(1667) Traité de la comédie « Traité de la comédie — IX.  » p. 4623
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(1667) Traité de la comédie « Traité de la comédie — IX.  » p. 4623

IX.

Quand il serait vrai que la Comédie ne ferait aucun mauvais effet sur de certains esprits, ils ne la pourraient pas néanmoins prendre pour un divertissement innocent, ni croire qu'ils ne sont point coupables en y assistant. On ne joue point la Comédie pour une seule personne : c'est un spectacle qu'on expose à toutes sortes d'esprits, dont la plupart sont faibles et corrompus, et à qui par conséquent il est extrêmement dangereux. C'est leur faute dira-t-on d'y assister en cet état. Il est vrai, mais vous les autorisez par votre exemple ; vous contribuez à leur faire regarder la Comédie comme une chose indifférente; plus vous êtes réglés dans vos autres actions, plus ils sont hardis à vous imiter dans celle-là. Pourquoi, disent-ils, ferons-nous scrupule d'aller à la Comédie, puisque les gens qui font profession de piété y vont bien ? Vous participez donc à leur péché : et si la Comédie ne vous fait point de plaies par elle-même vous vous en faites à vous-même par celle que les autres reçoivent de votre exemple ; et ainsi vous êtes le plus coupable de tous. Les personnes du monde ne faisant point d'exemples ne sont presque coupables que de leurs propres péchés : mais ceux qui veulent passer pour vertueux, et qui pratiquent en effet quelques bonnes œuvres, sont coupables de leurs propres péchés et de ceux des autres ; et non seulement ils perdent le mérite de leurs bonnes actions, mais ils les empoisonnent en quelque sorte en les faisant servir à engager les autres dans le péché.