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214. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Jean-Jacques Rousseau, 1712-1778 » pp. 185-195

Intelligence plus puissante que saine, il eut moins de justesse que de force dans l’esprit. […] Il nous inspire une admiration inquiète, et mêlée d’une pitié qui, sans absoudre les écarts de son esprit, nous rend sympathiques à son cœur, et désarme les juges les plus sévères. […] quelle présence d’esprit, quelle finesse et quelle justesse dans ses réponses ! […] Socrate mourant sans douleur4, sans ignominie, soutint aisément jusqu’au bout son personnage ; et si cette facile mort n’eût honoré sa vie, on douterait si Socrate, avec tout son esprit, fut autre chose5qu’un sophiste. […] donnez à ces travaux d’un homme, je ne dis pas la durée ou l’esprit de vie, mais la fraîcheur du moindre de vos ouvrages !

215. (1881) Cours complet de littérature. Poétique (3e éd.) « Poétique — Deuxième partie. De la poésie en particulier ou des différents genres de poésie — Seconde section. Des grands genres de poésie — Chapitre IV. Du genre dramatique. » pp. 252-332

Il n’est pas nécessaire de définir ce que c’est que l’intérêt, ni de dire qu’il prend sa source tantôt dans le cœur, tantôt dans l’esprit. […] Si elle savait que c’est son frère, il n’y a pas de doute qu’elle ne l’épargnât : ainsi c’est son ignorance qui tient les esprits en suspens. […] Ce tort cependant ne tient pas à la nature de la comédie ; il faut l’imputer au mauvais génie et à l’esprit dépravé de l’écrivain. […] Le bon goût et l’honnêteté proscrivent de tels abus de tous les ouvrages d’esprit. […] Un esprit vif et plaisant, fertile en bons mots et en saillies, est nécessaire pour réussir dans ce genre.

216. (1876) Traité de versification latine, à l'usage des classes supérieures (3e éd.) « PREMIÈRE PARTIE. DE L'ÉLÉGANCE LATINE. — CHAPITRE II. Du choix et de la délicatesse des expressions. » pp. 9-77

Ayons un esprit tel que nous ne jugions pas mauvais ce que Dieu a établi. […] Il y a des jeux propres à exercer l’esprit des enfants. […] Il y a des jeux propres à exercer l’esprit des enfants. […] L'image de mon ancien ami s’est présentée à mon esprit. […] Tout cela est le produit d’un esprit même médiocre.

217. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome I (3e éd.) « Première partie. De l’Art de bien écrire. — Section II. De l’Art d’écrire agréablement. — Chapitre II. Des différentes Espèces de Style, et des Figures de Pensées. » pp. 238-278

Il y en a que l’Écrivain, soit en prose, soit en vers, emploie avec art, pour porter plus surement la lumière dans notre esprit ; pour faire parler la raison avec plus de force et de justesse ; pour présenter une vérité sous le jour le plus favorable et le plus lumineux : celles-là sont les plus convenables à la preuve. […] » Cette figure consiste aussi à faire des questions avec art, pour ramener à son sentiment des esprits qui en étaient d’abord éloignés. […] On peut rapporter à cette figure le Parallèle, qui n’est autre chose que la comparaison de deux hommes illustres, comme on le voit dans celui-ci, que La Motte a fait de Corneille et de Racine : Des deux souverains de la scène L’aspect a frappé nos esprits : C’est sur leurs pas que Melpomènea Conduit ses plus chers favoris. L’un plus pur, l’autre plus sublime, Tous deux partagent notre estime Par un mérite différent : Tour à tour ils nous font entendre Ce que le cœur a de plus tendre, Ce que l’esprit a de plus grand. […] « Un homme s’est rencontré d’une profondeur d’esprit incroyable ; hypocrite raffiné autant qu’habile politique ; capable de tout entreprendre et de tout cacher ; également actif et infatigable dans la paix et dans la guerre ; qui ne laissait rien à la fortune de ce qu’il pouvait lui ôter par conseil et par prévoyance ; mais au reste si vigilant et si prêt à tout, qu’il n’a jamais manqué les occasions qu’elle lui a présentées ; enfin un de ces esprits remuants et audacieux, qui semblent être nés pour changer le monde. » Les Poètes font très souvent usage de cette figure, en donnant eux-mêmes un caractère à leurs personnages, ou en embellissant celui que l’histoire leur donne.

218. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome I (3e éd.) « Première partie. De l’Art de bien écrire. — Section III. De l’Art d’écrire pathétiquement. — Observations générales sur l’Art d’écrire les Lettres » pp. 339-364

On doit dire dans une lettre les choses comme elles se présentent à l’esprit, sans se permettre jamais des mots impropres, des phrases triviales, des proverbes populaires. […] La bonne éducation, le bon esprit, le sentiment nous dictent ce langage. […] L’esprit et l’enjouement doivent en être bannis. […] Mêlez même l’enjouement à vos plaintes : en blâmant les procédés de la personne, justifiez ses intentions ; c’est le moyen de ramener les esprits. […] Mais qu’il y ait toujours de la chaleur et de la rapidité dans le récit : c’est le moyen de flatter l’esprit et l’imagination, en même temps qu’on enchaîne la curiosité.

219. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre premier. Éléments généraux du Goût et du Style. — Chapitre VI. De l’Harmonie du Style. »

Tantôt la pensée demande le développement de la période ; tantôt les traits de lumière dont l’esprit est frappé, sont autant d’éclairs qui se succèdent rapidement. […] Ils se sont attachés, et ils sont parvenus avec succès à peindre la pensée dans les mots seulement, dont l’esprit et l’oreille devaient être vivement frappés. […] Il y a harmonie enfin dans les chutes qui sont soutenues ou adoucies, molles ou fermes, sourdes ou brillantes, variées enfin, comme la pensée ou le style, au gré de l’esprit et de l’oreille. […] « L’œil reçoit et réfléchit en même temps la lumière de la pensée et la chaleur du sentiment ; c’est le sens de l’esprit, et la chaleur de l’intelligence ».

220. (1875) Les auteurs grecs expliqués… Aristote, Poétique « Commentaire sur la Poétique d’Artistote. — Chapitre V. » pp. 82-88

) — Nos critiques français sont bien autrement scrupuleux sur la question des unités, et il est curieux de voir comment la rigueur des préceptes d’Aristote va peu à peu s’exagérant dans l’esprit de ses imitateurs. […] La traduction de ce passage par de Norville (1671) montre combien alors les esprits étaient prévenus sur ce sujet et disposés à interpréter Aristote dans le sens de leurs théories : « La tragédie commence et termine son action en un jour ou en une nuit autant que faire se peut : et si le fort de l’action se passe dans l’un de ces temps elle anticipera bien peu sur l’autre. » Après avoir observé que les trois grands tragiques de la Grèce se conforment à l’unité de temps, d’Aubignac ajoute : « …. […] ) C’est apparemment que l’espèce de vraisemblance qu’on recherche par l’unité de lieu et par celle de temps est, en réalité, la plus indifférente pour l’esprit du spectateur. […] On ne peut voir sans quelque peine la torture qu’un si grand esprit s’impose pour satisfaire à cette règle chimérique (Troisième Discours sur le poëme dramatique).

221. (1865) Morceaux choisis des classiques français à l’usage des classes supérieures : chefs-d’oeuvre des prosateurs et des poëtes du dix-septième et du dix-huitième siècle (nouv. éd.). Classe de troisième « Morceaux choisis des classiques français à l’usage de la classe de troisième. Chefs-d’œuvre de prose. — Mme de Sévigné. (1626-1696.) » pp. 48-53

On peut dire que ses lettres ne charment pas seulement l’esprit du lecteur, mais qu’elles le purifient et l’élèvent1. […] Le rôti qui avait manqué, non pas à la table du roi, mais aux vingt-cinquièmes, lui revenait toujours à l’esprit. […] Vous n’avez jamais vu Paris comme il est : tout le monde pleure, ou craint de pleurer : l’esprit tourne à la pauvre madame de Nogent1 ; madame de Longueville fait fendre le cœur, à ce qu’on dit : je ne l’ai point vue, mais voici ce que je sais. […] Royer-Collard, cet excellent juge des ouvrages d’esprit, lisait chaque soir, après une page de Tacite, quelque lettre de madame de Sévigné.

222. (1853) Petit traité de rhétorique et de littérature « Chapitre VI. Contes, romans, nouvelles. »

Il y en a une autre qu’on peut nommer morale, qui est bien importante et malheureusement négligée ou méprisée par un grand nombre de romanciers. « Le divertissement du lecteur, dit Huet, évêque d’Avranches, dans son savant Traité de l’origine des romans, n’est qu’une fin subordonnée à la principale, qui est l’instruction de l’esprit et la correction des mœurs. » Le but que l’écrivain doit se proposer est donc d’instruire sous le voile de la fiction, de polir l’esprit et de former le cœur en présentant un tableau de la vie humaine. […] Entre nous, la pierre philosophale n’est qu’une belle chimère, que j’ai moi-même forgée pour me jouer de l’esprit humain, qui veut passer les bornes qui lui ont été prescrites. […] — Voici ce que c’est, dit l’esprit : deux jeunes cavaliers jouaient ensemble aux cartes dans un tripot où vous voyez tant de lampes et de chandelles allumées.

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