Ce partage que fait le Lion aux animaux, ses inferieurs, de la venaison qu’ils ont prise ensemble, represente les injustes avantages que les riches prennent sur les pauvres, qu’ils ont accoûtumé de tromper, en retenant leurs salaires ; de s’attribuër des honneurs immoderez, de rehausser l’excellence de leur protection, de rendre leur conduitte necessaire à l’appuy des affligez, et par toutes ces raisons usurper injustement ce que la nature, ou le hazard leur fait escheoir. Or contre ces marques de tyrannie, il me semble que les pauvres n’ont point de remede, que la patience ; parce que les assistances humaines venant à leur défaillir, ils ne doivent tirer leur satisfaction que de la seule Vertu, et s’attendre à l’espoir d’une meilleure vie, où nul n’est riche, nul n’est puissant ; mais tous les hommes relevent de mesmes loix, et subissent avec égalité les jugements de l’Eternel.
Son Maistre s’estant mis alors à le tancer aigrement, en adjoustant les coups aux menaces, le pauvre Chien luy répondit, qu’il meritoit bien qu’on luy pardonnast, puis qu’il estoit devenu vieil, et qu’en sa jeunesse il avoit esté aussi bon qu’un autre à la prise ; « Mais je voy bien que c’est », continua-t’il, « tu ne prens plaisir à rien, s’il n’y a du profit : Je ne m’étonne donc point si m’ayant aymé tant que j’ay chassé, tu me veux mal maintenant que je n’ay aucunes dents, et ne puis courir. […] Que les grands Seigneurs se viennent instruire icy par la voix d’un pauvre animal, qui reproche de bonne grace à son Maistre une excessive ingratitude. […] Il en prend de mesme à la pluspart de ces pauvres Infortunez, qui s’obstinent à suivre la Cour, où ils blanchissent avant que devenir libres, voire mesme ils ne le deviennent jamais que par leur mort.
Elle prend l’autre lot ; y plante le piquet ; S’étend à son plaisir sur l’orteil d’un pauvre homme, Disant : Je ne croy pas qu’en ce poste je chomme, Ny que d’en déloger, et faire mon paquet Jamais Hippocrate me somme. […] Le pauvre Bestion tous les jours déménage.
L’Asne c’est quelquefois une pauvre Province.
Belle leçon pour les gens chiches : Pendant ces derniers temps combien en a-t-on vus Qui du soir au matin sont pauvres devenus Pour vouloir trop tost estre riches ?
Un pauvre Bucheron tout couvert de ramée, Sous le faix du fagot aussi-bien que des ans, Gemissant et courbé marchoit à pas pesans, Et tâchoit de gagner sa chaumine enfumée. […] En est-il un plus pauvre en la machine ronde ?
L’Aigle fondant sur luy nonobstant cet azile, L’Escarbot intercede et dit : Princesse des Oyseaux, il vous est fort facile D’enlever malgré moy ce pauvre malheureux : Mais ne me faites pas cet affront, je vous prie : Et puisque Jean Lapin vous demande la vie, Donnez-la luy de grace, ou l’ôtez à tous deux : C’est mon voisin, c’est mon compere. […] Le pauvre Jupiter se tut.
Le pot de terre dit au pot de cuivre : « Nage loin de moi, pas à mes côtés ; car si tu me touches, je vole en éclats, même si je m’approche de toi sans le vouloir. » La vie n’est pas sûre pour le pauvre qui a pour voisin un prince rapace.
Pour un pauvre Animal, Grenoüilles, à mon sens, ne raisonnoient pas mal.
Un Asne accompagnoit un Cheval peu courtois, Celui-ci ne portant que son simple harnois, Et le pauvre Baudet si chargé qu’il succombe.
Le pis fut que l’on mit en piteux équipage Le pauvre potager ; adieu planches, quarreaux ; Adieu chicorée et poreaux ; Adieu dequoy mettre au potage. […] On le queste, on le lance, il s’enfuit par un trou, Non pas trou, mais troüée, horrible et large playe Que l’on fit à la pauvre haye Par ordre du Seigneur ; car il eust esté mal Qu’on n’eust pû du jardin sortir tout à cheval.
Cette Lime luy dit, sans se mettre en colere, Pauvre ignorant !
Un Homme avoit en sa maison une Idole de bois, qu’il pria de luy faire quelque bien ; Mais plus il la prioit, et plus il devenoit pauvre. […] Combien de Capitaines, qui rançonnent les Villages, et enflent leur bourse aux despens du pauvre Laboureur ? […] Avecque cela ; ils ne se croyent pas riches, s’ils ne font part de leurs biens aux pauvres, aussi liberalement qu’ils les ont vertueusement acquis ; aussi Dieu benit le travail de telles gents, et leur envoye pendant leurs jours une joyeuse tranquilité, sans laquelle ils ne trouveroient aucunes richesses, ny agreables, ny avantageuses.
Comme il ne cessait de dépenser et de consommer en sacrifices des sommes considérables, le demi-dieu lui apparut la nuit, et lui dit : « Cesse, mon ami, de dilapider ton bien ; car, si tu dépenses tout et que tu deviennes pauvre, c’est à moi que tu t’en prendras. » Ainsi beaucoup de gens, tombés dans le malheur par leur sottise, en rejettent la responsabilité sur les dieux.
Il tenoit un moineau, dit-on, Prest d’étouffer la pauvre beste, Ou de la lâcher aussi-tost, Pour mettre Apollon en défaut.