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2. (1660) Les Fables d’Esope Phrygien « LES FABLES D’ESOPE PHRYGIEN. — FABLE V. Du Chien, et de l’Ombre. »

Il fût bien fasché d’abord, de ce que l’ayant perduë, il avoit aussi perdu son esperance. […] Pour le regard des Amants, c’est presque l’ordinaire de voir, que n’estant pas rassasiez de la possession d’une femme legitime, ou de la conqueste d’une belle Maistresse, ils se jettent inconsiderément dans de nouvelles amours, où la cognoissance qu’on a de leur legereté, empesche le succés de leur dessein, et ne leur laissant attrapper que l’ombre, les rend semblables au Chien d’Esope, en leur faisant perdre le vray morceau de chair qu’ils avoient en leur possession. Quant à ce qui est des Ambitieux, je ne voy point de plus frequent exemple que celuy-là, qui est de perdre une gloire bien acquise, par la precipitation d’en gaigner une nouvelle. […] Je laisse à part les Histoires de Pyrrhus, du mesme Annibal, de Turne chez Virgile, d’Hector et d’Achille chez Homere ; et finallement de la pluspart des vaillants hommes du monde, qui ont bien souvent perdu la vie et l’honneur par un ambitieux desir de gloire, dont ils estoient travaillez. Venons maintenant à reprendre encore une fois l’interest general des humains, et à leur remontrer, s’il est possible, comment ils perdent les biens eternels et solides, pour suivre une ombre de felicité.

3. (1300) Fables anonymes grecques attribuées à Ésope (Ier-XIVe s.) « Chambry 137 » pp. 396-396

Mais il eut beau répéter ses essais : il ne réussit pas à prendre exactement la voix du cheval et il perdit en outre sa propre voix. […] Les gens vulgaires et jaloux envient les qualités contraires à leur nature et perdent celles qui y sont conformes.

4. (1300) Fables anonymes grecques attribuées à Ésope (Ier-XIVe s.) « Chambry 230 » p. 234

Quand le berger revint et vit son troupeau perdu, il s’écria : « C’est bien fait pour moi ; pourquoi confiais-je des moutons à un loup ? » Il en est de même chez les hommes : quand on confie un dépôt à des gens cupides, il est naturel qu’on le perde.

5. (1300) Fables anonymes grecques attribuées à Ésope (Ier-XIVe s.) « Chambry 348 » pp. 227-227

Une autre hirondelle, pour la consoler, lui dit qu’elle n’était pas la seule qui eût le malheur de perdre ses petits. « Ah ! répondit-elle, je me désole moins d’avoir perdu mes enfants que parce que je suis victime d’un crime en un lieu où les victimes de la violence trouvent assistance. » Cette fable montre que souvent les malheurs sont plus pénibles à supporter, quand ils viennent de ceux dont on les attendait le moins.

6. (1180) Fables « Marie de France, n° 82. La vipère et le champ » p. 93

» Autresi est des veisïez : quant il se sont acumpainez, entre eus se veulent si guaiter, tant se quident susveizïer, que li uns par l’autre ne perde në autres fors eus n’i aerde, dunt entre eux ne seient encumbrez li uns par l’autre ne blamez.

7. (1692) Fables choisies, mises en vers « Livre cinquiéme. — XIII. La Poule aux œufs d’or. » p. 87

L’Avarice perd tout en voulant tout gagner.

8. (1692) Fables choisies, mises en vers « Livre quatriéme. — XVIII. Le Vieillard et ses enfans. » p. 53

Tous perdirent leur temps, le faisceau resista ; De ces dards joints ensemble un seul ne s’éclata. […] Tous perdirent leur bien ; et voulurent trop tard Profiter de ces dards unis et pris à part.

9. (1692) Fables choisies, mises en vers « Livre troisiéme. — IX. Le Loup et la Cicogne. » p. 156

Un Loup donc estant de frairie,
 Se pressa, dit-on, tellement,
 Qu’il en pensa perdre la vie.


10. (1180) Fables « Marie de France, n° 5. Le chien et le fromage » p. 133

Ileoc fu il trop cuveitus : en l’ewe saut, la buche overi, e li furmages li cheï ; e umbre vit, e umbre fu, e sun furmage aveit perdu.

11. (1570) Cento favole morali « CENTO FAVOLE MORALI. raccolte, et trattate in varie maniere di versi da m. gio. mario verdizoti. — [6.]. DELLA CORNACCHIA, E LA RONDINE. » p. 229

Quel bene adunque, che si gode eterno,     Al momentaneo preferir si deve :     Perch’a noi sembrar suol del tutto esterno Quel, che si perde allhor, che si riceve.

