» Pareillement les hommes qui sont aveugles sur leurs propres intérêts sont mal qualifiés pour conseiller leur prochain.
En voyant les hommes, helas !
Marie de France, n° 84 L’homme et les bœufs Ci nus recunte en ceste fable qu’uns vileins treist hors de sa stable od ses bus les fiens qu[e]’il firent.
Mais Aphrodite apparut en songe à l’esclave et lui dit : « Ne me sache pas gré de te faire belle, car je suis fâchée et en colère contre cet homme à qui tu parais belle. » Il ne faut pas se laisser aveugler par l’orgueil, quand on s’enrichit par des moyens honteux, surtout quand on est sans naissance et sans beauté.
Lorsqu’ils virent le chameau pour la première fois, les hommes eurent peur, et, frappés de sa grande taille, ils s’enfuirent.
toi, cesse ou de me mordre ou de me baiser, afin que je sache si tu es mon ennemi ou mon ami. » Cette fable s’applique à l’homme équivoque.
Un lion devint roi, qui n’était ni colère, ni cruel, ni violent, mais doux et juste, comme un homme.
Sur le point d’être noyée dans la sauce, elle se dit à elle-même : « J’ai mangé, j’ai bu, j’ai pris un bain ; la mort peut venir : il ne m’en chaut. » Cette fable montre que les hommes supportent facilement la mort, quand elle survient sans douleur.
tu fais les délices des dieux et des hommes.
Tout fait nombre, dit l’homme en voyant son butin ; Voilà commencement de chere et de festin : Mettons-le en nostre gibeciere.
Par ceste action il appresta d’abord à rire à ses compagnons, qui dirent de luy, qu’il n’y avoit rien de plus sot, que cét homme de neant, et qu’il le faisoit assez paroistre, en ce qu’apres les avoir requis de luy donner le fardeau le moins pesant, il avoit neantmoins choisi celuy qui l’estoit le plus. […] Mais enfin comme ils vindrent à recognoistre que c’estoit luy veritablement, ils ne pûrent s’estonner assez, de voir qu’un si chetif bout d’homme leur avoit joüé ce tour de soupplesse, et fait plus sagement que eux, en ce qu’il avoit voulu porter les pains, bien asseuré qu’il en seroit déchargé facilement, et avant que de toute autre chose ; au lieu que ses compagnons n’en pouvoient pas user ainsi, estants chargez de balles de marchandise, et de semblable attirail, dont il n’estoit pas possible de se défaire si aisément, que des provisions de bouche.
Esope se voyant sans enfans, s’advisa d’adopter un gentil homme, qu’on nommoit Ennus ; et le presentant au Roy, le luy recommanda, comme s’il eut esté son fils legitime. […] En suite de tout cecy, Lycerus donna la lettre de Nectenabo au subtil Esope, qui ne l’eust pas plûtost leuë, que sçachant par quel moyen il falloit resoudre ceste question, il se mit à rire, et fist rescrire à Nectenabo, qu’incontinent que l’Hyver seroit passé, on luy envoyeroit des Ouvriers, qui luy bastiroient sa Tour, et un homme qui respondroit à toutes ses questions.
Les miserables languissent sous la volonté d’autruy, sans que la leur soit jamais mise en exercice, et sans considerer qu’ils sont hommes. […] Les hommes ne peuvent doncques mieux faire que de s’appliquer au service d’un seul Dieu, qui n’est point inégal en ses affections, et qui nous donne plus de contentement en la vieillesse qu’aux autres âges, pource qu’en celuy-cy nous sommes plus à la veille de nous approcher de luy.
Le pauvre Cheval ainsi repoussé, implora le secours de l’homme, qui luy montant dessus, partit aussi-tost, et assaillit rudement le Cerf. Le Vaincu fut alors Victorieux, bien que toutesfois cela n’ait pû empescher depuis, qu’il n’ayt esté destiné pour servir toûjours à l’homme, car il le porte sur son dos, et luy met-on un frein à la bouche.
