Ils ont bien ennuyé le roi, toute la cour, Sans que le moindre édit ait, pour punir leur crime, Retranché les auteurs ou supprimé la rime. […] Tous les jours, à la cour, un sot de qualité Peut juger de travers avec impunité… Et je serai le seul qui ne pourrai rien dire ! […] qu’est devenu ce temps, cet heureux temps, Où les rois s’honoraient du nom de fainéants, S’endormaient sur le trône, et, me servant sans honte, Laissaient leur sceptre aux mains ou d’un maire ou d’un Aucun soin n’approchait de leur paisible cour : [comte ? […] Ajoutez que la profusion des faveurs dont il ne cessa d’être comblé par la cour formait un contraste assez choquant avec le discrédit où il tomba auprès du public vers la fin de sa vie.
Molière 1622-1672 [Notice] Molière a peint avec une vérité saisissante tous les types de la physionomie humaine ; il met en scène la cour, la ville et la province : bourgeois et nobles, marchands, médecins et hommes de lois, pédants, fâcheux, fanfarons, fripons, servantes, valets et maîtres, bel esprit, faux savoir, avarice, prodigalité, faiblesse, égoïsme, entêtement, malveillance, vanité, sottise, jalousie, libertinage, misanthropie, irréligion, hypocrisie, en un mot, son siècle, et avec lui l’humanité tout entière. […] C’est un homme gonflé de l’amour de soi-même : Son mérite jamais n’est content de la cour ; Contre elle il fait métier de pester chaque jour1 ; Et l’on ne donne emploi, charge ni bénéfice, Qu’à tout ce qu’il se croit on ne fasse injustice. […] poussez, mes bons amis de cour, Vous n’en épargnez point, et chacun a son tour : Cependant aucun d’eux à vos yeux ne se montre, Qu’on ne vous voie, en hâte, aller à sa rencontre, Lui présenter la main, et d’un baiser flatteur Appuyer les serments d’être son serviteur. […] L’étude et la visite ont leurs talents à part ; Qui se donne à la cour, se dérobe à son art, Un esprit partagé rarement s’y consomme, Et les emplois de feu demandent tout un homme. […] Imaginez-vous l’application d’un enfant à élever un château de cartes, ou à se saisir d’un papillon ; c’est celle de Théodote pour une affaire de rien, et qui ne mérite pas qu’on s’en remue : il la traite sérieusement, et comme quelque chose qui est capital ; il agit, il s’empresse, il la fait réussir ; le voilà qui respire et qui se repose, et il a raison : elle lui a coûté beaucoup de peine. » (De la Cour.)
Théocrite, Virgile, Florian sont des poètes de cour qui prouvent la vérité de ce que nous venons de dire. […] Théocrite, né à Syracuse, passa en Égypte à la cour de Ptolémée Philadelphe.
Nouvelles de cour 1 Novembre 1786. […] Le roi des Francs ne paraît point en société ; l’on y rencontre toute la famille royale, mais l’on ne voit le roi qu’à son coucher, à son lever, et le dimanche lorsqu’on lui fait sa cour. […] On y a trouvé du pathos ; c’est assez la critique des gens de cette cour ; c’est le ridicule que les âmes froides donnent aux âmes ardentes.
la faveur de la cour. La cour veut toujours unir les plaisirs avec les affaires. […] que lui servit d’avoir mérité la confiance intime de la cour ? […] Puis-je taire durant ce temps ce qui se faisait à la cour et en la présence du roi ? […] Dans quelle cour de l’Allemagne n’a-t-on pas vu le théâtre français ?
je croyais que vous étiez au milieu des pompes et des félicités de la cour, et je n’ai rien su de l’état où vous avez été ; personne assurément n’a osé me l’apprendre ; cette excuse est bonne pour me justifier auprès de vous ; mais elle ne me justifie pas auprès de moi, et mon cœur, qui me dit tant de belles choses de vous, devrait bien aussi me dire quand vous êtes malade. […] J’espère que je vous porterai assez de nouvelles de ce lieu-là pour faire ma cour auprès de vous et pour faire peur à vos voisins.
