Influence exercée par l’Italie On ne saurait refuser à un peuple le droit d’emprunter à ses voisins les termes qui lui manquent ; c’est un exemple que nous donnent les anciens eux-mêmes ; et si Montaigne conseillait à ses contemporains de puiser à toutes les sources, aux patois provinciaux comme « au jargon de nos chasses et de nos guerres », le néologisme qui procède d’origine étrangère est légitime, lorsqu’il répond à des besoins nouveaux qui n’ont pas encore leur expression. […] Ces exemples que l’on pourrait multiplier, si l’on ne craignait de fatiguer l’attention, prouvent combien l’orthographe fut souvent arbitraire et factice, dans un temps où le sens historique manquait aux plus doctes. […] Terminons en disant que le xvie siècle ne pouvait manquer de nous être sympathique, aujourd’hui surtout ; car nous y retrouvons notre esprit de curiosité, de libre examen, de turbulence orageuse et trop souvent anarchique.
Les maîtres des colléges de province, auxquels manquent, la plupart du temps, les ressources littéraires que la capitale fournit en abondance, et qui attendaient un recueil de cette nature, y trouveront, outre les matériaux dont ils ont besoin, un terme de comparaison, qui excitera, ce nous semble, la curiosité et l’émulation de leurs élèves.
Il a tout le sel et toute la grâce de l’esprit gaulois… Ce n’est pas que ce génie vif, alerte et délicat ait manqué de feu et d’énergie ; il avait tout de l’abeille : le miel, l’aiguillon, et même les ailes. » Épîtres I. […] Il reste néanmoins que, si la grâce et le charme lui manquent, s’il n’a que bien rarement des vers coulants et frais comme ceux-ci que je détache du début du septième jour, fort prisé de Goethe : Ici la pastorelle, à travers une plaine, A l’ombre, d’un bas lent, son gras troupeau remène ; Cheminant elle file, et, à voir sa façon, On diroit qu’elle entonne une douce chanson ; il rencontre souvent le vers fort et sonore ; il dira aussi bien que d’Aubigné en son Jugement dernier, que le Fils de Dieu Descendra glorieux des voûtes étoilées ; il laissera dans toutes les mémoires ce vers fameux : Et l’Enfer est partout où l’Éternel n’est pas ; en ses Sepmaines, œuvre de théologie, d’érudition scientifique, zoologique, géologique et aussi d’imagination, il prendra le premier rang dans la poésie descriptive, témoin le portrait renommé du cheval qu’on trouvera ci-après et qui rappelle quelquefois heureusement celui de Virgile (Géorgiq. […] Il lui manque l’éclat de Ronsard dans les premières, la vigueur de Régnier dans les secondes, la netteté de Boileau dans le dernier ; mais il suit son sentier après l’un et ouvre la route aux deux autres.
Il faut les ménager, et leur faire croire qu’ils ont plutôt oublié que manqué. » 2.
Ce n’est pas assez qu’une chose soit belle, il faut qu’elle soit propre au sujet, qu’il n’y ait rien de trop1, ni rien de manque. […] Quelque puissant que soit un monarque, il manque quelque chose à sa gloire, s’il n’a la prééminence de l’esprit ; et quelque éclairé que soit un sujet, sa condition est toujours rabaissée par la dépendance.
Si la gravité domine, elle peut devenir trop sombre et trop monotone ; si la chaleur manque de gravité, ce n’est plus qu’une déclamation théâtrale, au moins déplacée, quand elle n’est pas ridicule dans la chaire.
Ce ciel terne, où manque un soleil, N’est jamais bleu, jamais vermeil ; Jamais brise, dans ce sommeil De la nature, N’agita d’un frémissement La torpeur de ce lac dormant, Dont l’eau n’a point de mouvement, Point de murmure4.
Oubli, n. m. manque de souvenir.
combien manquent de tout, pendant que le riche est dans l’abondance, dans le luxe, dans les délices !
Or, si tout ce qui manque en ce genre à la doctrine philosophique des temps anciens, les philosophes sacrés le réunissent au plus haut degré, il faut bien que celui qui les a inspirés soit ce maître plus habile, ce philosophe plus éclairé, dont nous venons de parler. […] ) C’est là précisément ce qui manque aux descriptions dont nous venons de parler, et ce qui donne un si grand avantage à la simplicité touchante du philosophe chrétien, sur toute la pompe poétique de l’écrivain profane.
