Stances à Madame Isabelle, sur l’admiration où elle a tiré la France
Esprits ravis des fleurs d’Hymette,
Qui allez admirant l’avette,
Qui nous distille un si doux▶ miel :
Ne réveillez plus le lycée
Sans travailler votre pensée,
Adorez les trésors du Ciel.
Ne vous enquérez d’Isabelle,
Si son âme divine et belle
Etait de toute éternité :
Si elle fut aussi savante,
Toute sage et toute éloquente,
Portraite en la divinité.
Ou si dans le monde suprême
Elle eut cette vertu extrême,
Qui nous l’a fait tant admirer :
Ou si le démon de science,
Et la plus haute intelligence
Lui viennent encor inspirer.
Serait une mer sans rivage,
Dans le port on ferait naufrage,
N’y abîmez plus vos esprits :
Car le bon Ange qui la guide,
Et qui sur le mien seul préside :
M’en a tous les secrets appris.
Il dit qu’après que la matière
Eut reçu sa forme première,
Et rendu l’image en effet,
Dieu fit descendre ses idées
Dans le sein des Anges guidées
Pour former cet esprit parfait.
Où pour remirer sa puissance,
Il lui donna la connaissance
Des secrets de sa déité,
Et des quatre mondes ensemble,
Et du fort lien qui assemble
Nos vœux en la fatalité.
Puis ayant cet esprit agile
Recouru le premier mobile,
Et vu l’heureux trône des Dieux
Il passe les deux Hémisphères,
Et revolant sur les neuf Sphères,
Apprit le bel ordre des Cieux.
Les Cercles, les Corps qui agissent,
Les Inférieurs qui patissent
Dessous ces mouvements divers :
L’auteur, la fin, la prescience
De tout ce qui est en essence,
Et comprit en soi l’univers.
A l’instant pour orner la terre,
Des vives beautés qu’il enserre,
Il lui voulut donner un Corps,
Vraie Image de sa figure,
[mot illisible] ce que l’œuvre de nature
Se perd en discordants accords.
Dont au lieu de quatre contraires,
Il voulut par divins mystères,
Qu’elle eut le Ciel pour Elément :
Les grâces en fussent nourrices,
Que les Muses soient ses délices,
Les vertus ses contentements.
Alors descendit cet Aurore,
Et ce grand Soleil que j’adore
Fit combler les Dieux en douleurs :
Phœbus se vêtit de ténèbres
Et les Astres en chants funèbres
S’en allaient distiller en pleurs.
Les Jumeaux s’attachent aux Pôles,
Ravis par les doctes paroles,
Orphée y vient quitter sa lyre,
Glorieux encor de lui dire,
J’ai l’heur d’être vaincu de vous.
Les signes épandus au monde,
Ne veulent plus faire leur ronde,
Diviser l’an, ni les saisons :
Le deuil leur ôte le courage :
Apollon couvert d’un nuage,
Pleure de toutes ses maisons.
Soudain Jupiter qui désire
Qu’heureux fleurisse son Empire,
Tira d’un vaisseau des destins
L’arrêt, que pour bannir la guerre,
Ce chef d’œuvre des Cieux en terre
Rendrait les Oracles certains.
Qu’elle aurait toujours la puissance
Par une céleste influence,
D’émailler de fleurs un Printemps,
D’échauffer les signes de glaces,
Par ses deux bessons, dont les grâces
Dominent mon âme en tout temps.
Ainsi de la voûte éthérée,
Jusque dans le sein de Nérée,
Pour ce grand miracle on sentait
Un ◀doux extase, une lumière,
Qui tenait l’âme prisonnière,
Des liens d’or qu’elle portait.
Ainsi cette fleur sans pareille,
Ce Parnasse, et Ciel de merveille,
Vint illuminer nos […]l
D’une flamme si pure et belle
Que les Dieux font par Isabelle,
Reluire leurs divinités.