Bref, la France est déjà reconnue dans le monde comme la patrie privilégiée « de la clergie et de la gaie science 1 » Un trouvère dira : « Dieu fasse que le savoir y soit retenu, et que nul lieu ne lui plaise davantage ! […] Cette prédilection est justifiée par un écrivain de profession, Froissart (1333-1400), qui, s’emparant de l’histoire, nous enseigne l’art de plaire sans le secours de la mesure et du rhythme. […] Lui seul saura plaire tout ensemble aux petits et aux grands.
Enfin, Éliacin, vous avez su me plaire ; Vous n’êtes point sans doute un enfant ordinaire1. […] Plus j’ai cherché, madame, et plus je cherche encor En quelles mains je dois confier ce trésor3 ; Plus je vois que César, digne seul de vous plaire, En doit4 être lui seul l’heureux dépositaire, Et ne peut dignement vous confier qu’aux mains A qui Rome a commis l’empire des humains. […] Renfermez votre amour dans le fond de votre âme : Vous n’aurez point pour moi de langages secrets ; J’entendrai des regards que vous croirez muets ; Et sa perte sera l’infaillible salaire D’un geste ou d’un soupir échappé pour lui plaire.
Croy moi, amy, que les choses peu plaisent Quand on les veoit, si les voyans se taisent. […] ……………………………………………………… ……………………… Si tu m’en veux croire, Au jugement commun ne hasarde ta gloire, Mais, sage, sois content du jugement de ceux Lesquelz trouvent tout bon, ausquelz plaire lu veux, Qui peuvent t’avancer en estais et offices, Qui te peuvent donner les riches benefices, Non ce vent populaire151, et ce frivole bruit Qui de beaucoup de peine apporte peu de fruict. […] Je ne sçauroy penser ce qu’il faut dire Pour plaire au Prince en tout ce qu’il desire. […] Souvent nous nous plaisons aux parfums, aux couleurs, Sans chercher les vertus des odorantes fleurs. […] Chanson O bien-heureux qui peut passer sa vie, Entre les siens, franc de haine et d’envie, Parmy les champs, les forests et les bois, Loin du tumulte et du bruit populaire, Et qui ne vend sa liberté pour plaire Aux passions des princes et des rois !
Si vous avez la vérité à dire, vous ferez fort bien de l’envelopper dans des fables ; elle en plaira beaucoup plus. Si vous voulez dire des fables, elles pourront bien plaire sans contenir aucune vérité.
Le cygne 2 Les grâces de la figure et la beauté de la forme répondent dans le cygne à la douceur du naturel ; il plaît à tous les yeux ; il décore, embellit tous les lieux qu’il fréquente ; on l’aime, on l’applaudit, on l’admire. […] L’homme Tout marque dans l’homme, même à l’extérieur, sa supériorité sur tous les êtres vivants ; il se soutient droit et élevé, son attitude est celle du commandement, sa tête regarde le ciel1 et présente une face auguste2 sur laquelle est imprimé le caractère de sa dignité ; l’image de l’âme y est peinte par la physionomie ; l’excellence de sa nature perce à travers les organes matériels, et anime d’un feu divin3 les traits de son visage ; son port majestueux, sa démarche ferme et hardie, annoncent sa noblesse et son rang4 ; il ne touche à la terre que par ses extrémités les plus éloignées, il ne la voit que de loin5, et semble la dédaigner ; les bras ne lui sont pas donnés pour servir de piliers d’appui à la masse de son corps ; sa main ne doit pas fouler la terre, et perdre par des frottements réitérés la finesse du toucher dont elle est le principal organe ; le bras et la main sont faits pour servir à des usages plus nobles, pour exécuter les ordres de la volonté, pour saisir les choses éloignées, pour écarter les obstacles, pour prévenir les rencontres et le choc de ce qui pourrait nuire, pour embrasser et retenir ce qui peut plaire, pour le mettre à portée des autres sens.
Sachez donc ce qu’il faut pour me plaire, et pour plaire au public. […] Instruire ou plaire : tel est l’objet de la poésie, si même elle n’aspire à plaire et à instruire tout à la fois. […] Pour enlever tous les suffrages, il faut mêler l’utile et l’agréable, il faut plaire et instruire en même temps. […] Il en est de la poésie comme de la peinture : tel tableau, vu de près, vous charmera davantage ; tel autre vous plaira mieux, vu de loin. […] Dites-moi si, à une table bien servie, on aime une symphonie discordante, ou des parfums grossiers, ou des pavots au miel de Sardaigne : non, car le souper n’avait que faire de ces hors-d’œuvre. — Il en est de même de la poésie : née pour plaire, destinée à charmer les cœurs, si elle ne s’élève au premier rang, elle tombe au dernier.
Nous voulons leur apprendre que le grand point est de concilier la finesse du style avec sa clarté, et que tout ce qui brille aux dépens de cette qualité indispensable, ne peut briller longtemps et ne doit plaire qu’à des esprits faux et superficiels. […] Montrez-vous circonspect dans le choix de vos mots ; Ils plaisent rarement, trop vieux ou trop nouveaux.
Les hommes n’aiment point à vous admirer, ils veulent plaire : ils cherchent moins à être instruits, et même réjouis, qu’à être goûtés et applaudis ; et le plaisir le plus délicat est de faire celui d’autrui. […] Telle est en effet la disposition du cœur humain, que Lucrèce a signalée dans de beaux vers (II, 1-6), ainsi traduits par Voltaire : On voit avec plaisir, dans le sein du repos, Des mortels malheureux lutter contre les flots ; On aime à voir de loin deux terribles armées Dans les champs de la mort aux combats animées : Non que le mal d’autrui soit un plaisir si doux ; Mais son danger nous plaît, quand il est loin de nous.
Non que le travail n’ait mûri les fruits spontanés du génie de La Fontaine ; mais le comble de l’art fut pour lui, comme pour tous les maîtres, d’en dissimuler la trace : au mérite de plaire il joignit essentiellement, d’après sa propre expression, celui de paraître n’y penser pas. […] On se plaît encore à l’employer dans la conversation.