Il y a dans le cœur de l’homme une certaine corde qui, frappée juste, ne manque jamais de rendre le son qui lui est propre.
« Je ne sais, a dit La Bruyère, si l’on pourra mettre jamais dans les lettres plus de tour, d’agrément et de style que l’on n’en voit dans celles de Voiture1. » Son plus grand défaut est de manquer de naturel : toutefois on l’excusera, en songeant que l’on ne pouvait arriver à la grâce qu’en passant par la subtilité et la recherche.
Le début manque à cette pièce, qui est de 1604 : elle n’a pas été achevée. — On sait que l’Orne est une rivière qui coule auprès de Caen, et l’on doit penser que Malherbe déplore ici la perte d’un de ses compatriotes.
Je n’en veux pour preuve que l’air un peu fané de tel gros bouquet cueilli jadis, vers le commencement du siècle, dans des terrains réputés classiques, et où l’ivraie pourtant ne manquait pas.
On trouve dans sa prose quantité de vers alexandrins auxquels ne manque que la rime.
Noël et Laplace dans des terrains réputés classiques, et où l’ivraie pourtant ne manquait pas.
Celle qui a été publiée depuis peu, est exacte : il ne lui manque que d’être un peu plus soignée. […] Le style en est abondant, fleuri, et ne manque jamais de chaleur. […] On convient en effet qu’il manque d’une certaine vivacité de plaisanterie : il plaît beaucoup plus qu’il ne fait rire. […] Mais en général ses pièces manquent de régularité, et la décence n’y est pas assez respectée. […] On voit assez que ni les unes ni les autres ne manquent point de solidité.
Voici le début de l’orateur : « Plusieurs des orateurs que vous venez d’entendre à cette tribune, n’ont pas manqué de préconiser le législateur qui, en consacrant l’ancienne loi sur la sépulture des citoyens moissonnés dans les combats, crut devoir y ajouter celle qui ordonne de prononcer leur éloge : sans doute ils pensaient que c’est une belle institution de louer en public les héros morts pour la patrie.
Les Grecs et les Latins n’ont rien en ce genre de si parfait : car il comprend ensemble tout ce qu’il y a de beau dans l’ode pour la magnificence du style, et tout ce que l’épigramme a de grâce pour sa brièveté. » Ce qui est dit ici de la magnificence de l’ode et de la brièveté de l’épigramme manque assurément d’exactitude ; mais il est vrai qu’on cherche à mettre à la fin du sonnet, et même dans ses différentes sections, quelque pensée vive et ingénieuse, comme dans les épigrammes et les madrigaux dont nous parlerons tout à l’heure.
C’est ainsi qu’en général les écrivains sages et froids, qui, dans leur marche compassée, affectent le goût, en manquent souvent ; ils évitent les écarts et les fautes ; mais, incapables d’un vrai sublime ou d’une noble simplicité, ils ont recours à des agréments froids et recherchés, qui ne valent pas mieux que des fautes, et sont plus contagieux, parce qu’ils sont moins choquants.
Le soldat anglais, bien nourri, bien dressé, tirant avec une remarquable justesse, cheminant lentement parce qu’il est peu formé à la marche, et manque d’ardeur propre, est solide, presque invincible dans certaines positions où la nature des lieux seconde son caractère résistant ; mais il devient faible si on le force à marcher, à attaquer, à vaincre de ces difficultés qu’on ne surmonte qu’avec de la vivacité, de l’audace et de l’enthousiasme.
