Le Renard, le Singe, et les Animaux. Les Animaux, au deceds d’un Lion, En son vivant Prince de la contrée, Pour faire un Roy s’assemblerent, dit-on. […] Aux animaux cela sembla si beau, Qu’il fut élû : chacun luy fit hommage.
Dans un profond ennuy ce Lievre se plongeoit : Cet animal est triste, et la crainte le ronge. […] Le melancolique animal En rêvant à cette matiere, Entend un leger bruit : ce luy fut un signal Pour s’enfuïr devers sa taniere. […] Comment des animaux qui tremblent devant moy !
L’on objecte l’exemple de quelques Animaux particuliers, qui ont des cognoissances beaucoup plus grandes que n’est leur nature : Entre lesquels l’Elephant, le Singe, et le Chien, sont estimez les plus raisonnables ; comme pareillement parmy les Individus de ces Animaux, l’on en compte quelques-uns plus merveilleux que les autres. […] Ne semble-t’il pas que cét Animal usoit de raisonnement en ceste action, et qu’il avoit quelque chose par dessus l’ordinaire des bestes brutes ? […] Il est donc bien de dire ; l’homme est un Animal, puis que l’estre Animal le specifie d’avec l’estre commun, et le met hors du pair des choses qui ne sont point vivantes. Or n’est-ce pas assez pour définir l’homme, de dire qu’il est un Animal ; autrement nous pourrions inferer, qu’il est un Chien, un Cerf, ou un Leopard. […] Ce qu’il leur pût aussi tost dire, ou par art Magique, ou par quelque subtil advis qu’il en eust luy-mesme, que par le discours des animaux.
Un animal cornu blessa de quelques coups Le Lion, qui plein de couroux, Pour ne plus tomber en la peine, Bannit des lieux de son domaine Toute beste portant des cornes à son front. […] On les fera passer pour cornes, Dit l’animal craintif, et cornes de Licornes.
UN Mulo già, che d’abondante biada Ben pasciuto era, e si godeva lieto Tutto, e lascivo un dolce ocio giocondo, Entrò folle in pensier tanto superbo, Che tra sé disse : Or qual di me più forte Vive animal in terra ? […] Allhora in tale stato gli sovvenne Anchor d’esser de l’Asina figliuolo, Poltro animale, e di tardezza pieno.
Le Lion abattu de chaleur, et de lassitude, se reposoit à l’ombre, et sur la verdure, lors que voila survenir une trouppe de Rats qui se voulurent joüer sur sa croupe, mais luy s’estant esveillé, en saisit un de sa patte, qui se voyant pris, se mit à luy demander pardon, se disant indigne de la colere d’un si genereux animal. […] Il faudroit alleguer des volumes entiers, pour la preuve de ceste mesme recognoissance, qui ne me semble que trop commune d’homme à homme, puis qu’elle a passé jusques aux animaux. […] Voila un exemple de la recognoissance des animaux, qui toutesfois ne la tesmoigne pas si bien que la memorable Histoire d’Androde. […] Mais il n’y eust celuy de l’Assemblée qui ne fût saisi d’un soudain estonnement, de voir l’action de ce genereux animal, qui au lieu d’esgorger l’Esclave, comme il en avoit démembré desja beaucoup d’autres, se prosterna tout à coup à ses pieds, baissant la teste, et luy applaudissant de la queuë. […] Mais c’est assez prouvé par des exemples, que la recognoissance des biens-faits est commune mesme aux animaux.
Sur l’animal beslant, à ces mots, il s’abat. […] Elle empestra si bien les serres du Corbeau, Que le pauvre animal ne put faire retraite ; Le Berger vient, le prend, l’encage bien et beau ; Le donne à ses enfans pour servir d’amusette.
PUR dianzi havea ’l Leon de gli animali Tutti per forza conquistato il Regno, E come Re de gli altri un bando fece Gridar, ch’ogni animal, che senza coda Fusse dal suo tener gisse lontano, E in esiglio da lui lontan vivesse Essendo privo de l’honor, che seco Porta la coda, che vergogna asconde. […] Così ne mostra l’animale astuto, Che chi sotto il Tiran sua vita mena È in gran periglio di sentir la pena Del fallo anchor, che non ha in mente havuto.