12. (1692) Fables choisies, mises en vers « Livre premier. — XIV. Simonide préservé par les Dieux. » p. 522

Peut-estre qu’il eut peur 
De perdre, outre son dû, le gré de sa loüange.
 […] Il sort de table, et la cohorte
 N’en perd pas un seul coup de dent.


13. (1660) Les Fables d’Esope Phrygien « LES FABLES D’ESOPE PHRYGIEN. — FABLE LXXVIII. Du Berger, et du Loup . »

A force de mentir ce petit Berger se rend indigne de foy, quand il crie tout de bon, et comme cela il perd une de ses brebis ; ordinaire advanture de ceux qui mentent, ausquels on n’ajouste point de creance, encore qu’ils disent vray. […] Mais à mesme temps qu’il devoit perdre la vie, le bon-heur voulut pour luy qu’il vint un bruit sur la place, qui justifia son cacquet, et destourna par mesme moyen et ses bourreaux et ses spectateurs. […] En quoy, il me semble que pour un vain plaisir de mentir, l’on perd une chose bien precieuse, à sçavoir la Foy ; Action certes d’un tres-mauvais mesnager, et d’un imprudent, puis-qu’il n’y a rien de si commode en tout le commerce de la vie, que de passer pour veritable, autant pour servir ses amis, que pour son interest propre.

14. (1300) Fables anonymes grecques attribuées à Ésope (Ier-XIVe s.) « Chambry 254 » pp. 173-173

Un homme qui coupait du bois au bord d’une rivière avait perdu sa cognée. […] Hermès, ayant appris la cause de sa tristesse, le prit en pitié ; il plongea dans la rivière, en rapporta une cognée d’or et lui demanda si c’était celle qu’il avait perdue. […] L’homme affirma que c’était bien celle-là qu’il avait perdue. […] Alors Hermès lui apparut à lui aussi, et apprenant le sujet de ses pleurs, il plongea et lui rapporta aussi une cognée d’or, et lui demanda si c’était celle qu’il avait perdue.

15. (1300) Fables anonymes grecques attribuées à Ésope (Ier-XIVe s.) « Chambry 158 » p. 86

pour le plaisir de manger, je me prive de la vie. » La fable s’adresse au débauché qui se perd par le plaisir.

16. (1300) Fables anonymes grecques attribuées à Ésope (Ier-XIVe s.) « Chambry 177 » p. 135

Ainsi certains hommes se soumettent, dans l’espérance d’un profit, à des travaux dangereux, et se perdent avant d’atteindre l’objet de leurs désirs.

17. (1660) Les Fables d’Esope Phrygien « LES FABLES D’ESOPE PHRYGIEN. — FABLE CII. De l’Enfant, et du Larron. »

Mais comme il eust bien foüillé, voyant qu’il avoit perdu son temps, il remonta en haut, où il ne trouva ny sa robe, ny l’Enfant, qui l’avoit subtilement emportée. […] Mais supposons que vous soyez hors d’espoir de vous reduire à la Vertu, et que ce soit une chose perduë que vostre ame, encore n’estes-vous pas si meschants que de vouloir perdre vostre fils avecque vous ? […] Mais pendant que je m’égare à vous tancer, je ne m’apperçois pas, que je perds de veuë ce petit garçon, et qu’il est des-jà trop esloigné, pour ouyr les remonstrances que je luy voulois faire à son tour, pour graver en son ame le service de Dieu, et la crainte de ses Jugements.

18. (1660) Les Fables d’Esope Phrygien « LES FABLES D’ESOPE PHRYGIEN. — FABLE CVIII. D’un Oye, et de son Maistre. »