Tous les hommes sont bien d’accord avec ce Pescheur, quant aux choses perissables et caduques, à sçavoir qu’il ne faut pas quitter un petit gaing qui est asseuré, pour l’espoir d’un incertain, quelque grand et advantageux qu’il puisse estre. […] Bref parcourons, les Estats, les âges, et les conditions des hommes, et nous trouverons sans doute, qu’on a plus de plaisir à s’asseurer la possession d’un gaing mediocre, qu’à s’égarer vainement apres une entreprise incertaine. […] Si vous vous estes vangez, vous devez attendre le retour aussi ; Il est à croire qu’on se vangera de vos vengeances, et que ce ne sera pas un homme seul, mais une race entiere. […] Croyez-moy, les grands hommes n’ont point esté cognus parmy nous, non pas mesme tous les grands Royaumes. Il y en a de beaux et de bien policez, que le Soleil voit tous les jours, dont nous ignorons possible le nom ; à plus forte raison donques ignorons nous les hommes particuliers.
Les gens d’une médiocre fortune se sauvent aisément ; mais on voit rarement un homme qui jouit d’une grande renommée échapper aux périls.
Un homme opulent nourrissait ensemble une oie et un cygne, non point pour le même objet, mais l’un pour son chant, l’autre en vue de sa table.
» Nous pourrions appliquer cette fable à un homme efféminé qui s’impatiente des moindres peines, alors que nous-mêmes, nous supportons facilement des maux plus grands.
Un homme chauve qui portait perruque cheminait à cheval.
Chez l’Animal qu’on appelle Homme On la receut à bras ouverts, Elle et Que-si que-non son frere, Avecque Tien-et-mien son pere.
Marie de France, n° 52 Le dragon et l’homme Ore cunterai d’un dragun qu’un vilein prist a cumpainun, e cil suvent li premetteit que leaument lui servireit.
Car la sage Nature nous ayant tous produits esgalement, composez de pieces substantielles, qui sont le corps et l’ame, et derechef nous ayant fait participer aux facultez de tous les deux, n’a pas laissé de mettre quelque difference en la facilité de nos actions, et a doüé particulierement les uns d’une chose, et les autres d’une autre ; Comme par exemple, Milon le Crotonien, et Aristote, estoient également hommes, et également individus de leur espece. […] Et toutesfois, ils ne les exerçoient pas avecque la mesme perfection : Car la complexion de Milon le Crotoniate estoit plus robuste quant au corps, et le rendoit par consequent plus capable que tout autre, de la lutte, de l’escrime, et de la course ; au lieu que le temperament d’Aristote estoit plus subtil et plus delié ; son sang pur, et aërien, et les sieges de l’entendement, et de la memoire, plus favorablement organisez en luy qu’en nul autre homme de son âge, pour vacquer à la contemplation des choses de la Nature ; Tellement que son Genie le portoit à mediter, et à raisonner ; En quoy certes il a excellé de la façon que ses escrits le tesmoignent. Cela estant, comme nul n’en doit douter, la consequence que l’on en tire, c’est qu’il n’y a point d’homme en qui la Nature n’ait fait naistre l’action qui luy est la mieux seante, et la plus utile.
Il en est ainsi des hommes : les menteurs ne se vantent jamais plus que quand il n’y a personne pour les confondre.
Un ours se vantait hautement d’aimer les hommes, par la raison qu’il ne mangeait pas de cadavre.
» On pourrait appliquer cette fable aux hommes qui se vantent de faire des merveilles, et qui sont incapables de se conduire dans les circonstances ordinaires de la vie.
Zeus a décidé jadis qu’Hermès inscrirait sur des coquilles les fautes des hommes et déposerait ces coquilles près de lui dans une cassette, afin qu’il fasse justice à chacun.
Le renard accourut, croyant que c’était la cigale. « Tu te trompes, compère, lui dit-elle, si tu as cru que je descendrais : je me défie des renards depuis le jour où j’ai vu dans la fiente de l’un d’eux des ailes de cigale. » Les malheurs du voisin assagissent les hommes sensés.
Le Chiaoux homme de sens Luy dit : Je sçais par renommée Ce que chaque Electeur peut de monde fournir ; Et cela me fait souvenir D’une avanture étrange, et qui pourtant est vraye.
Ce Lion, que nous voyons estendu à l’entrée de sa caverne, est un Tableau de la fin des meschans hommes. […] Car tous les hommes qui ont fait estat de nous, pendant la verdeur de nostre âge, et l’utilité de nos services, nous quittent là froidement quand nous sommes vieux, pource que nous ne pouvons plus rien contribuër à leur bonne fortune.