Ce ne sont pas seulement des hommes à combattre ; ce sont des montagnes inaccessibles ; ce sont des ravines et des précipices d’un côté ; c’est de l’autre un bois impénétrable, dont le fond est un marais ; et derrière, des ruisseaux, de prodigieux retranchements ; ce sont partout des forts élevés, et des forêts abattues qui traversent des chemins affreux ; et au-dedans, c’est Merci 16 avec ses braves Bavarois, enflés de tant de succès et de la prise de Fribourg ; Merci, qu’on ne vit jamais reculer dans les combats ; Merci, que le prince de Condé et le vigilant Turenne 17 n’ont jamais surpris dans un mouvement irrégulier, et à qui ils ont rendu ce grand témoignage, que jamais il n’avait perdu un seul moment favorable, ni manqué de prévenir leurs desseins, comme s’il eût assisté à leurs conseils. […] Loin de conclure que le monde ne saurait faire des heureux, et qu’il faut chercher ailleurs le bonheur où nous aspirons, et que le monde ne saurait nous donner, nous nous y promettons toujours ce qui nous manque et ce que nous souhaitons : nous charmons nos ennuis présents par l’espoir d’un avenir chimérique ; et par une illusion perpétuelle et déplorable, nous rendons toujours inutiles les dégoûts que Dieu répand sur nos passions injustes, pour nous rappeler à lui par des espérances que l’événement dément toujours, mais où nous prenons de notre méprise même l’occasion de tomber dans de nouvelles ». […] Il ne manquera pas alors de peindre avec force, de rendre son discours passionné, et d’émouvoir, par ce moyen, les passions de ses auditeurs. […] Jetez les yeux de toutes parts ; voilà ce qu’ont pu faire la magnificence et la piété, pour honorer un héros : des titres, des inscriptions, vaines marques de cc qui n’est plus ; des figures qui semblent pleurer autour d’un tombeau, et de fragiles images d’une douleur que le temps emporte avec tout le reste ; des colonnes qui semblent vouloir porter jusqu’au ciel le magnifique témoignage de notre néant : et rien enfin ne manque dans tous ces honneurs, que celui à qui on les rend.
Dans le monologue, l’individu se parle à lui-même ; il pense tout haut : les monologues trop longs manquent de naturel. […] S’il dégénère en discours efféminés, en fades conversations, comme dans la Mort de Pompée, de Corneille, et dans l’Œdipe de Voltaire, il produit un effet tout contraire au but de la tragédie ; il manque d’intérêt et de pathétique.
., rien d’agréable n’y manque ; tout y est de la plus grande beauté ; tout s’y réunit pour tenir nos yeux dans une espèce d’enchantement.
Sur l’orgueil À mademoiselle d’Aubigné 1 Chantilly, 11 mai 1693 Je vous aime trop, ma chère nièce, pour ne pas vous dire tout ce que je crois qui pourra vous être utile, et je manquerais bien à mes obligations si, étant tout occupée des demoiselles de Saint-Cyr, je vous négligeais, vous que je regarde comme ma propre fille.
Sa Galatée et son Estelle sont des pastorales où ne manquent ni la grâce ni l’esprit ; ses arlequinades ont de la malice et de la gaieté.
Je partis hier assez matin de Paris, j’allai dîner à Pomponne : j’y trouvai notre bonhomme qui m’attendait ; je n’aurais pas voulu manquer de lui dire adieu. […] Il aime la paroisse, il fréquente les temples où se fait un grand concours ; on n’y manque point son coup, on y est vu. […] L’harmonie ne fait ni le fond, ni le ton du style : elle peut trouver dans des écrits vides de sens : Les règles ne peuvent suppléer au génie : s’il manque, elles seront inutiles.
Ce ne sont pas seulement des hommes à combattre : ce sont des montagnes inaccessibles, ce sont des ravines et des précipices, d’un côté ; c’est, de l’autre, un bois impénétrable, dont le fond est un marais, et derrière, des ruisseaux, de prodigieux retranchements : ce sont partout des forts élevés et des forêts abattues qui traversent des chemins affreux ; et au-dedans, c’est Merci avec ses braves Bavarois, enflés de tant de succès et de la prise de Fribourg : Merci, qu’on ne vit jamais reculer dans les combats ; Merci, que le prince de Condé et le vigilant Turenne n’ont jamais surpris dans un mouvement irrégulier, et à qui ils ont rendu ce grand témoignage, que jamais il n’avait perdu un seul moment favorable, ni manqué de prévenir leurs desseins, comme s’il eût assisté à leurs conseils.
Il reprenait aussi le sien ; mais la lampe infidèle, éteinte avant le jour, ne tardait pas à lui manquer de nouveau ; alors il s’approchait du four ouvert et enflammé, et continuait, à ce rude soleil, la lecture de Tite-Live ou de César.
