(1694) Maximes et Réflections sur la Comédie « IX. Qu’il faut craindre en assistant aux comédies, non seulement le mal qu’on y fait, mais encore le scandale qu’on y donne. » pp. 41-43
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(1694) Maximes et Réflections sur la Comédie « IX. Qu’il faut craindre en assistant aux comédies, non seulement le mal qu’on y fait, mais encore le scandale qu’on y donne. » pp. 41-43

IX. Qu’il faut craindre en assistant aux comédies, non seulement le mal qu’on y fait, mais encore le scandale qu’on y donne.

Pour ce qui est de ces « gens de poids et de probité », qui, selon l’auteur de la dissertation fréquentent les comédies « sans scrupule » , que je crains que leur probité ne soit de celles des sages du monde qui ne savent s’ils sont chrétiens ou non, et qui s’imaginent avoir rempli tous les devoirs de la vertu lorsqu’ils vivent en gens d’honneur, sans tromper personne, pendant qu’ils se trompent eux-mêmes en donnant tout à leurs passions et à leurs plaisirs. Ce sont de tels sages et de tels prudents à qui Jésus-Christ déclare que « les secrets de son royaume sont cachés, et qu’ils sont seulement révélés aux humbles et aux petits » qui tremblent aux moindres discours qui viennent flatter leurs cupidités. Mais ce sont gens, dit l’auteur,« d’une éminente vertu »  , et il les compte par milliers. Qu’il est heureux d’en trouver tant sous sa main et que la voie étroite soit si fréquentée : « Mille gens, dit-il,i d’une éminente vertu et d’une conscience fort délicate pour ne pas dire scrupuleuse, approuvent la comédie et la fréquentent sans peine. ». Ce sont des âmes invulnérables qui peuvent passer des jours entiers à entendre des chants et des vers passionnés et tendres sans en être émus : et des gens d’une « si éminente vertu » n’écoutent pas ce que dit saint Paul : « Que celui qui croit être ferme, craigne de tomber » : ils ignorent que quand ils seraient si forts et tellement à toute épreuve qu’ils n’auraient rien à craindre pour eux-mêmes, ils auraient encore à craindre le scandale qu’ils donnent aux autres, selon ce que dit ce même Apôtre : « Pourquoi scandalisez-vous votre frère infirme ? Ne perdez point par votre exemple celui pour qui Jésus-Christ est mort. » Ils ne savent même pas ce que prononce le même saint Paul : « Que ceux qui consentent à un mal y participent. » Des âmes « si délicates et si scrupuleuses » ne sont point touchées de ces règles de la conscience. Que je crains encore une fois qu’ils ne soient de ces scrupuleux « qui coulentj le moucheron, et qui avalent le chameau » , ou que l’auteur ne nous fasse des vertueux à sa mode, qui croient pouvoir être ensemble au monde et à Jésus-Christ.