(1664) Traité contre les danses et les comédies « Chapitre I. Que les Danses ne sont pas mauvaises de leur nature. » pp. 1-5
/ 566
(1664) Traité contre les danses et les comédies « Chapitre I. Que les Danses ne sont pas mauvaises de leur nature. » pp. 1-5

Chapitre I.
Que les Danses ne sont pas mauvaises de leur nature.

Comme les Danses ne sont que des assemblées, où l’on donne des témoignages de sa joie, et de sa satisfaction sensible par le chant, ou par l’usage de quelque instrument de Musique, et par le mouvement du corps ; il n’y a rien qui nous empêche d’entrer dans le sentiment commun des Docteurs, et de dire avec eux qu’elles ne sont point mauvaises de leur nature ; mais qu’elles sont d’elles-mêmes indifférentes. En effet cette sorte de témoignages extérieurs de contentement, et de joie, peuvent être bons, aussi bien que mauvais ; Et nous ne pouvons point douter, que quelques personnes pieuses n’en aient usé en quelques occasions, par le mouvement d’un véritable zèle, et par un sentiment de piété.

Cela paraît dans l’exemple de David, qui comme il est rapporté au second Livre des Rois, jouait de toute sorte d’Instruments lors qu’on porta l’Arche dans la ville de Jérusalem, et dansait en la présence de Dieu, et à la gloire du Seigneur : Et dans celui de Marie sœur d’Aaron, qui après que Dieu eut submergé Pharaon avec toute son armée dans les eaux de la Mer rouge, et délivré son peuple de la captivité, chantait avec les autres femmes, et donnait au son des Instruments d’autres marques visibles de sa joie intérieure, en action de grâces, et pour bénir la toute-puissance de Dieu, qui les avait affranchis par des voies si extraordinaires. On peut dire la même chose de la fille de Jephté, lorsqu’elle alla au devant de son Père, avec des semblables démonstrations de joie, pour montrer combien elle était touchée et satisfaite de sa victoire.

Mais tous ces exemples n’ont aucune conformité, ni aucun rapport, avec ce qui se fait aujourd’hui. Car toutes ces Danses dont il est parlé en ces endroits de l’Ecriture, n’étaient employées que pour honorer, et glorifier Dieu ; et celles qui se pratiquent maintenant, ne servent qu’au plaisir du corps, et à la délectation des sens ; et ont quelquefois des fins manifestement vicieuses.

Il est même à remarquer, et c’est une chose qui mérite d’être bien considérée, que nous ne lisons jamais dans les Livres sacrés, qu’il se soit fait aucune assemblée d’hommes et de femmes pour cet exercice. Donc il faut nécessairement conclure que ce serait abuser de ces exemples, qui sont Saints, et dignes de vénération, de vouloir s’en servir pour excuser les usages de ce Siècle corrompu, et qu’on ne peut point les alléguer pour autoriser ces pratiques séculières ; « de peur, comme dit S. Cyprien, qu’il ne semble que nous voulions justifier nos vices par les saintes Ecritures ; ce qui serait les profaner d’une manière très indigne ».