La principale raison que je puis alleguer de cela, c’est que ces derniers ont plusieurs consolateurs, qui par leurs fortes persuasions, leur aydent à surmonter l’ennuy qui les attaque, et les divertissent le mieux qu’ils peuvent ; Comme au contraire ces courages audacieux qui sont en un estat de prosperité, attirent sur eux de tous costez le peril, l’Envie, et la hayne, à cause qu’ils n’ont personne qui reprime leur humeur altiere, et qu’il les fasse souvenir de leur condition. […] Cela nous apprend à souffrir patiemment nos afflictions par l’espoir d’une future prosperité ; et à n’estre si altiers par la jouyssance des biens presents, que de n’apprehender pas les maux à venir : C’est à quoy nous convie le sage Esope, par l’exemple de ce Cheval temeraire et presomptueux, qui dés le lendemain de son triomphe, fût attaché à la charruë, et assujetty aux risées de l’Asne, qu’il avoit si fort mesprisé le jour precedent.
Veut-il que les livres parlent de luy, tout de mesme que d’un homme bien fort passionné, et comme disoit Monsieur de Malherbe ; Qu’ils content aux races futures Les ridicules avantures D’un Amoureux en cheveux gris ? […] Je veux dire par là, que puis-qu’il est vray que tant d’excellens hommes ont fait l’Amour sur le declin de leur âge, et que cette dangereuse passion les a perdus à la fin, il faut inferer de necessité qu’elle est estrangement violente, et juger comme cela pour nostre regard ; Que si des gents si habiles en ont senti les atteintes à leur dommage, à plus forte raison nous en devons-nous deffendre, veu les ruines qu’elle pourroit faire à nostre esprit. […] Il leur est donc fort difficile de se bien porter en les faisant, et mesme impossible de vivre long-temps.
C’est pour cela mesme que les Seigneurs gourmandent souvent les petits sujets ; que les forts et vigoureux soldats volent en chemin une foible femme, et que les chicaneurs fins et bien apparentez dressent toûjours quelques pieges et quelques aguets aux biens de la vefve et de l’orfelin.
C’est ainsi que parmy les nouveaux Docteurs il s’en trouve plusieurs qui se targuent à tort d’un bonnet et d’une robbe dans une chaire, et renforcent inutilement le ton de leur voix, pour paroistre plus éloquens devant ceux qui les écoutent ; Mais s’il n’y a quelque chose en eux plus considerable que leur belle monstre, et si le sçavoir ne respond à l’apparence, les pauvres gens s’abusent bien fort : quelques sçavans qu’ils se fassent, il est aisé de connoistre qu’il y a du vuide dans leur teste, où des oreilles d’Asne paroissent visiblement.
C’est pareillement une qualité fort souhaittable que la Force, lors qu’elle se trouve joincte à l’addresse ; puis que par elle nous venons glorieusement à bout des plus hautes entreprises, où la Valeur et le Courage nous portent.
Comme elle le priait de la relâcher, disant que, loin de nuire aux hommes, elle leur était même fort utile, car elle prenait et mangeait les serpents et autres reptiles, l’oiseleur répondit : « Si vraiment tu n’es pas méchante, tu mérites en tout cas un châtiment pour t’être posés parmi les méchants. » Nous aussi nous devons fuir la société des méchants, afin qu’on ne nous prenne pas nous-mêmes pour les complices de leur méchanceté.
Le Loup venoit de manger une Brebis, dont quelques os luy étoient demeurez dans la gueule, ce qui l’incommodoit fort.
Le Geay s’estant vestu des plumes du Paon, devint tout à coup si fort amoureux de sa gentillesse, et de sa beauté, qu’ennuyé de sa premiere condition, il s’alla mesler avecque les autres Paons, qui recognoissant sa fourbe, le desnuërent de ses plumes empruntées, et le battirent tres-bien.
Ce que fist fort adroitement le Cheval de nostre Autheur, quand il rencontra son salut dans la propre ruse de nostre Ennemy, qui fut une chose tellement juste et adroicte, que le Lion mesme ne trouva point d’occasion de l’en blasmer, et ne se plaignit que de soy-mesme en son inconvenient.
Aussi est-ce pour cela que toutes les Loix la punissent rigoureusement, quand mesme elle ne cousteroit qu’une perte fort legere au Seigneur de la maison.