Fils et petit-fils d’un tapissier du roi, élevé au collége de Clermont, puis dirigé vers l’étude du droit, Jean-Baptiste Poquelin suivit son étoile, et, sous le nom de Molière, devint directeur d’une troupe ambulante, sans se laisser tenter par la faveur du prince de Conti, son condisciple, qui lui offrait une charge de cour. […] Il a peint avec une vérité saisissante tous les types de la physionomie humaine ; il met en scène la cour, la ville et la province, bourgeois et nobles, marchands, médecins et hommes de lois, pédants, fâcheux, fanfarons, fripons, servantes, valets et maîtres, sans compter tous les ridicules et tous les vices, bel esprit, faux savoir, avarice, prodigalité, faiblesse, égoïsme, entêtement, malveillance, vanité, sottise, jalousie, libertinage, misanthropie, irréligion, hypocrisie, en un mot, son siècle, et avec lui l’humanité tout entière. […] Monsieur, je ne saurais souffrir les flatteurs8 ; et je vois que ce qu’il en fait, que ses contrôles perpétuels sur le pain et le vin, le bois, le sel et la chandelle ne sont rien que pour vous gratter1, et vous faire sa cour. […] Il y avait quelque courage à parler ainsi, sous l’ancien régime, devant la cour de France.
Voltaire 1694-1778 [Notice] Habile, adroit, remuant, infatigable, s’occupant de tout à la fois, mêlant les plaisirs aux affaires, homme de cour et homme de lettres, favori de Madame de Pompadour et roi des philosophes, fla teur des souverains qu’il encensa pour assurer l’impunité à ses hardiesses, ennemi des abus plus que des vices, prêt à tout oser contre les préjugés, mais ne sachant respecter ni la religion ni les mœurs, Voltaire n’eut jamais le temps de se recueillir, et risqua de propager les réformes par la licence, ou de corrompre les esprits en voulant les affranchir. […] Si vers le soir un triste orage Vient ternir l’éclat d’un beau jour, Je me souviens qu’à votre cour Le temps change encore davantage. […] Des xx redoublés admirant la puissance, Il croit que Varignon2 fut seul utile en France, Et s’étonne surtout qu’inspiré par l’amour, Sans algèbre, autrefois, Quinault3 charmât la cour. […] A peine de la cour j’entrai dans la carrière, Que mon âme éclairée, ouverte au repentir, N’eut d’autre ambition que d’en pouvoir sortir4.
La Fontaine a défini la Cour d’une manière piquante et précise : Je définis la cour un pays où les gens, Tristes, gais, prêts à tout, à tout indifférents, Sont ce qu’il plaît aux gens, ou s’ils ne peuvent l’être, Tâchent au moins de le paraître : Peuple caméléon, peuple singe du maître. […] Sachez, monsieur, que tant va la cruche à l’eau qu’enfin elle se brise ; et, comme dit fort bien cet auteur que je ne connais pas, l’homme est, en ce monde, ainsi que l’oiseau sur la branche ; la branche est attachée à l’arbre ; qui s’attache à l’arbre suit de bons préceptes ; les bons préceptes valent mieux que les belles paroles ; les belles paroles se trouvent à la cour ; à la cour sont les courtisans : les courtisans suivent la mode ; la mode vient de la fantaisie ; la fantaisie est une faculté de l’Âme : l’âme est ce qui nous donne la vie ; la vie finit par la mort ; la mort nous fait passer au ciel ; le ciel est au-dessus de la terre ; la terre n’est point la mer ; sa mer est sujette aux orages ; les orages tourmentent les vaisseaux ; les vaisseaux ont besoin d’un bon pilote ; un bon pilote a île la prudence ; la prudence n’est pas dans les jeunes gens ; les jeunes gens doivent obéissance aux vieux ; les vieux aiment les richesses ; les richesses font les riches ; les riches ne sont pas pauvres ; les pauvres ont de la nécessité ; la nécessité n’a point de loi ; qui n’a pas de loi vil en bête brute ; et, par conséquent, vous serez damné à tous les diables. […] Le Jugement donnera à l’écrivain le discernement nécessaire pour proportionner son style ou son discours à l’intelligence, aux sentiments de ceux auxquels il parle ; pour remuer les passions qui leur sont familières, pour pénétrer dans leurs cœurs par le côté le plus accessible ; car, on ne pense point, on ne s’exprime point à la cour comme la ville, à la ville comme à la campagne. […] Notre judicieux Boileau nous recommande ainsi de tenir compte de toutes ces nuances : Étudiez la cour, et connaissez la ville ; L’une et l’autre est toujours en modèles fertile.