Comme au contraire, il n’est rien de si hazardeux, que les entreprises des jeunes gents, qui ne daignent suyvre les advis des hommes sages, et de ceux là mesmes que la Nature commet pour leur gouvernement. […] Ce qui arrive, comme dit Aristote, plus aux jeunes gents qu’aux autres, pour la chaleur de leur sang, qui ne leur donne pas la patience de raisonner pour conclure, et pour le peu de pratique qu’ils ont dans le monde, qui ne leur a permis encore de cognoistre les inesgalitez de la fortune, et les divers artifices des hommes ; au lieu que les Vieillards, à cause de la tiedeur, ou plustost de la froidure de leur sang, raisonnent lentement aux occurrences qui leur surviennent, et panchent tousjours devers la crainte, qui comme elle glace les temperaments, elle reside aussi pour l’ordinaire dans les humeurs froides.
Le taureau répondit : « Quand tu es venu, je ne t’ai pas senti, et quand tu t’en iras, je ne te sentirai pas non plus. » On pourrait appliquer cette fable à l’homme impuissant dont ni la présence ni l’absence ne peuvent nuire ou servir.
Or le lièvre, éveillé par le bruit, prit la fuite ; et le lion, avant poursuivi le cerf au loin, sans pouvoir l’atteindre, revint au lièvre et trouva qu’il s’était sauvé lui aussi. « C’est bien fait pour moi, dit-il, puisque lâchant la pâture que j’avais en main, j’ai préféré l’espoir d’une plus belle proie. » Ainsi parfois les hommes, au lieu de se contenter de profils modérés, poursuivent de plus belles espérances, et lâchent imprudemment ce qu’ils ont en main.
Car nostre creance nous apprend, que Dieu est encore plus misericordieux que nous ne sommes meschants, et que le plus desesperé de tous les hommes, le trouve tousjours prest à son secours, si tant est qu’il implore sa bonté.
Cet homme se railloit assez hors de saison.
Contract passé ; nostre homme Tranche du Roy des airs, pleut, vente et fait en somme Un climat pour luy seul : ses plus proches voisins Ne s’en sentoient non plus que les Ameriquains.
Un homme le frappa d’une flèche, et le trait s’enfonça dans sa chair, et la coche avec ses plumes se trouva devant ses yeux.
Mais un des dauphins prenant la parole lui dit : « Il est moins humiliant pour nous de combattre et de périr les uns par les autres que de t’avoir pour médiateur. » De même certains hommes qui n’ont aucune valeur, s’ils tombent sur un temps de troubles publics, s’imaginent qu’ils sont des personnages.
— Elle se mit en colère contre vous, répondit-il, qui négligez les affaires de l’état, pour vous attacher à des fables d’Ésope. » Ainsi parmi les hommes ceux-là sont déraisonnables qui négligent les choses nécessaires et préfèrent celles qui leur font plaisir.
Il en est ainsi chez les hommes.
Or un homme étant tombé sur un cygne mis en vente, et sachant par ouï-dire que c’était un animal très mélodieux, en fit l’acquisition.
» Il en est de même chez les hommes : quand on confie un dépôt à des gens cupides, il est naturel qu’on le perde.
Un âne revêtu d’une peau de lion passait aux yeux de tous pour un lion et il faisait fuir les hommes, il faisait fuir les bêtes.
Pareillement certains hommes, entraînés par la violence de leurs passions, s’engagent inconsidérément dans les entreprises et courent, sans qu’ils s’en doutent, à leur perte.
Je croy mesme qu’en bonne foy Les hommes ont peur comme moy.
Quant au Coq, je pense qu’il est pris pour l’homme voluptueux, qui met tout dans l’indifference, horsmis son ordure propre, representée par le fumier. […] Car les hommes d’aujourd’huy sont d’un naturel si dépravé, qu’ils se portent plus volontiers à la convoitise d’un bien faux, s’il est de difficile conqueste, qu’au desir d’un veritable, qui ne leur devra guere couster.
Nous ne manquerons pas d’exemples pour confirmer ceste verité, si nous representant devant les yeux les plus excellents hommes des siecles passez, nous sçavons considerer leurs mœurs, leur façon de vivre, et leurs habitudes. […] Bref, il n’y a point de si grands hommes dont les actions n’ayent esté soüillées de quelque tache difforme.