Que le moindre clocher sonne le glas d’alarmes ; Que chacun sous son toit se dresse avec ses armes ; Que tout hameau lointain vierge de l’étranger Coure au-devant du flot qui nous veut submerger ; ……………… Que tout homme jaloux d’une sœur, d’une femme, Ayant à lui son champ et sa fierté dans l’âme ; Que tout chef d’une race, et tout enfant pieux Qui sait sous quel gazon reposent ses aïeux, Jurant de recouvrer cette place usurpée, Frappe un coup de sa faux, s’il manque d’une épée.
Le millésime manque.
Ce qui me perd aujourd’hui, ce n’est pas le défaut de moyens, mais le manque d’audace et d’impudence, indispensables pour s’en servir : c’est de n’avoir pas flatté vos oreilles par des choses agréables, de ne vous avoir pas offert le spectacle de Socrate pleurant et gémissant à vos pieds… Que d’autres accusés emploient ces moyens : ils sont indignes de moi.
Mais en même temps, il ne manquait ni de talent, ni d’énergique volonté ; il sentit qu’il s’égarait, il commanda à sa passion, l’homme fit place à l’orateur, et l’assemblée émue lui prouva que, pour communiquer aux autres son indignation, il faut d’abord la dominer soi-même.
Guerrier, poête, négociateur, théologien, historien, romancier et sectaire, ce gentilhomme a parmi ses contemporains la taille d’un héros auquel manqua seulement ce bon sens politique qui sauva, par le génie d’Henri IV, la religion et la royauté, c’est-à-dire la France d’alors.
Ceux qui la suivaient et qui avaient faveur à la cour avaient peur d’être oubliés dans la commune persécution ; ils allaient s’accuser eux-mêmes, s’ils manquaient de délateurs.
Plus d’un génie a dû manquer d’entrain.
Le bas, c’est tout ce qui manque d’élévation, de dignité, de convenance. […] Le style est forcé, quand on emploie mal les figures et qu’on les multiplie sans nécessité ; la pensée est forcée, quand elle manque de naturel. […] Si une syllabe manque à un vers, il y a défaut de mesure, la mesure n’y est pas. […] Si la césure est placée sans goût pour le simple besoin de la phrase, pour obtenir un effet puéril, ridicule, ou pour arrêter la pensée sur un objet horrible, monstrueux, etc., elle manque totalement son but et devient une faute impardonnable. […] ……… Le juge prétendait qu’à tort et à travers On ne saurait manquer, condamnant un pervers.
Il ne lui manqua aucun des talents nécessaires pour les affaires privées ou publiques. […] Les Germains ont tous la même apparence extérieure, des yeux bleus et farouches, des cheveux roux, une taille élevée, une vigueur qui ne se soutient que dans le premier choc ; la constance à supporter la fatigue et les travaux leur manque, et surtout ils ne savent pas endurer la soif et la chaleur, le froid et les privations.
Pour moi, je ne sais ce que c’est que de manquer à ma parole, et je garde mon sérieux, comptant bien que vous tenez le vôtre : je trouverais fort mauvais qu’il en fût autrement. […] Une telle narration manque aussi de brièveté ; car un récit est bref, non quand il est court, mais quand il ne contient rien d’inutile. […] Avouons-le pourtant : malgré l’exquise sensibilité de cette élégie, il y manque un sentiment qui lui eût communiqué une émotion plus vive, plus vraie, plus séduisante : c’est le sentiment religieux, le sentiment chrétien.
Fléchier ne manque ni de force ni d’élévation dans ses Oraisons funèbres. […] C’est ce que n’a jamais manqué de faire Cicéron, le vrai modèle des orateurs du barreau. […] Le style de ces sortes d’éloges doit être élégant, plein de noblesse, mais en même temps simple, sans manquer de chaleur.
Je sais bien qu’il manque encore beaucoup à ce livre, qu’il répond mal au travail que j’y ai dépensé, qu’en un mot, comme bien d’autres choses humaines, institutions, révolutions et plaisirs, il ne vaut pas ce qu’il a coûté.
