Qui s’estonnera donc si Esope donne de l’avantage au Rat villageois, et luy fait porter impatiemment le temps qu’il demeura dans ceste cave, où le Rat de ville luy avoit apresté à manger ? […] Car de flotter incessamment dans le doute, d’avoir de la peine pour son Maistre, pour ses Ennemis, et pour ses amis, de ne voir point d’heure ny d’occasion où le danger ne se mesle, d’estre sujet à rendre un severe compte de son administration, de veiller, sans recompense, pour les affaires publiques, et de s’incommoder pour les querelles des particuliers ; Ces miseres où vivent les gens de la Cour, ne sont-elles pas capables d’ennuyer les plus resolus d’entr’eux, et de leur donner du tourment ?
Et alors le rat des champs, oubliant la faim, soupira et dit à l’autre : « Adieu, mon ami, tu manges à satiété et tu t’en donnes à cœur joie, mais au prix du danger et de mille craintes.
Premierement les hommes puissants et injurieux se peuvent representer qu’ils ne tiennent leur force que de Dieu, qui ne la leur donne point à dessein d’affliger les foibles, mais plustost pour leur faire du bien, et les secourir.
Ce qui donne tant de creve-cœur à ceux qui estoient naguere leurs Esgaux, qu’ils se destinent pour jamais à leur rendre de mauvais offices, et se réjouyssent de leur recheute, comme s’il leur estoit arrivé quelque faveur extraordinaire.
Une belette, ayant attrapé un coq, voulut donner une raison plausible pour le dévorer.
Ne pouvant les mener au pâturage habituel, il les soigna dedans ; mais il ne donna à ses propres chèvres qu’une poignée de fourrage, juste de quoi les empêcher de mourir de faim ; pour les étrangères, au contraire, il grossit la ration, dans le dessein de se les approprier elles aussi.
Arrivé dans un certain endroit, il entendit un petit enfant qui pleurait et une vieille femme qui lui disait : « Ne pleure plus, sinon je te donne au loup à l’instant même. » Le loup pensant que la vieille disait vrai, s’arrêta et attendit longtemps.
Nous ne voyons guere un frere divisé d’avecques son frere, qu’il ne donne occasion à leur commun ennemy de les ruyner par brigues, ou par procez.
Car, disoient-ils, comment pourroit s’exercer aux hautes et sublimes meditations un homme abruty dans l’oysiveté, qui ne s’étudie qu’à contenter les sens corporels, et ne donne rien aux operations de l’ame.
Pour la mesme raison, tant Alciat qu’Esope, ont fort judicieusement attribué ceste action au grossier animal d’Arcadie, pour nous donner à entendre qu’une faute si pesante que celle-là, ne peut provenir que d’une extrême ignorance.
Par où il vouloit donner à entendre, que c’est une chose tres-dangereuse d’estre bien avant meslé dans les intrigues d’un Prince : Ce que d’autres ont aussi exprimé par ceste sentence ; « Avec le Prince, comme avec le feu » ; Voulant dire, que pour en ressentir raisonnablement les biens-faits, il n’en faut estre, ny trop proche, ny trop loing.
C’est, à la verité, une belle chose que l’esprit, à qui l’on peut donner ceste gloire d’estre l’Image de la Divinité, le Chef-d’œuvre le plus accomply de tous, et la meilleure partie de nous-mesmes.
Que me donneras-tu pour te l’avoir annoncé le premier ? […] Le lion, en te prenant l’oreille, allait te donner ses conseils et ses instructions sur ta grande royauté, comme quelqu’un qui va mourir ; et toi, tu n’as pas supporté même une égratignure de la patte d’un malade.
Apres qu’un de ses amis luy eust conseillé de faire voile à Samos, sur l’esperance qu’il luy donna d’y tirer plus de gain de ses Esclaves, il se laissa vaincre à ses persuasions, et se mit sur mer. […] Car il n’est point d’homme qui sçache tout, et c’est, sans doute, ce qui luy a donné sujet de rire ».
De mesme je m’asseure que vous ferez quelque cas de celles de ce Philosophe, non pas pour le plaisir qu’elles peuvent donner ; mais à cause des belles leçons qu’elles font aux hommes.
Il est icy question de retirer sa parole, quand on l’a donnée par force, en quoy certes il y a plus de malheur que de peché.
De là est, à mon advis venuë la coustume que nous avons, d’appeller Gruës ceux qui se laissent affiner par les meschants, apres avoir donné leur peine et leur temps pour les obliger.
