(1692) Fables choisies, mises en vers « Livre quatriéme. — XIX. L’Oracle et l’Impie. » p. 36
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(1692) Fables choisies, mises en vers « Livre quatriéme. — XIX. L’Oracle et l’Impie. » p. 36

XIX.

L’Oracle et l’Impie.

Vouloir tromper le Ciel, c’est folie à la Terre.
Le Dedale des cœurs en ses détours n’enserre
Rien qui ne soit d’abord éclairé par les Dieux.
Tout ce que l’homme fait, il le fait à leurs yeux ;
Même les actions que dans l’ombre il croit faire.
Un Payen qui sentoit quelque peu le fagot,
Et qui croyoit en Dieu pour user de ce mot,
Par benefice d’inventaire,
Alla consulter Apollon.
Dés qu’il fut en son sanctuaire,
Ce que je tiens, dit-il, est-il en vie ou non ?
Il tenoit un moineau, dit-on,
Prest d’étouffer la pauvre beste,
Ou de la lâcher aussi-tost,
Pour mettre Apollon en défaut.
Apollon reconnut ce qu’il avoit en teste.
Mort ou vif, luy dit-il, montre-nous ton moineau,
Et ne me tends plus de panneau ;
Tu te trouverois mal d’un pareil stratagême.
Je vois de loin, j’atteins de même.