Icy l’on blâme l’envieuse malignité de quelques-uns, qui ne peuvent pretendre à une bonne fortune, et s’opposent toutesfois à la pretension d’un autre homme, non pour aucune haine qu’ils ayent conçeuë contre luy, mais seulement par une envieuse qualité, qui les empesche de consentir à l’avancement du Prochain, Estrange, certes, et déloyale maxime, de faire dépendre son contentement de l’ennuy des autres, et de vouloir nuire à celuy qui ne nous en donna jamais l’occasion. […] Il faut donc que l’homme qui se sentira enclin à l’envie, s’exerce ardamment à loüer, et à bien faire, en des sujets mesmes qui sont indignes de l’un et de l’autre.
mais elle n’a pas de cervelle. » Cette fable convient aux hommes magnifiques de corps, mais pauvres de jugement.
Alors le crabe, sur le point d’être dévoré, s’écria : « J’ai mérité ce qui m’arrive, moi qui, habitant de la mer, ai voulu devenir terrien. » Il en est ainsi des hommes : ceux qui abandonnent leurs propres occupations pour se mêler d’affaires qui ne les regardent pas, tombent naturellement dans le malheur.
» Cette fable s’adresse aux hommes injustes et ingrats.
Un jour les arbres se mirent en devoir d’élire un roi pour les commander, et ils dirent à l’olivier : « Règne sur nous. » Et l’olivier leur répondit : « Moi, que je renonce à la grasse liqueur si appréciée en moi par Dieu et par les hommes, pour aller régner sur les arbres !
Laissons doncques en arriere une verité si manifeste, apres avoir donné cét Eloge à la Concorde ; Qu’elle est entierement bien-seante et vertueuse, qu’elle establit les maisons, augmente et affermit les Empires, repousse les forces estrangeres, maintient les intestines, rend les hommes sociables, et perfectionne les Arts ; bref, qu’elle est le plus desirable, bien qui se puisse rencontrer parmy les mortels.
Jupin les renvoya s’estant censurez tous : Du reste contens d’eux : mais parmy les plus fous Nôtre espece excella : car tout ce que nous sommes, Lynx envers nos pareils, et Taupes envers nous, Nous nous pardonnons tout, et rien aux autres hommes.
Sire, vous pouvez tout, reprit d’abord nôtre homme.
Quant à la premiere, il semble qu’Esope ait voulu blasmer la conduitte des hommes, qui preferent la pluspart du temps la servitude à la liberté ; comme fit jadis le Peuple Hebrieu. […] Voylà donc comme les débordements des hommes firent naistre leur servitude.
Arrivée devant la métairie, elle leur demanda comment elles allaient : « Bien, répondirent-elles, si tu t’en vas d’ici. » C’est ainsi que les hommes sensés lisent dans le jeu des méchants, malgré toutes leurs affectations d’honnêteté.
Il en est ainsi des hommes : ceux qui pratiquent de vils métiers meurent avant de se tourner vers des emplois plus honorables.
la femme, toi qui te faisais fort de détourner la colère des dieux, comment n’as-tu même pas pu persuader des hommes ?
Les chênes se plaignaient à Zeus : « C’est en vain, disaient-ils, que nous sommes venus au jour ; car plus que tous les autres arbres nous sommes exposés aux coups brutaux de la hache. » Zeus leur répondit : « C’est vous-mêmes qui êtes les auteurs de votre malheur ; si vous ne produisiez pas les manches de cognée, et si vous ne serviez pas à la charpenterie et à l’agriculture, la hache ne vous abattrait pas. » Certains hommes, qui sont les auteurs de leurs maux, en rejettent sottement le blâme sur les dieux.
Zeus, ayant façonné l’homme, mit aussitôt en lui les diverses inclinations ; mais il oublia d’y mettre la pudeur.
À quoi le lion répondit : « Ce n’est pas que j’aie eu peur de la souris, mais j’ai été surpris que quelqu’un ait osé courir sur le corps du lion endormi. » Cette fable montre que les hommes sensés ne dédaignent pas même les petites choses.
Alors elle s’adressa, flatteuse et suppliante, à la tête : « Sauve-nous, s’il te plaît, maîtresse ; car j’ai eu tort d’entrer en lutte avec toi. » Cette fable confond les hommes rusés et pervers qui se révoltent contre leurs maîtres.
Or contre ces marques de tyrannie, il me semble que les pauvres n’ont point de remede, que la patience ; parce que les assistances humaines venant à leur défaillir, ils ne doivent tirer leur satisfaction que de la seule Vertu, et s’attendre à l’espoir d’une meilleure vie, où nul n’est riche, nul n’est puissant ; mais tous les hommes relevent de mesmes loix, et subissent avec égalité les jugements de l’Eternel.
