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144. (1854) Éléments de rhétorique française

Je n’ai conservé au nombre des figures que celles qui ajoutent véritablement aux effets du style, et j’ai préféré les conseils qui forment le goût aux détails techniques qui chargent inutilement la mémoire. […] Ce qui distingue ici le poëte du rimailleur, et en général l’homme de goût de l’écrivain vulgaire, c’est que le premier expose sa pensée pour ainsi dire toute d’une seule pièce, tandis que le second sait l’analyser, c’est-à-dire, y découvrir les idées particulières dont elle se compose. […] Tant il est vrai qu’il y a dans le style deux éléments bien différents : l’ordre et le mouvement qu’on met dans les pensées, et en même temps le goût qui préside au choix des mots et â leur place dans la phrase ! […] Sans doute il faut user des tropes avec sobriété ; car, trop prodigués, ils nuiraient à la clarté, et, comme dit Voltaire, ils nuiraient même à la vérité en disant plus ou moins que la chose même ; mais employés avec goût, ils sont le nerf du langage. […] Dans ces différentes espèces de gestes, il y a une mesure que le goût et la bienséance doivent enseigner.

145. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome I (3e éd.) « Préface de la première édition. » pp. -

D’ailleurs les bons exemples offrent tantôt de belles idées, qui ne peuvent qu’enrichir l’esprit, tantôt de grands sentiments, propres à former le cœur, et contribuent toujours infiniment à épurer le goût.

146. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Seconde partie. Étude des genres de littérature, en vers et en prose. — Chapitre VII. Satire. »

La vraie satire attaque les vices généraux de la-société, frappe le ridicule sans avilir les personnes, flétrit le mal, le préjugé, l’erreur, sans sortir des bornes des convenances, sans blesser le goût ni la pudeur.

147. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XX. des qualités accidentelles du style. — élégance, finesse, naiveté, enjouement  » pp. 274-288

Mais qu’on y prenne garde ; les gens de goût ne sont pas si faciles à émouvoir en cet endroit. […] Toutefois les hommes de goût ont cette cruauté ; ils pensent qu’une idée qui ne saurait être produite avec agrément et décence doit être impitoyablement sacrifiée.

148. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre XXIII. des figures. — tropes d’invention et tropes d’usage  » pp. 323-338

Encore une fois, cette substitution n’est assurément pas une faute, souvent même elle est une beauté ; mais quand tout un poëme est écrit dans ce goût, il devient d’une insupportable monotonie. […] Au reste le goût et le génie de la langue sont les seuls maîtres dans l’emploi de ces trois dernières figures.

149. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — De Maistre, 1753-1821 » pp. 377-387

Il me semble qu’un prophète, d’un seul trait de son fier pinceau, vous a peints d’après nature, il y a vingt-cinq siècles, lorsqu’il a dit : « Chaque parole de ce peuple est une conjuration2 » ; l’étincelle électrique, parcourant, comme la foudre dont elle dérive, une masse d’hommes en communication, représente faiblement l’invasion instantanée, j’ai presque dit fulminante, d’un goût, d’un système, d’une passion parmi les Français qui ne peuvent vivre isolés. […] Il ne réussit bien qu’aux sentiments qui exigent du jet, et au commerce qui demande du goût, de la hardiesse et de la célérité. » « Les journaux et les livres sont plus dangereux en France qu’ailleurs, parce que tout le monde y veut avoir de l’esprit ; et que ceux qui n’en ont pas en supposent toujours beaucoup à l’auteur qu’ils lisent, et se hâtent de penser on de parler comme lui. » « En France, il semble qu’on aime les arts pour en juger bien plus que pour en jouir. » 1.

150. (1875) Les auteurs grecs expliqués… Aristote, Poétique « Commentaire sur la Poétique d’Artistote. — Chapitre XXII. » pp. 122-123

C’est peut-être le célèbre Euclide, chef de l’École de Mégare, qui paraît avoir eu peu de goût pour la poésie, et dont Diogène Laërce (II, 109) atteste les dissentiments avec Aristote.

151. (1881) Cours complet de littérature. Style (3e éd.) « Cours complet de littérature — Style — [Introduction] » pp. 18-20

Le style se distingue du langage de la conversation en ce qu’il demande un ordre plus rigoureux, une observation plus stricte des lois du langage, ainsi que l’emploi de tous les ornements autorisés par le goût.

152. (1853) Petit traité de rhétorique et de littérature « Chapitre V. Ouvrages historiques. »

Selon le goût de chaque historien, les faits font naître des réflexions morales ou politiques ; alors, il faut prendre garde d’ennuyer le lecteur par des réflexions ou leçons trop fréquentes, des sentences, des maximes sans fin. […] Pour remplir avec succès ce dernier objet, il faut qu’il joigne à la finesse de l’esprit, à la délicatesse du goût, une étude sérieuse et une connaissance réelle des matières que ces auteurs ont traitées ; qu’il lise leurs écrits sans la moindre prévention ; qu’il remonte jusqu’aux temps où ils ont vécu, se transporte dans les pays qu’ils ont habités, et observe la religion, les mœurs, les usages, le goût dominant de leur siècle.

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