Devinant leur artifice, le boucher dit : « Vous pouvez m’échapper par un faux serment ; mais à coup sûr vous n’échapperez pas aux dieux. » Cette fable montre que l’impiété du faux serment reste la même, quelque habileté qu’on mette à la sophistiquer.
L’on peut apprendre deux choses dans la Fable des Loups et des Brebis ; la premiere, qu’il ne faut pas inconsiderément se fier à un Ennemy reconcilié ; et la seconde, qu’il ne couste rien aux meschants, de supposer un faux pretexte, pour envahir et perdre leurs Ennemis. […] Pour ce qui est de l’autre poinct, dont ceste Fable nous peut instruire, à sçavoir que les Ennemis reconciliez à faux, ne demandent qu’un pretexte pour nous attaquer, c’est une question de fait, qui a plus besoin d’exemples que de raisons.
Le vent, s’étant mis à souffler, lui enleva ses faux cheveux, et les témoins de sa mésaventure se mirent à rire aux éclats.
Il accusoit toûjours les miroirs d’estre faux, Vivant plus que content dans son erreur profonde.
Mais comme on estoit apres, le Prevost ayant invité Xanthus à soupper, tandis que ce Miserable recevoit les coups, « Malheureux que je suis », s’écrioit-il contre son Maistre, « j’ay veu deux Corneilles, et toutesfois je suis battu ; toy au contraire, n’en as veu qu’une, et cependant tu t’en vas faire bonne chere ; l’espreuve donc bien à mon dommage, que cét Augure n’est que trop faux ».
Car comme le diable, qui est leur Prince, se déguise quelquesfois en Ange de lumiere, pour seduire les hommes, il arrive tout de mesme que les meschans se couvrent d’une fausse contrition de leurs malices, et témoignent un feinct repentir, pour r’atrapper dans leurs pieges ceux qu’ils y ont une fois tenus.
Si le plus aggreable fruict de l’amitié consiste en sa durée, quelle perseverance doit-on attendre d’un faux Amy, qui change à tout coup d’opinions, et comment nous sera fidele celuy qui ne le fût jamais à personne ?
Aux soûpirs vrais ou faux celle-là s’abandonne : C’est toujours mesme note, et pareil entretien : On dit qu’on est inconsolable ; On le dit, mais il n’en est rien ; Comme on verra par cette Fable, Ou plutost par la verité.
Je vous enseigneray par là Ce que c’est qu’une fausse ou veritable gloire.
elle qui est la source des mensonges, des maledictions, et des faux sermens ?
Alexandre le Grand n’en fût-il pas un, lors qu’il suborna des Prestres Afriquains, pour se faire declarer fils de Jupiter Ammon, par les responses d’un faux Oracle ? […] Et l’Imposteur Mahomet ne fût-il point le Salmonée de Jesus-Christ, c’est à dire, le faux imitateur de ses divines et fructueuses actions ?
Car nous devons avoir en l’ame un secret souvenir du tort que nous leur avons fait, qui nous deffend de nous en servir, de peur de les aigrir davantage, et de leur remettre en memoire les déplaisirs du passé, D’ailleurs, c’est une action toute pleine d’inconstance, et de fausse conduite, et cela s’appelle proprement traicter en amis ceux à qui nous avons donné sujet de ne le plus estre, puis que, selon Senecque, celuy-là oblige le plus, qui donne aussi le plus de moyen à l’autre de l’obliger.
C’est là qu’ils aspirent seulement, comme à leur future patrie, se développant avec allegresse des fausses voluptez de la terre, où il n’y a que du dégoust, et de la revolution.
Ce qu’Esope dit icy du Medecin, nous le pouvons appliquer à un faux Amy.
Ce faux bien que vous recherchez n’est-il pas aussi mal-aisé en son acquisition, qu’il est court en sa durée ? […] Le débordement d’un Ruisseau vous peut oster vos heritages : les procez et les faux témoins sont capables de vous appauvrir. […] Venons maintenant au faux espoir de sa durée, ne la perd-on jamais en sa vie ?
Ne point mentir, estre content du sien, C’est le plus seur : cependant on s’occupe A dire faux pour attraper du bien : Que sert cela ?
Il y a certaines personnes aussi, qui par je ne sçay quelle stupidité, ne reçoivent pas un bon conseil ; D’autres, par une fausse impression qu’ils ont conçeuë contre leurs amis, les tenans suspects d’envie, ou de malignité, et par consequent jugeant tous leurs advis reprochables.
Aussi est-ce devant elle que les Puissants sont foibles, et mal armez, que les Malings ne produisent aucuns faux tesmoins : que les Nobles n’alleguent point d’alliance, que les Innocents ne craignent plus d’oppression, que les Vertueux pretendent des recompenses, et devant qui finallement la difference des hommes ne se fait que par les Vertus, ou par les Vices qu’ils ont acquis.