Nostre homme s’estoit donc à la pluye attendu.
Au contraire, ceux qui conservent avecque fidelité les Places qui leur sont commises, acquierent un honneur immortel en la memoire des hommes, outre la recompense des charges, et la propre satisfaction que leur donne la Vertu. […] Ce Chef l’ayant deffendu pour Scanderbeg, avec une vigilance et une valeur parfaicte, fut convié par ce Prince à luy laisser ceste Place de son bon gré, sous les plus avantageuses conditions qui se pouvoient faire à un homme de qualité, à sçavoir de le rendre le plus grand de sa Cour, de luy donner à commander ses Armées, et des possessions terriennes en abondance.
Or encore que ce blasme touche generalement les hommes, et qu’ils s’attribuënt l’honneur de toutes leurs entreprises, au lieu de le donner à Dieu, qui est la vraye source et la legitime cause de tout ce qu’il y a de bien et d’honneste dans le monde ; Encore, dis-je, qu’ils soient tachez presque tous de ceste orgueilleuse espece d’ingratitude, si est-ce qu’il y en a qui s’y portent d’une inclination particuliere, et dérobent artificieusement l’estime des autres pour se la transferer. […] Ils sont pleins de faste, et volages comme elle ; ils sont foibles et bourdonnent comme elle ; et quand ils auroient fait tout ce qu’ils disent, et merité la gloire qu’ils s’attribuënt, tous-jours n’auroient-ils excité que de la poussiere ; car la loüange des hommes n’est autre chose : Et comme dit un des meilleurs Esprits de nostre âge.
Témoin ce Barbier dont Plutarque raconte l’histoire, qui estant tenu dans la Ville d’Athenes pour un homme extrémement causeur et peu veritable, apprit par hazard sur le port de Pirée d’un fugitif qui avoit abordé dans une chalouppe, que l’armée des Atheniens avoit esté entierement défaite. […] De là vient aussi qu’Esope n’attribuë cette sottise qu’à un enfant, jugeant indigne un homme, de s’exercer à des mensonges nuisibles, et hors de saison.
Afin qu’il fût plus frais et de meilleur débit, On luy lia les pieds, on vous le suspendit ; Puis cet homme et son fils le portent comme un lustre ; Pauvres gens, idiots, couple ignorant et rustre. […] Aprés maints quolibets coup sur coup renvoyez, L’homme crut avoir tort, et mit son fils en croupe.
Le crocodile s’étendit longuement sur l’illustration de ses aïeux et finit par dire que ses pères avaient été gymnasiarques. « Tu peux t’épargner la peine de le dire, répliqua le renard : ta peau fait assez voir que depuis de longues années tu es rompu aux exercices du gymnase. » Il en est de même chez les hommes : les menteurs sont confondus par les faits.
Un homme qui venait de commettre un assassinat était poursuivi par les parents de sa victime.
Chambry 62 Ἄνθρωπος λέοντα χρυσοῦν εὑρών — L’homme qui a trouvé un lion d’or.
Un renard qui passait, l’ayant vue, s’écria : « Le pilote vaut le vaisseau. » Ceci s’adresse à un méchant homme qui se livre à des entreprises perverses.
Le serpent se retourna et le mordit ; tous les deux furent alors précipités du haut des airs, et le milan périt. « Pourquoi, lui dit le serpent, as-tu été si fou que de faire du mal à qui ne t’en faisait pas : tu es justement puni de m’avoir enlevé. » Un homme qui se livre à sa convoitise et fait du mal à de plus faibles que lui peut tomber sur un plus fort : il expiera alors, contre son attente, tous les maux qu’il a faits auparavant.
Le boucher s’étant retourné et le voyant fuir, s’écria : « Toi, sache bien que, partout où tu seras, je te tiendrai à l’œil : car ce n’est pas à moi que tu as pris le cœur, bien au contraire tu m’en as donné. » Cette fable montre que souvent les accidents sont des enseignements pour les hommes.
Un homme, ayant pénétré chez un éleveur d’abeilles, en son absence, avait dérobé miel et rayons.
La fourmi d’à présent était autrefois un homme qui, adonné à l’agriculture, ne se contentait pas du produit de ses propres travaux ; il regardait d’un œil d’envie ceux des autres et ne cessait de dérober les fruits de ses voisins.
» Cette fable montre que certains hommes qui paraissent redoutables parce qu’ils sont inconnus, révèlent leur nullité à la première épreuve.