Vue Oye pondoit tous les jours un œuf d’or à son Maistre, qui neantmoins fût si fol, que pour s’enrichir tout à la fois, il la mit à mort, sur la creance qu’il eust qu’elle avoit apparemment dans le corps une grande quantité de ce metail ; Mais le Malheureux fût bien estonné de n’y trouver rien, et s’abondonna soudainement aux regrets et aux souspirs, se plaignant d’avoir perdu son bien, et son esperance. […] Il en arrive de mesme aux Nageurs, entre lesquels, ceux qui vont tout à leur aise sont presque tous-jours asseurez de se sauver du danger, au lieu que ces autres, qui precipitent leurs mouvements plus que de raison, n’ont pas assez de force pour aller jusques au bout de l’endroict perilleux, et ne recouvrent point en l’avancement de leur route ce qu’ils perdent en la durée de leur vigueur. […] Dequoy sont témoins à leur dommage ceux de nostre nation, qui par les merveilles de leur Valeur, que leurs ennemis redoutent comme la foudre, ayant conquis à diverses fois tant de superbes Provinces, chassé tant de Mécréans, et fait tributaires tant de Royaumes, n’ont pas laissé de les perdre ; au lieu que les Espagnols, à qui les Mariages ont plus servy que les batailles, se vantent, comme c’est leur coustume, de posseder aujourd’huy les plus belles parties de l’Europe, sans mettre en compte la domination du nouveau monde.

19. (1180) Fables « Marie de France, n° 67. Le corbeau qui trouve des plumes de paon » p. 576

Ceo peot [hoem] veer de plusurs ki aver unt e granz honurs : uncore vodreient plus cuillir ceo qu’il ne poënt retenir ; ceo qu’il coveitent n’unt il mie, e le lur perdent par folie.

20. (1692) Fables choisies, mises en vers « Livre cinquiéme. — FABLE I. Le Buscheron et Mercure. » p. 173

Un Bûcheron perdit son gagne-pain ; C’est sa coignée ; et la cherchant en vain, Ce fut pitié là-dessus de l’entendre. […] Et Boquillons de perdre leur outil, Et de crier pour se le faire rendre.

21. (1300) Fables anonymes grecques attribuées à Ésope (Ier-XIVe s.) « Chambry 256 » p. 236

Des gens, qui voyageaient pour certaine affaire, rencontrèrent un corbeau qui avait perdu un œil.

22. (1692) Fables choisies, mises en vers « Livre cinquiéme. — V. Le Renard ayant la queuë coupée. » p. 17

Pretendre oster la queuë eust esté temps perdu ; La mode en fut continuée.

23. (1692) Fables choisies, mises en vers « Livre sixiéme. — IX. Le Cerf se voyant dans l’eau » p. 74

Le Cerf se voyant dans l’eau Dans le crystal d’une fontaine Un Cerf se mirant autrefois, Loüoit la beauté de son bois, Et ne pouvoit qu’avecque peine Souffrir ses jambes de fuseaux, Dont il voyoit l’objet se perdre dans les eaux.

24. (1180) Fables « Marie de France, n° 28. Le singe et le renard » p. 533

Ja de ma cüe quë est granz në aleverez voz enfanz n’en autre regnéd n’entre gent — jeo vus di bien apertement –, mes que ele fust de tel afaire que je ne la puisse a mei traire. » Ceste essample pur ceo vus di : de l’aveir humme est autresi ; si il ad plus ke li n’estut, ne volte suffrir (kar il ne peot) qu’altre en ait eise ne honur ; meuz le volt perdre de jur en jur.

25. (1180) Fables « Marie de France, n° 17. L’hirondelle et le semeur de lin » p. 39

En sa meisun suffri sun ni, la furent si oisel nurri ; ele duna a sun lin peis, ja par nul de eus nul perdra meis.

26. (1300) Fables anonymes grecques attribuées à Ésope (Ier-XIVe s.) « Chambry 351 » pp. 377-377

La corneille repartit : « Que serait-ce, si tu avais ta langue, alors que l’ayant perdue, tu fais tant de commérages ! 

27. (1692) Fables choisies, mises en vers « Livre premier. — XVII. L’Homme entre deux âges, et ses deux Maistresses. » p. 31

Je vous rends, leur dit-il, mille graces, les Belles,
 Qui m’avez si bien tondu ;
 J’ai plus gagné que perdu :
 Car d’Hymen, point de nouvelles.

28. (1180) Fables « Marie de France, n° 13. Le corbeau et le renard » p. 124

Fust teus ses chanz cum est ses cors, il vaudreit meuz que nul fin ors. » Li corps se oï si bien loër quë en tut le mund n’ot sun per, purpensé s’est qu’il chantera, ja pur chanter los ne perdra : le bec overi, si chanta e li furmages li eschapa ; a la tere l’estut cheïr e li gupil le vet seisir.

29. (1180) Fables « Marie de France, n° 20. Le voleur et le chien » p. 403

Trahi avereie mun seignur que m’ad nurri desque a cest jur ; malement avereit enpleié qu’il m’ad nurri e afeité, si par ma garde aveit perdu ceo dunt il m’ad lung ten peü.

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