Or encore que ce blasme touche generalement les hommes, et qu’ils s’attribuënt l’honneur de toutes leurs entreprises, au lieu de le donner à Dieu, qui est la vraye source et la legitime cause de tout ce qu’il y a de bien et d’honneste dans le monde ; Encore, dis-je, qu’ils soient tachez presque tous de ceste orgueilleuse espece d’ingratitude, si est-ce qu’il y en a qui s’y portent d’une inclination particuliere, et dérobent artificieusement l’estime des autres pour se la transferer.
Et Zeus allait lui donner son suffrage pour la royauté, à cause de sa beauté ; mais les oiseaux indignés lui arrachèrent chacun la plume qui venait d’eux.
Or apres qu’il eust bien voyagé par toutes les villes de Grece, et donné de merveilleuses preuves de son sçavoir, il s’advisa de s’en aller aussi en Delphes.
Car la Nature nous a donné une juste passion pour ce qui nous touche, et un legitime desir de nostre conservation.
Car celuy là ne merite pas d’avoir part à l’heureuse fortune de ses amis, qui ne l’a voulu prendre à leur disgrace ; Autrement ce seroit recompenser de mesme sorte les meschants et les gens de bien, et donner à la trahison les mesmes avantages qu’à la probité.
et combien de mal luy a donné tout nouvellement le party des Factieux, et des Ennemis de leur Patrie !
Tout cela est passé en mesme Loy de combattre : l’on a voulu rendre toutes ces disputes également mortelles ; Et quiconque a plus fait de duels sur une mine, et sur un demy mot, c’est celuy-là qui encherit sur la vaillance, et a qui l’on donne de hautes loüanges, bien que toutesfois elles ne soient ny justes ny legitimes.
Vous couste t’il tant de luy donner une bonne nourriture ?
Je vais bâfrer et m’en donner tout mon soûl, de manière à n’avoir pas faim de tout demain. » Tandis qu’il parlait ainsi à part lui, tout en remuant la queue, comme un ami qui a confiance en son ami, le cuisinier le voyant tourner la queue de-ci, de-là, le prit par les pattes et le lança soudain par la fenêtre.
Le semblable aussi n’arriva-t’il pas en l’entreprise du Mont Athlas, à qui lon vouloit donner la forme d’un homme, en la separation de l’Isthme de Corinthe, et en celuy de la Mer Rouge ?
Je ne raporteray pas tant l’Alegorie de ceste Fable à l’envie et à la malignité du Renard, qu’à l’impertinence des autres animaux tant pource qu’aux discours precedents j’ay assez parlé contre les personnes envieuses du bien d’autruy, qu’à cause qu’il me semble veritablement qu’Esope luy fait joüer icy le personnage d’un homme sage et consideré, plustost que d’un meschant ; et qu’au contraire il represente en la sottise des autres animaux, celle que commettent fort souvent les hommes, à sçavoir de donner les grandes charges aux mal habiles.
Car, de grace, croyons-nous que le stupide et le contre-faict soit de tout poinct mal traitté de la Nature, et qu’elle ne luy ayt pas donné dequoy se satisfaire ?
Ce qui se prouve premierement, pource que comme elle-mesme ne nous a donné aucun desir, sans nous ouvrir le chemin à son effect, ainsi il n’y a point d’apparence qu’elle nous ait rendu tres-habiles en un effect, sans nous y convier par le desir, et par l’inclination.
Alors Hermès, charmé de sa probité, les lui donna toutes les trois.
Car s’il est ainsi que toy qui as un empire absolu sur mes volontez, et qui ne crains personne, ne donnes point toutesfois aucun relâche à ta nature, puis que tu pisses en marchant ; que faudra-t’il que je fasse, si tu m’envoyes à quelque affaire ?
Il est temps maintenant de faire voir comment ceste action procede de la raison, bien que toutesfois il me semble superflu de le prouver, veu la prodigieuse quantité d’exemples que nous voyons tous les jours de gents estimables et bien nez, qui donnent la vie à un ennemy abattu, ou ne le considerent pas, s’il est foible.
Au contraire, elle reproche à son ennemie, qu’elle faict mestier d’escornifler, que sa paresse la reduit à la mercy d’autruy, et à vivre, comme l’on dit, du jour à la journée, sans donner ordre à s’empescher de mourir de faim en temps d’hyver.
Pour remedier de bonne heure à toutes ces choses, proposons-nous sans cesse devant les yeux l’exemple de la mort, la fragilité de nos jours, et l’inconstance de la Fortune, qui n’a jamais si bien favorisé quelqu’un, qu’il ne luy ayt donné le change bien-tost apres.
Mais cela ne pourroit pas estre, sans qu’il y allast de la faute mesme de l’offencé, qui donneroit tel pied à une chetive et mediocre injure.