Un homme qui avait un chien de Malte et un âne jouait constamment avec le chien.
Il en est ainsi chez les hommes : quand une ville est en proie à la guerre, les pauvres se déplacent et se sauvent facilement d’un pays dans un autre et conservent leur liberté ; mais les riches retenus par le poids excessif de leurs richesses deviennent souvent esclaves.
Xanthus sortit aussi pour les voir ; mais pendant qu’il s’y en alloit, l’une s’envola ; ce qui fit que s’estant mis à tancer Esope ; « Malheureux homme », luy dit-il, « ne m’as-tu pas asseuré qu’il y en avoit deux ?
Car il n’est point d’homme si desesperé, qui ne se plaise à la vie, s’il jette les yeux sur une infinité de Mandiants, chargez d’âge et de maladies, qui toutesfois s’estudient à se conserver, comme si leur vie estoit accompagnée de tout ce qu’on appelle bonne fortune.
L’un des Bœufs ruminant luy dit : Cela va bien : Mais quoy l’homme aux cent yeux n’a pas fait sa reveuë.
Et d’autant que ceux du pays l’ouyrent tres-volontiers parler, sans que toutesfois ils le respectassent autrement, et luy fissent aucune sorte d’honneur, Esope s’adressant à eux ; « Hommes Delphiens », leur dit-il, « je viens de m’adviser tout maintenant, que vous ressemblez à quelque piece de bois qui va flottant sur la Mer. […] Dequoy le bon homme bien étonné ; lors qu’à son retour il trouva qu’on les luy avoit desrobez, il commença de s’abandonner aux cris et aux plainctes.
Jugeons par cecy de la foiblesse de nostre nature, puis qu’un homme tel qu’Esope, si excellent en esprit, et qui avoit si bien parlé de l’ingratitude, ne pût s’empescher d’estre deçeu au choix de son fils adoptif, et que ce Perfide, qu’il avoit comme enchanté des promesses de son heritage, ne laissa pas de luy tendre un piege mortel, et de le traicter comme le pire de tous ses ennemis. O vile et déplorable condition des hommes !
Or ce ne sont pas tous-jours des hommes brusques et extravagants, qui se precipitent dans ces dangers. […] De telle nature fût à mon advis Ciceron, homme de grand esprit, et de petit cœur, qui changea deux ou trois fois de party pendant les Guerres Civiles de Rome, non par le zele du bien public, mais pour satisfaire à son ambition démesurée.
S’il advient doncques au Pere, ou bien à la Mere, de commettre une action vicieuse devant leur Enfant, asseurément il l’imitera bien-tost apres, et ce d’autant plus aisément, qu’il ne sçaura pas faire la difference du bien et du mal, et ne sera point détourné par l’imagination de pecher, qui sert quelquesfois de divertissement aux hommes faits. […] les petits oyseaux chanteront selon leur possible les loüanges de l’Eternel : les Cieux annonceront sa gloire, les Quadrupedes et les Reptiles l’adoreront, et vous serez les seuls, ô dénaturez, qui permettrez à vos Enfans de prononcer des termes dissolus, et de se rendre méchants plustost qu’ils ne seront hommes ?
Un homme avait deux chiens.
Nous, nous vivons dans la liberté ; vous, soumis et asservis aux hommes, vous endurez d’eux les coups, vous portez des colliers et vous gardez les troupeaux ; et quand vos maîtres mangent, ils ne vous jettent que les os.
Deux hommes voyageaient de compagnie.
Un homme avait une belle poule qui pondait des œufs d’or.
Le jour suivant, apres que le Maistre d’Esope fut de retour en la Ville, et qu’il l’eust laissé aux champs pour faire la tasche qu’il luy avoit ordonnée, il arriva que les Sacrificateurs de Diane, ou quelques autres hommes, s’estant fortuitement égarez de leur chemin, firent rencontre d’Esope, et le prierent instamment, par Jupiter l’Hospitalier, de leur monstrer par où il falloit aller à la Ville.
Elle prend l’autre lot ; y plante le piquet ; S’étend à son plaisir sur l’orteil d’un pauvre homme, Disant : Je ne croy pas qu’en ce poste je chomme, Ny que d’en déloger, et faire mon paquet Jamais Hippocrate me somme.
La Belle avoit un pere homme prudent et sage : Il laissa le torrent couler.