On dit que les animaux furent façonnés d’abord, et que Dieu leur accorda, à l’un la force, à l’autre la vitesse, à l’autre des ailes ; mais que l’homme resta nu et dit : « Moi seul, tu m’as laissé sans faveur. » Zeus répondit : « Tu ne prends pas garde au présent que je t’ai fait, et pourtant tu as obtenu le plus grand ; car tu as reçu la raison, puissante chez les dieux et chez les hommes, plus puissante que les puissants, plus rapide que les plus rapides. » Et alors reconnaissant le présent de Dieu, l’homme s’en alla, adorant et rendant grâce. Tous les hommes ont été favorisés de Dieu qui leur a donné la raison ; mais certains sont insensibles à une telle faveur et préfèrent envier les animaux privés de sentiment et de raison.
Zeus, célébrant ses noces, régalait tous les animaux. […] Intrigué de son absence, il la questionna le lendemain : « Pourquoi, seule des animaux, n’es-tu pas venue à mon festin ?
A tous ces termes de compliment, le Renard ne fit point d’autre response, sinon qu’il luy souhaittoit un recouvrement de santé, et que pour cét effet il prieroit les Dieux immortels ; Mais que pour le demeurant, il luy-estoit impossible de l’aller trouver, pource, disoit-il, que je ne puis voir qu’à regret les traces des animaux qui t’ont visité ; Car il ne s’y en remarque pas une qui soit tournée en arriere, et qui ne regarde ta caverne. […] Cet animal, qui est tous-jours travaillé de la fiévre, ne la peut surmonter aujourd’huy. […] Le superbe Roy des animaux trouve mauvais qu’il ne le vienne point voir, et le convie à cela fort courtoisement ; mais luy s’excuse fort à propos sur la trace des autres bestes, nous enseignant à tenir tous-jours en haleine nostre conjecture, en matiere d’occasions suspectes de tromperie.
Il lui proposa une alliance. « Il nous sied tout à fait, dit-il, d’être amis et alliés, puisque toi, tu es le roi des animaux marins, et moi, des animaux terrestres. » Le dauphin acquiesça volontiers.
Le Roy des animaux en cette occasion Montra ce qu’il estoit, et luy donna la vie. […] L’autre exemple est tiré d’animaux plus petits.
DA capo a un fiumicel beveva il Lupo, E l’Agnello da lui poco lontano Vide inchinato far simil effetto : E come quel, che di natura è rio, Né havea cagion, e pur volea trovarla Di venir seco a lite, e fargli offesa, Cominciò tosto con parlar altero Dirgli, che mal faceva, e da insolente A turbar l’acque col suo bere a lui, Ch’era persona di gran pregio e stima, Esso vil animal di vita indegno. […] E volendo di ciò far nova scusa L’innocente animal con dir più basso, Ma con ragioni più possenti e salde, Il Lupo iniquo, che già in sé confuso Era rimaso, adosso al miser corse ; E divorollo con disdegno e rabbia.
Le Lion, et la Brebis, avec quelques autres animaux, estant demeurez d’accord d’aller à la chasse ensemble, et de posseder en commun tout ce qui en proviendroit, il arriva qu’ils prirent un Cerf. […] Ce partage que fait le Lion aux animaux, ses inferieurs, de la venaison qu’ils ont prise ensemble, represente les injustes avantages que les riches prennent sur les pauvres, qu’ils ont accoûtumé de tromper, en retenant leurs salaires ; de s’attribuër des honneurs immoderez, de rehausser l’excellence de leur protection, de rendre leur conduitte necessaire à l’appuy des affligez, et par toutes ces raisons usurper injustement ce que la nature, ou le hazard leur fait escheoir.
