(1754) La Comédie contraire aux principes de la morale chrétienne « La comédie contraire aux Principes de la Morale Chétienne. — XVIII. Autorité des loix. » pp. 45-47
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(1754) La Comédie contraire aux principes de la morale chrétienne « La comédie contraire aux Principes de la Morale Chétienne. — XVIII. Autorité des loix. » pp. 45-47

XVIII.

Autorité des loix.

« S. Thomas, répond ce grand homme, a décidé que les loix humaines ne sont pas tenues à réprimer tous les maux, mais seulement ceux qui attaquent directement la société L’Eglise , dit S. Augustin, n’éxerce la sévérité de ses censures que sur les pécheurs dont le nombre n’est pas grand. Severitas exercenda estin peccata paucorum. C’est pourquoi elle condamne les Comédiens, & croit par-là déffendre assez la Comédie. La décision en est précise dans les Rituels ; la pratique en est constante. On prive des Sacremens & à la vie & à la mort ceux qui jouent la Comédie, s’ils ne renoncent à leur art. On les passe à la sainte Table comme des pécheurs publics : on les exclud des ordres sacrés comme des persones infâmes : par une suite infaillible la sépulture Ecclésiastique leur est déniée.

« Quant à ceux qui fréquentent les Comédies, comme il y en a de moins coupables les uns que les autres, & peut-être quelques-uns qu’il faut plutôt instruire que blâmer, ils ne sont pas répréhensibles en même dégré, & il ne faut pas fulminer également contre tous : mais de-là il ne s’ensuit pas qu’il faille autoriser les périls publics. Si les hommes ne les apperçoivent pas, c’est aux Prêtres à les instruire, & non pas à les flatter.

« Dès le tems de S. Chrisostôme les deffenseurs des Spectacles crioient que les renverser, c’étoit renverser les loix . Mais ce Pere sans s’émouvoir, disoit au contraire que l’esprit des loix étoit opposé aux Théâtres. Nous avons maintenant à leur opposer quelque chose de plus fort, puisqu’il y a tant de Décrets publics contre la Comédie, que d’autres que moi ont rapportés. Si la coutume l’emporte, si l’abus prévaut, ce qu’on en pourra conclurre, c’est que la Comédie doit être rangée parmi les maux dont un célébre Historien a dit, qu’on les deffend toujours, & qu’on les a toujours.
« Mais après tout, quand les loix civiles autoriseroient la Comédie ; quand au lieu de flétrir comme elles ont toujours fait, les Comédiens, elles leur auroient été favorables : tout ce que nous sommes de Prêtres, nous devrions imiter l’exemple des Chrisostôme & des Augustin. Pendant que les loix du siécle qui ne peuvent pas déraciner tous les maux, permettoient l’usure & le divorce, ces grands hommes disoient hautement, que si le monde permettoit ces crimes, ils n’en étoient pas moins réprouvés par la loi de l’Evangile ; que l’usure qu’on appelloit légitime, parce qu’elle étoit autorisée par les loix Romaines, ne l’étoit pas selon celles de J. C. & que les loix de la Cité sainte & celles du monde étoient différentes.

Un texte si précis doit déconcerter les apologistes de la Comédie. Il leur enleve leur ressource favorite. Il les dépouille de la protection si vantée des loix de l’Etat, pour les livrer à la sévérité de celles de l’Eglise, & les engager par-là à renoncer à des divertissemens si criminels. Et comment les loix civiles pourroient elles autoriser le Théatre qui jette le trouble par tout, souffle le feu de l’impureté dans les jeunes gens, & le réveille dans les vieillards ? L’opprobre des familles, la discorde dans les maisons, les larcins, les jalousies, les meutres ne sont-ils pas les suites funestes des passions qu’il excite ? Mais tirons le rideau sur ces infamies ; & qu’il nous suffise d’avoir dit que ce fut pour ces raisons que S. Louis chassa les Comédiens de son Royaume.