Chambry 179 Chambry 179.1 Κύων <ἑστιώμενος> siue Ἄνθρωπος καὶ κύων — Le chien invité ou L’homme et le chien. […] Un homme préparait un dîner pour traiter un de ses amis et familiers.
Un homme avait une femme qui était rude à l’excès envers tous les gens de la maison.
L’homme se leva et se mit à sa poursuite.
camarade, ce n’est pas maintenant que tu es mort, que tu aurais dû être droit, c’est lorsque je t’y exhortais : alors tu n’aurais pas été mis à mort. » On pourrait justement conter cette fable à propos des hommes qui pendant leur vie sont méchants envers leurs amis en leur rendant service après leur mort.
Le laboureur répondit : « Mais j’ai deux bœufs qui me font tout sans rien promettre : il vaut donc mieux que je leur donne qu’à vous. » Cette fable s’adresse aux hommes corrompus qui promettent des services et causent de grands dommages.
Un homme, ayant acheté un perroquet, le laissa libre en sa maison.
L’Oyseleur accourust à l’heure mesme, et le pauvre Merle bien estonné de se voir entre ses mains ; « O homme », luy dit-il, « si tu bastis toûjours de semblables villes, tu n’auras pas beaucoup de Citoyens ».
C’est pourquoy Ciceron dit, que les égaux s’assemblent facilement et heureusement avec leurs pareils ; Et Aristote, qu’il n’est point de plus solide amitié parmy les hommes, que celle qui s’establit entre les semblables.
Cette avanture en soy, sans aller plus avant, Peut servir de leçon à la pluspart des hommes.
Cela ne seroit pas raisonnable, joinct que j’ay une femme qui ayme trop la netteté, pour souffrir d’estre servie d’un homme si laid, et si mal propre ». « C’est à quoy vous ne devez pas vous arrester », luy respondirent les Escoliers, « puis qu’il y a une sentence qui dit, Qu’il ne faut point obeyr à la femme ». « Bien donc », repliqua le Philosophe ; « faisons marché de cet Esclave difforme ». […] Car il n’est point d’homme qui sçache tout, et c’est, sans doute, ce qui luy a donné sujet de rire ». […] Car tu as laissé ces deux jeunes garçons, qui estoient fort propres pour un homme tel que toy, et as fait élection de ce visage difforme ». « Cela ne t’importe », continüa Xanthus, « je n’en veux point d’autre pour maintenant ». « Prends-le donc », dit le marchand, « pour la somme de soixante oboles ».
. — Eh bien ; tu t’es fourvoyé, l’ami, dit la ronce, en voulant t’accrocher à moi qui ai l’habitude d’accrocher tout le monde. » Cette fable montre que chez les hommes aussi ceux-là sont des sots qui ont recours à l’aide de ceux que leur instinct porte plutôt à faire du mal.
Ceci prouve que par nature les hommes ont moins d’amour et de respect pour la justice que d’acharnement au gain.
La fourmi lui dit alors : « Ô escarbot, si tu avais travaillé au temps où je prenais de la peine et où tu m’injuriais, tu ne manquerais pas à présent de nourriture. » Pareillement les hommes qui, dans les temps d’abondance, ne se préoccupent pas de l’avenir, tombent dans une misère extrême, lorsque les temps viennent à changer.
Est-ce un homme que tu me monstres, ou quelque tronc d’arbre ? […] Si cela est, prends-moy pour leur Pedant, et ils auront peur de moy comme d’un homme masqué ».
Mais comme il n’y a celuy, qui pour confirmé qu’il soit dans l’exercice des actions vertueuses, n’y puisse faillir quelquefois, la pluspart des hommes n’ayant que de foibles estincelles de probité, c’est asseurément un bien moindre mal pour eux d’estre gouvernez, que de ne l’estre pas, à cause de la grande facilité qu’ils auroient à chopper, s’ils n’estoient retenus par la crainte de quelque Puissance. […] Que si Esope rend icy les Colombes capables de ces fautes, ce n’est pas que les animaux le soient veritablement d’aucun crime, non plus qu’ils ne le sont pas de la parole et du discours, mais il represente en leur personne la faute des hommes, et nous départ ainsi ses enseignements.
Un renard affamé, voyant des grappes de raisin pendre à une treille, voulut les attraper ; mais ne pouvant y parvenir, il s’éloigna en se disant à lui-même : « C’est du verjus. » Pareillement certains hommes, ne pouvant mener à bien leurs aflaires, à cause de leur incapacité, en accusent les circonstances.