Les Oyseaux, et les animaux terrestres avoient ensemble une fort cruelle guerre, où l’esperance, la crainte, et le danger, balançoient des deux costez. […] Car il ne feint point que l’Aigle, victorieuse des animaux terrestres, se soit employée à tirer une sanglante vengeance de l’infidelle Chauve-souris, comme voulant dire qu’une ame noble et genereuse, ou ne se vange point, ou ne se vange qu’avecque peril. […] Voylà donc ce perfide animal puny selon son démerite, et chassé non seulement de la compagnie des Oyseaux, mais encore de celle des animaux terrestres.
Abstemius 165 De hydro ranam devorare volente HYdrus in quadam palude Ranam persequebatur, quem quom illa euadere non posset, conuersa dicebat. « Ne me deuora hydre, quæ nulli umquam nocui. » Cui hydrus, « Clamor tuus inquit, minæque, quibus die noctuque obstrepis, te maleficum animal esse testantur.
Cui rusticus « Ignoscerem inquit tibi perlibenter et te incolumem dimitterem, nisi te subdolum et fidifragum animal esse cognoscerem.
Abstemius 93 De leone porcvm sibi socivm eligente LEo quom socios asciscere sibi uellet, multaque animalia sese illi adiungere optarent, idque precibus et uotis exposcerent cæteris spretisf cum porco solum societatem uoluit inire, rogatus autem causam respondit. « Quia hoc animal adeo fidum est, ut amicos et socios suos in nullo quantumuis magno discrimine unquam relinquat. » Hæc fabula docet eorum amicitiam appetendam, qui aduersitatis tempore a præstando auxilio non referunt pedem.
Abstemius 141 De lvpo in fossam lapso et vvlpe irridente LVpum in fossam lupariam delapsum Vulpes conspicata irridebat, et circum oras et fossæ marginem lætabunda saltitabat, stolidum animal illum appellans, qui honinum fraudes non animaduertisset.
Il caminar a piedi era lor grato, Né ’l debole animal di peso alcuno, Perch’ei non si stancasse, havean gravato. […] Mentre sì carco l’animal galloppa Ecco il primo, che ’l vede, a gran pietade Mosso di lui, che in ogni sasso intoppa. […] E sendo sopra un ponte in quel momento Qual disperato il mal nato animale Gettò nel fiume per minor tormento.
Abstemius 34 De testvdine et ranis TEstudo conspicata ranas, quæ in eodem stagno pascebantur, adeo leues agilesque, ut facile quolibet prosilirent et longissime saltarent, naturam accusabat quod se tardum animal et maximo impeditum onere procreasset, ut neque facile se mouere posset et magna assidue mole premeretur.
De la peau du Lion l’Asne s’étant vestu, Estoit craint par tout à la ronde ; Et bien qu’animal sans vertu, Il faisoit trembler tout le monde.
Oblitus damnorum Rusticus cucurrit, et murem corripiens illum in medium iecit incendium dicens. « Ingratum animal tempore felicitatis mecum habitasti ; nunc quia fortuna mutata est, uillam meam deseruisti. » Fabula indicat eos non esse ueros amicos, qui arridente fortuna a latere tuo non discedunt, turbata autem præcipiti abeunt cursu.
Tunc unus ex eis « Hoc animal inquit benignum admodum et mite uidetur.
Tunc dominus implacabilis multis eum uerberibus surgere compellebat, pigrum animal et ignauum nuncupans.
Dum ita contenderent, accidit, ut simius illac transiret, qui iudex et arbiter electus, « Non possum inquit inter uos tantas componere lites, nisi uidero prius quo pacto serpens sub saxo stabat. » Quom ergo uir serpenti saxum imposuisset inquit Simius « Ingratum animal sub saxo relinquendum censeo. » Fabula indicat ingratos homines nullo dignos esse beneficio.
At illa eum, ut pusillum, et terrestre animal, et ad sibi nocendum impotens arbitrata eos in conspectu matris unguibus dilacerare, et pullis suis epulandos apponere non dubitauit.
Je vous payray, luy dit-elle, Avant l’Oust, foy d’animal, Interest et principal.