Quelque forte qu’en soit la liaison, elle s’affoiblit souvent par les moindres Ennemis, quand ils s’unissent en nombre.
L’Asne, qui goustoit fort l’autre façon d’aller Se plaint en son patois.
Que si quelques uns le font, comme les Religieux et les vrays Devots, l’on peut dire asseurément que le nombre en est fort petit, à comparaison de l’étrange multitude des Aveuglez, et des mauvais Marchands. […] Il y en a de beaux et de bien policez, que le Soleil voit tous les jours, dont nous ignorons possible le nom ; à plus forte raison donques ignorons nous les hommes particuliers.
Les Oyseaux, et les animaux terrestres avoient ensemble une fort cruelle guerre, où l’esperance, la crainte, et le danger, balançoient des deux costez.
Au reste, les Sages ne sont pas tous-jours d’humeur d’acquerir des biens perissables ; leur ordinaire est de les mespriser bien fort, et se tenir au dessus de ceste basse occupation.
Ce qui est tellement vray dans les actions moralles, qu’il passe aussi jusques dans les Physiques : tesmoin ce fameux axiome des Philosophes naturels, « Que toute vertu est plus forte quand elle est unie », que lors qu’elle est dispersée.
C’est pour cela que les jeunes gens pour estre plus brusques que les Vieillards, sont aussi plus sujets à faillir ; à raison dequoy ils s’imaginent bien les moyens d’arriver à leur but, mais ils ne s’en proposent pas les obstacles, comme le remarque fort judicieusement dans ses Ethiques le Prince des Philosophes.
Il a possible ouy dire qu’un Philosophe avoit entrepris d’enseigner à un animal de son espece la dance Pyrrhyque, dans le terme de dix ans, et qu’à dessein il s’estoit obligé envers un Empereur ; ou possible a-t’il appris que en Egypte, selon le dire de Cardan en ses subtilitez, par une certaine invention l’on apprend aux Asnes à trepigner à la cadance de quelque instrument, et reüssir de fort bonne grace à plaire à tous les spectateurs.
Androde ayant apperçeu que la cause en procedoit d’une longue espine, que le pauvre Lion avoit dans la patte ; la luy tira fort adroittement, et fist suppurer l’apostume qui s’y estoit amassée.
Ce que témoigne fort à propos l’imitateur du grand de Montagne, qui ne forme son Sage que sur ce modelle, et ne luy fait point de present plus specieux que le miroir de soy-mesme.
Il faut attendre la fin avant qu’en juger ; Car elle nous monstre bien souvent que ces mesmes richesses qu’ils ont acquises injustement, et si fort aymées, les font hayr d’un chacun, et les immolent quelquesfois à la vengeance publique.
Une si douce vie agréoit si fort aux plus grands personnages de l’Antiquité, que Ciceron avoüe ne s’estre jamais tant pleu aux honneurs, qu’on luy deferoit dans Rome, qu’en la metairie Tusculane.
Comme en effet, il ne tarda guere a estre vangé : car sur le poinct qu’en ce mesme temps on faisoit un sacrifice de chevres à la campagne, l’Aigle en ayant ravy un lopin, où estoient attachez quelques charbons encore flambants, porta le tout en son nid : et d’autant qu’il estoit fait de foin, et de semblable matiere seiche et legere, joinct qu’il faisoit fort grand vent, le feu ne tarda guere à s’y mettre, et le consomma.
Cependant la pauvre Perdrix s’affligeoit fort à par soy, de se voir ainsi rebuttée d’eux, pour n’estre de leur engeance.
Cela me semble fort dénué d’intérêt ; car sur ce point on ne peut que formuler des hypothèses très incertaines. […] Le parti catholique, qui était le plus fort, repoussa du barreau troyen le fils de celui qui en avait été l’oracle. […] Fort de son droit, il sentait que c’était le moyen de s’assurer définitivement le triomphe de sa juste cause. […] Sans doute il s’y trouvait bien quelques poésies fort légères. […] Sur la première page sont dessinés sept cercles fort enluminés.
Ils s’asseurent si fort en la Fortune, qu’ils font des partages dans leur ame des biens qu’ils n’ont pas encore acquis, et qu’ils n’acquerront jamais.