Il faudroit alleguer des volumes entiers, pour la preuve de ceste mesme recognoissance, qui ne me semble que trop commune d’homme à homme, puis qu’elle a passé jusques aux animaux.
Mais c’est assez parlé des causes de ceste Vertu ; Il faut finir, apres avoir exhorté tous les hommes vindicatifs de ne se laisser jamais porter à leur passion contre les foibles, et de ne s’arrester point à leurs injures, non plus que les chevaux ne laissent pas de passer outre pour l’aboy des petits chiens.
Avec cela neantmoins ils ne laissent pas d’en cognoistre les infortunes, autrement leur ignorance pourroit passer pour felicité.
Que si lon m’objecter à ceste raison, qu’il n’est point de serviteur qui ne doive aymer ses chaisnes, pourveu qu’elles soient dorées ; Je responds à cela, qu’un homme libre, qui a les choses necessaires, se fait tort de se rendre esclave, pour avoir les superfluës, et concluds avec Esope ; qu’il vaut beaucoup mieux s’en passer, que les achepter à si haut prix, approuvant extrémement que le Loup retourne en sa Caverne, plustost que de s’aller faire mettre un colier chez le Laboureur.
Parle, je suis pressé, je crains qu’il ne me réclame ; car il ne peut se passer de mes conseils en rien.