(1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre XIX. Les Spectacles condamnés par les saintes Ecritures. » pp. 164-167
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(1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre XIX. Les Spectacles condamnés par les saintes Ecritures. » pp. 164-167

Chapitre XIX.
Les Spectacles condamnés par les saintes Ecritures.

On nous dira peut-être que l’Ecriture sainte et l’Evangile ne défendent point les spectacles. Nous répondrons, avec saint Cyprien, que l’Ecriture sainte et l’Evangile ont plus dit en se taisant sur ce point, que s’ils s’étaient expliqués par des défenses expresses. Quelle nécessité y avait-il en effet de faire un précepte pour des choses qui étaient si visiblement indignes du nom chrétien, si contradictoirement opposées à l’esprit et aux maximes du christianisme ?

« Quels sentiments aurait eus Jésus-Christ des fidèles qu’il formait, s’il avait jugé nécessaire de leur interdire, par une loi expresse, des plaisirs païens ? Quels sentiments auraient eus des fidèles, les païens eux-mêmes, s’ils avaient vu qu’avec cette loi si pure, si sainte et si parfaite, qui condamne jusqu’à la pensée du mal, qui oblige de tendre sans cesse à la perfection, ces fidèles eussent eu besoin d’un commandement particulier pour n’aller pas aux spectacles ?

« Mais on se trompe de dire que l’Evangile et l’Ecriture sainte ne défendent nulle part ces divertissements profanes. Ils ne les défendent pas en particulier quelque part, parce qu’ils les condamnent partout : car que signifie autre chose tout ce que l’Evangile et l’Ecriture sainte nous disent de la pureté du cœur, qui est la base de la vie chrétienne, tout ce qu’ils nous disent de la mortification des sens, de la légèreté de l’esprit, de la faiblesse de la chair, de la force des passions, de la malice et des ruses du tentateur, du danger de s’exposer aux moindres occasions d’être tenté ; tout ce qu’ils nous disent de l’attention et de la vigilance sur les désirs, de la modération des plaisirs, de la perversité des maximes et des joies mondainesbq ? » Comment ose-t-on avancer que l’Evangile ne défend point les spectacles, tandis que tout l’Evangile en est une condamnation manifeste ?

En proscrivant les inclinations vicieuses, les saintes Ecritures proscrivent aussi tout ce qui les fait naître, les entretient et les fortifie. En condamnant en général tout ce qui est déshonnête, elles condamnent les représentations théâtrales et les tableaux immodestes. Saint Jean n’a rien oublié, lorsqu’il a dit : « N’aimez point le monde, ni ce qui est dans le monde : celui qui aime le monde, l’amour du Père n’est point en lui ; car tout ce qui est dans le monde est concupiscence de la chair, ou concupiscence des yeux, ou orgueil de la vie : laquelle concupiscence n’est point de Dieu, mais du monde13. » Si la concupiscence n’est pas de Dieu, les représentations théâtrales, qui en étalent tous les attraits, ne sont pas de lui, mais du monde. Ces paroles ne frappent pas moins le théâtre que le monde qui en est l’image : c’est le monde avec tous ses charmes et toutes ses pompes qu’on représente dans les comédies. Ainsi, comme dans le monde tout y est sensualité, curiosité, ostentation, orgueil, on y fait aimer tous ces vices, puisqu’on ne pense qu’à y faire trouver du plaisir, en les donnant comme des vertus héroïques, ou au moins en les excusant et en les faisant envisager comme de légères imperfections.

Saint Paul aussi a tout compris dans ces paroles : « Au reste, mes frères, tout ce qui est véritable, tout ce qui est juste, tout ce qui est saint (selon le grec, tout ce qui est chaste, tout ce qui est pur), tout ce qui est aimable, tout ce qui est édifiant ; s’il y a quelques vertus parmi les hommes, et quelque chose digne de louange dans la discipline, c’est ce que vous devez penser14 » : tout ce qui vous empêche d’y penser, et qui vous inspire des pensées contraires, ne doit point vous plaire, et doit vous être suspect. Il est aisé de concevoir que tout ce que saint Paul propose ici à un chrétien ne peut en aucune manière s’allier avec la fréquentation des spectacles, et que les principes qu’il pose ne doivent qu’inspirer du dégoût et du mépris pour des divertissements si contraires à l’esprit évangélique qui est un esprit de pénitence, de mortification et d’abnégation de soi-même.