux divertissemens au rang des attraits & des pepiniéres du vice  ; les faire détester comme les sources des calamités publiques & des vengeances divines  ; exhorter les Princes & les Magistrats à chasser les Comédiens, les Baladins, les Joueurs de Farces & autres pestes publiques, comme gens perdus & corrupteurs des bonnes mœurs, & à punir ceux qui les logent dans les Hôtelleries ?