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23. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Pascal, 1623-1662 » pp. 56-71

Cependant le malheur du siècle est tel, qu’on voit beaucoup d’opinions nouvelles en théologie, inconnues à toute l’antiquité, soutenues avec obstination et reçues avec applaudissement ; au lieu que celles qu’on produit dans la physique, quoique en petit nombre, semblent devoir être convaincues de fausseté dès qu’elles choquent tant soit peu les opinions reçues : comme si le respect qu’on a pour les anciens philosophes était de devoir, et que celui que l’on porte aux plus anciens des Pères était seulement de bienséance ! […] Et comme il conserve ces connaissances, il peut aussi les augmenter facilement ; de sorte que les hommes sont aujourd’hui en quelque sorte dans le même état où se trouveraient ces anciens philosophes, s’ils pouvaient avoir vieilli jusques à présent, en ajoutant aux connaissances qu’ils avaient celles que leurs études auraient pu leur acquérir à la faveur de tant de siècles. […] De sorte que toute la suite des hommes, pendant le cours de tant de siècles, doit être considérée comme un même homme qui subsiste toujours et qui apprend continuellement1 : d’où l’on voit avec combien d’injustice nous respectons l’antiquité dans ses philosophes ; car, comme la vieillesse est l’âge le plus distant de l’enfance, qui ne voit que la vieillesse chez cet homme universel ne doit pas être cherchée dans les temps proches de sa naissance, mais dans ceux qui en sont les plus éloignés ? […] Médecin de la reine Christine ; il avait été d’abord celui du grand Condé, à qui il avait présenté Pascal, pour que le philosophe fît connaître au prince cette même machine arithmétique.

24. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Voltaire, 1694-1778 » pp. 253-281

Habile, adroit, remuant, infatigable, s’occupant de tout à la fois, même de sa fortune, mêlant les plaisirs aux affaires, aussi laborieux que dissipé, homme de cour et homme de lettres, favori de Madame de Pompadour et roi des philosophes, hôte et ami de Frédéric, flatteur des souverains qu’il encense pour assurer l’impunité à ses hardiesses, ennemi des abus plus que des vices, prêt à tout oser contre les préjugés, mais ne sachant respecter ni la religion ni les mœurs, Voltaire n’eut jamais le temps de se recueillir, et risqua de propager les réformes par la licence, ou de corrompre les esprits en voulant les affranchir. […] Vous êtes philosophe, vous voyez tout en grand ; votre pinceau est fort et hardi. […] Mais, comme je suis encore plus reconnaissant que philosophe, je vous donne, sur ce qui me reste de corps, le même pouvoir que vous avez sur ce qui me reste d’âme. […] Il a fui son bonheur, il a méconnu ses vrais amis ; et c’est plutôt aujourd’hui le Juif errant que le philosophe Socrate. […] Voilà un mot que le pauvre philosophe Helvétius n’a guère justifié.

25. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XII. du corps de l’ouvrage. — portrait, dialogue, amplification  » pp. 161-174

Tout le monde se connaissait ; et si, dans sa promenade, Socrate rencontrait quelque jeune débauché à la ceinture dénouée, ou quelque apprenti philosophe, il mettait son bâton en travers du chemin, la conversation s’engageait, et le dialogue se renouait naturellement au fil des idées du penseur communicatif. […] Le dialogue didactique est utile aussi pour éclairer quelques points obscurs de l’histoire ; ainsi l’admirable dialogue de Sylla et d’Eucrate, dans Montesquieu, où, quoi qu’en dise Marmontel, le philosophe ne traite pas le prescripteur avec trop de respect, mais lui parle avec la convenance d’un homme libre et bien élevé qui discute avec un tyran, sans oublier que ce tyran est un grand homme. […] Mais, d’autre part, je ne voudrais pas, avec Condillac et quelques autres rhéteurs, montrer au poëte une sévérité déplacée, et le traiter moins en poëte qu’en philosophe.

26. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XXIII. des figures. — tropes d’invention et tropes d’usage  » pp. 323-338

Métonymies du contenant pour le contenu : Le verre, la bouteille, pour la liqueur qui y est renfermée ; J’entends à haute voix tout mon camp qui m’appelle, pour les soldats qui s’y trouvaient ; un cachemire, du bourgogne, pour l’étoffe et le vin qui viennent de ces provinces ; le Portique, le Lycée, pour les philosophes réunis dans ces lieux ; Genève, Rome, pour les doctrines religieuses dont ces deux villes sont le centre, Je ne décide point entre Genève et Rome. […] Ainsi vous direz : le philosophe, pour Platon ; le poëte, pour Homère ; le Carthaginois, pour Annibal ; ou, au contraire, un Caton, pour un sage ; un Mécène, pour un protecteur des arts ; un Aristarque ou un Zoïle, pour un critique impartial ou odieusement envieux ; Aux Saumaises futurs préparer des tortures. […] Panurge consulte sur son mariage le philosophe Trouillogan.

27. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Silvestre de Sacy. Né en 1801. » pp. 522-533

La Grèce, cette mère féconde des lettres et des arts, n’a pas eu deux Homère, deux Platon, deux Phidias, quoiqu’elle ait produit plus d’une génération de poëtes, de philosophes et d’artistes, et qu’aucune nation n’ait gardé aussi longtemps qu’elle l’empire de l’esprit et du goût. […] « J’avoue ma prédilection ; de tous les grands hommes de l’antiquité, celui qui, tout compensé, me paraît avoir réuni le plus de nobles et de belles qualités, c’est Cicéron, Cicéron orateur, philosophe, homme de lettres, Cicéron homme d’État !  […] Ils méritent réellement le nom de philosophes, car la sagesse est le but où ils visent.

28. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre IV. des topiques ou lieux. — lieux applicables a l’ensemble du sujet. » pp. 48-63

Ces témoignages divins et humains, dont parle Cicéron, l’avocat les trouvera d’abord dans ce qu’on nomme les pièces du procès, puis dans les livres où sont traitées ex professo les questions de droit qui se rattachent à sa cause, et dans les commentaires que ces ouvrages ont groupés autour d’eux ; l’historien, dans les chroniques, les mémoires, les pamphlets, les journaux, les œuvres philosophiques et littéraires du pays et du siècle qu’il a choisis ; l’orateur politique, dans les fastes parlementaires, dans les records, dans les annales de la tribune en France, en Angleterre, aux Etats-Unis, à Rome même et en Grèce ; le prédicateur, dans l’Ecriture sainte, les Pères, les écrivains ecelésiastiques ; le philosophe, le romancier, le poëte, les trouveront partout. […] On sent, comme le philosophe, que pour avoir une connaissance de cette campagne, il faut arrêter ses regards successivement d’un objet sur un autre, observant d’abord ceux qui appellent plus particulièrement l’attention, qui sont plus frappants, qui dominent, autour desquels et pour lesquels les autres semblent s’arranger ; ensuite, quand on a la situation respective des premiers, passant successivement à tous ceux qui remplissent les intervalles ; enfin, ne décomposant ainsi que pour recomposer, afin qu’une fois les connaissances acquises, les choses, au lieu d’être successives, aient dans l’esprit le même ordre simultané qu’elles ont au dehors. […] Aussi voyons-nous non-seulement que les orateurs sèment leurs discours des sentiments des poëtes, mais que les philosophes même, eux qui méprisent si fort tout ce qui est étranger à leurs études, daignent emprunter quelquefois l’autorité d’un vers cité à propos. » Instit. orat.

29. (1897) Extraits des classiques français, seizième, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours moyens. Première partie : prose. [Seizième siècle] « XVIe siècle — Prose — Michel de Montaigne, 1533-1592 » pp. -

Pourvu, vers 1554, d’un office de conseiller au Parlement de Bordeaux, marié vers la trentaine par convenance plus que par entraînement, honoré de relations illustres, étranger à toute passion, sauf à l’amitié, cette volupté choisie des cœurs épicuriens, privé par la mort de la Boétie d’une tendresse qu’immortalisa son deuil éloquent, ce magistrat philosophe soucieux avant tout de s’appartenir à lui-même, avait quarante-deux ans lorsqu’il se retira des affaires, sans autre ambition que celle de vivre chez lui et pour lui, dans sa tour de Montaigne, parmi ses livres et ses pensées. […] Les poètes et philosophes de l’antiquité, surtout Sénèque et Plutarque, furent pour lui ce que seront pour Bossuet les Pères de l’Église. […] -C., d’avocat il devint philosophe, se voua au stoïcisme.

30. (1875) Les auteurs grecs expliqués… Aristote, Poétique « Commentaire sur la Poétique d’Artistote. — Chapitre V. » pp. 82-88

De cette disposition à saisir le ridicule la comédie tire sa force et ses moyens. » C’est vraiment commenter notre philosophe. […] ) C’est précisément le contraire qu’atteste notre philosophe.

31. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — La Bruyère, 1646-1696 » pp. 155-177

Agile, dégagé, brisé, coupé, appelant les choses par leur nom, il prépare et annonce les temps nouveaux où les philosophes s’armeront à la légère. […] Que dirai-je de ce personnage4 qui a fait parler si longtemps une envieuse critique et qui l’a fait taire ; qu’on admire malgré soi, qui accable par le grand nombre et par l’éminence de ses talents : orateur, historien, théologien, philosophe, d’une rare érudition, d’une plus rare éloquence, soit dans ses entretiens, soit dans ses écrits, soit dans la chaire ; un défenseur de la religion, une lumière de l’Église, parlons d’avance le langage de la postérité, un Père de l’Église ! […] le philosophe est accessible. […] Se faire valoir par des choses qui ne dépendent point des autres ; mais de soi seul, ou renoncer à se faire valoir : maxime inestimable et d’une ressource infinie dans la pratique, utile aux faibles, aux vertueux, à ceux qui ont de l’esprit, qu’elle rend maîtres de leur fortune ou de leur repos ; pernicieuse pour les grands et qui diminuerait leur cour, ou plutôt le nombre de leurs esclaves ; qui ferait tomber leur morgue avec une partie de leur autorité, et les réduirait presque à leurs entremets et à leurs équipages ; qui les priverait du plaisir qu’ils sentent à se faire prier, presser, solliciter, à faire attendre ou à refuser, à promettre et à ne pas donner ; qui les traverserait dans le goût qu’ils ont quelquefois à mettre les sots en vue, et à anéantir le mérite quand il leur arrive de le discerner ; qui bannirait des cours les brigues, les cabales, les mauvais offices, la bassesse, la flatterie, la fourberie ; qui ferait d’une cour orageuse, pleine de mouvements et d’intrigues, comme une pièce comique ou même tragique, dont les sages ne seraient que les spectateurs ; qui remettrait de la dignité dans les différentes conditions des hommes, de la sérénité sur leurs visages ; qui étendrait leur liberté ; qui réveillerait en eux, avec les talents naturels, l’habitude du travail et de l’exercice ; qui les exciterait à l’émulation, au désir de la gloire, à l’amour de la vertu ; qui, au lieu de courtisans vils, inquiets, inutiles, souvent onéreux à la république, en ferait ou de sages économes ou d’excellents pères de famille, ou des juges intègres, ou de bons officiers, ou de grands capitaines, ou des orateurs, ou des philosophes ; et qui ne leur attirerait à tous nul autre inconvénient que celui peut-être de laisser à leurs héritiers moins de trésors que de bons exemples1.

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