Cette fable montre que le travail est pour les hommes un trésor.
Parmi les hommes aussi, ceux-là sont sages qui, attaqués à cause de leurs richesses, les sacrifient pour ne pas risquer leur vie.
Ainsi parfois les hommes ne se doutent pas que ce sont leurs propres ruses qui les précipitent dans le malheur.
Mais comment ne serions-nous revéches aux advis des hommes, puis que nous le sommes quelquesfois aux inspirations de Dieu, et que nous couvrons nos ames de deffences d’airain contre ses traicts, estans en cela nous-mesmes les pires ennemis que nous ayons ?
L’épervier répliqua : « Mais je serais stupide, si je lâchais la pâture que je tiens pour courir après ce qui n’est pas encore en vue. » Cette fable montre que chez les hommes aussi, ceux-là sont déraisonnables qui dans l’espérance de plus grands biens laissent échapper ceux qu’ils ont dans la main.
Un homme nourrissait une chèvre et un âne.
Mais le dieu, reconnaissant son artificieuse intention, répondit : « Assez, l’homme ; car il dépend de toi que ce que tu tiens soit mort ou vivant. » Cette fable montre que la divinité défie toute surprise.
Cette fable montre qu’il vaut mieux être commandé par des hommes nonchalants, mais sans méchanceté, que par des brouillons et des méchants.
Le vieillard répondit : « C’est pour que tu me soulèves mon fardeau… » Cette fable montre que tous les hommes sont attachés à l’existence, même s’ils ont une vie misérable.
Cette fable montre que, même si les circonstances mettent un homme en vue, il ne doit pas oublier son origine ; car cette vie n’est qu’incertitude.
Un naufragé, rejeté sur le rivage, s’était endormi de fatigue ; mais il ne tarda pas à s’éveiller, et, voyant la mer, il lui reprocha de séduire les hommes par son air tranquille ; puis, quand elle les a reçus sur ses eaux, de devenir sauvage et de les faire périr.
Un homme qui avait deux filles avait donné en mariage l’une à un jardinier, l’autre à un potier.
L’homme lui lança un trait et l’ayant atteint, lui dit : « Vois quel est mon messager, après quoi j’irai à toi moi aussi. » Le lion blessé se mit à fuir.
A ces mots Xanthus tout enflammé de colere, envoya chercher Esope, et luy demanda, pour quelle raison il avoit ainsi honteusement chassé ses amis. « Mon Maistre », luy dit Esope, « ne m’as-tu point commandé exprés, de ne laisser venir à ton Festin des gents du commun, et des ignorants mais seulement des hommes doctes ?
Les hommes ont tort de se plaindre des malheurs qui leur arrivent, et d’accuser la Fortune des disgraces dont ils sont eux-mesmes la seule cause.
Or d’autant que cela dépend de la prudence, et que ceste Vertu n’a pas tous-jours des regles certaines, joinct que dans les divisions de la Moralle, on ne peut donner des instructions pour ce qui est d’examiner les fourberies ; il me semble que pour les éviter, il doit suffire à l’homme bien advisé, de prendre soigneusement garde aux actions de ceux qu’il soupçonne, y procedant de telle sorte qu’à la maniere du Renard, il s’embarrasse avec eux le moins qu’il pourra, principalement en visites, et en compliments.
Ainsi pourroit-on bien renvoyer à leur mestier beaucoup d’hommes impertinents, sans se donner la peine d’ouyr les extravagances qu’ils nous estallent.
En suitte de cecy, apres que pour la troisiesme fois il luy eust fait la mesme demande, et que ce pauvre homme luy eust répondu qu’il n’en pouvoit plus, si fort il estoit travaillé d’un flux de ventre ; « C’est vostre santé », continua ce Charlatan.
Le Pâtre se tapit, et dit à demy mort, Que l’homme ne sçait guere, helas !
Toutes les raisons mises cy-devant, et tournées au sens contraire, peuvent servir à ceste verité, à sçavoir, que la forte complexion fait les hommes genereux, et entreprenants ; que l’exercice rend le sang meilleur, que la sobrieté de l’enfance se confirme en l’aage avancé ; et bref, qu’une jeunesse qu’on ne flatte point est capable de toute Vertu. […] Premierement, qu’un fils peu caressé de son pere, s’évertuë à devenir homme de bien, affin de surmonter l’aversion naturelle qu’on a contre luy, par un effort de merite extraordinaire.