Combien d’ames, que leur probité rend trop credules, se laissent piper aux persuasions d’autruy, et n’employent leur peine ou leur pouvoir, qu’à l’avantage de leurs faux amis ?
J’ay doncques esté bien fol d’avoir fait tant d’ennemis, et l’ay encore esté d’avantage de m’estre fié à de faux amis ».
Car soit que nous soyons coûpables, ou qu’ils ayent conçeu quelque fausse opinion de nous, tant y a qu’ils se plaisent quelquesfois à destruire leur propre ouvrage.
Le seul Hypocrite, qui cache la malice et l’impieté sous le voile d’une fausse devotion, est capable de tenir les personnes plus long temps abusées, à cause que l’exercice de la Vertu n’est pas sujet à la censure des hommes, mais à celle de Dieu : Son espreuve se fait au Ciel, et non pas en terre.
C’est donner trop de prise à une vanité, que de joüer un faux personnage pour elle : C’est tout ce que les Vertueux feroient pour la possession d’un bien plus solide, et plus convenable à leur humeur.
Car les hommes d’aujourd’huy sont d’un naturel si dépravé, qu’ils se portent plus volontiers à la convoitise d’un bien faux, s’il est de difficile conqueste, qu’au desir d’un veritable, qui ne leur devra guere couster.
Laissons-les donc joüyr à leur aise de la fausse gloire qu’ils pensent avoir acquise, et detestant en nostre ame, non seulement ceste vaine et trompeuse apparence de valeur, mais encore toutes disputes et contentions, retournons, comme de coustume, moraliser avec nostre Esope.
Celle-cy ayant fait promesse au Cerf, en la presence du Loup, de luy payer un muy de froment, fut obligée de s’en desdire, à cause de sa pauvreté, et de rejetter sur la contraincte la fausse confession qu’elle avoit fait de la debte.
Apres avoir violé les loix qui obligent la creature au Createur, apres avoir franchy toutes les regles de la nature et de la Religion, est-il à croire que tels ingrats observent les loix d’une simple amitié, et encore vaine et fausse, puis que selon le dire d’Aristote, il n’en est point de vraye, que celle dont la Vertu est le fondement ?
Rien autre, certes, que ce que nous represente la Fable à sçavoir un becquetement general des vrays Paons contre le faux ; une risée honteuse, une fuitte pleine de desespoir.
Cette Histoire est la veritable Allegorie de cette Fable, puis que par une experience asseurée, elle prouve que c’est oster entierement le credit à ses paroles, que d’en donner souvent de fausses.
Que si l’on me dit que c’est ruyner une veritable amitié, à cela je respondray, que les vrayes amitiez, comme dit Aristote, estant fondées sur l’opinion de la Vertu, l’on n’en sçauroit faire de veritable avec un Vicieux, et par consequent on n’en aura terminé qu’une fausse, qui n’est pas une action meschante ny malheureuse, mais plustost judicieuse et raisonnable.
Aussi voyons-nous d’ordinaire que telle espece de gens est extrémement noircie en son estime, non seulement par de veritables remarques, mais par de fausses aussi : Car la colere de ceux qu’ils ont offensez les oblige quelquesfois à controuver mesme des calomnies pour se vanger.
Les Tyrans toutesfois ne sont autre chose que les rusés, qui preferent l’artifice à la bonne foy, et ne font aucune conscience de manquer de parole, pourveu qu’ils y trouvent une fausse apparence de seureté.
Mais quant aux desseins des hypocrites, qui sous un pretexte de probité n’aspirent qu’à la richesse et à l’interest, nous ne devons point douter que Dieu ne se mocque de leur fausse apparence, et qu’il ne prenne soin de les chastier, au lieu de répandre sur eux ses benedictions.
Le Corbeau ayant trouvé quelque proye, s’en resjouyssoit, et faisoit un merveilleux bruict sur un arbre, lors que le Renard, qui luy vit faire toutes ces mines, estant accouru à luy ; « Bien te soit, dit-il, Monsieur le Corbeau : J’ay souvent ouy dire d’estranges choses de toy, mais à ce que je vois maintenant, elles sont bien fausses.
Ne voyons-nous pas tous les jours quantité de gents, qui pour s’enrichir du jeu, apostent de faux dez, font des tromperies aux cartes, mentent, blasphement, et corrompent les assistans ? Ne voyons-nous pas beaucoup d’avares litigieux, qui suscitent à leurs Voisins des procez injustes, pour se faire adjuger leurs heritages, se servant pour cela de faux témoins, et de preuves illegitimes ? N’y en a-t’il pas encore qui deguisent impunément la monnoye Royale, et impriment au faux or la marque de leur Souverain ?