Les Romains ont un certain nombre d’historiens abréviateurs qui ne manquent pas de mérite : Velléius Paterculus, qui florissait vers l’an 50 de Jésus-Christ ; Florus, qui vivait sous Trajan ; Aurélius Victor et Eutrope, qui vivaient dans la seconde moitié du ive siècle. […] Millot était de l’Académie française ; il écrivait très purement ; et, si son style manquait un peu d’animation, on peut dire que c’est dans le genre qui en a le moins besoin.
Il faut donc tâcher d’arrêter les divisions et les querelles dans leur naissance même ; et l’amour-propre ne manque jamais de nous suggérer, sur ce sujet, que le moyen d’y réussir serait de corriger ceux qui nous incommodent, et de les rendre raisonnables en leur faisant connaître qu’ils ont tort d’agir avec nous comme ils font.
S’il a trop manqué de ces vertus civilisées qui décorent la bravoure dans un Catinat, il sut se faire aimer du soldat, et lui « mettre des ailes au talon, du cœur au ventre ».
En ce qui me concerne, je ne manquerai pas de le recommander aux professeurs de mes petits séminaires et de mes établissements d’éducation religieuse.
Celui dont le cœur est dur ou manque de délicatesse, qui ne sait point admirer ce qui est grand et généreux, qui ne partage point les sentiments doux et tendres, sentira toujours faiblement les beautés les plus sublimes de l’éloquence et de la poésie.
N’y manquez pas, au moins. […] Souvent, d’après Boileau ; — Horace avait dit : « Quand on manque d’art, » In vitium ducit culpœ fuga, si caret arte.
Un trait manque encore, pour achever de caractériser l’esprit philosophique.
Comme il n’y a point, en effet, d’impression plus forte, lorsqu’on parvient à la produire, il n’y en a point qui refroidisse davantage, quand l’effet est manqué.
Ce serait un manque de tact qui friserait l’impolitesse.
A cette noble fierté, tempérée d’une tristesse sévère, il ne manque que le rayon, l’humble désir qui appelle la bénédiction d’en haut sur l’humaine sueur et qui fait demander le pain quotidien.
L’expression manque ici de grâce.
S’il en est où l’idée de Dieu ne soit mêlée, il s’y trouve toujours quelque défaut ou quelque excès ; il y manque le nombre, le poids ou la mesure, toutes choses dont l’exactitude est divine. » Joubert.
La vertu et le malheur de l’un et de l’autre sont semblables ; et il ne manque aujourd’hui à ce dernier qu’un éloge digne de lui.
On remarque souvent chez un enfant, un ouvrier, un homme d’État, quelque chose qu’on ne qualifie pas d’abord du nom d’esprit, parce que le brillant y manque, mais qu’on appelle l’intelligence, parce que celui qui en paraît doué saisit sur-le-champ ce qu’on lui dit, voit, entend à demi-mot, comprend, s’il est enfant ce qu’on lui enseigne, s’il est ouvrier l’œuvre qu’on lui donne à exécuter, s’il est homme d’État les événements, leurs causes, leurs conséquences, devine les caractères, leurs penchants, la conduite qu’il faut en attendre, et n’est surpris, embarrassé de rien, quoique souvent affligé de tout.
D’abord, de ce que le nombre de ces livres est peu étendu, il s’ensuit que chacun doit être lu plus d’une fois : Si jamais , dit Sénèque, vous quittez les auteurs estimés pour en lire d’autres, ne manquez pas de revenir aux premiers.
Ce n’est pas qu’il manquât de génie : ses lumières égalaient son courage ; mais il n’avait jamais été instruit par la mauvaise fortune ; ses maîtres avaient empoisonné par la flatterie son beau naturel. […] Il ne vous manquait plus que d’être hypocrite pour vous achever de tout point, et voilà le comble des abominations.
Les troupes anglaises, commandées par le captal de Buch, avaient en abondance des provisions de toute sorte ; les troupes françaises, commandées par Duguesclin, manquaient de tout et mouraient de faim. […] Les assiégeants manquent de vivres. […] Malgré le chagrin qui l’accablait, Basile ne voulut pas manquer à un usage consacré, en quelque sorte, par la religion. […] Le lendemain, Isadas est accusé devant le sénat : « Il a manqué à ses devoirs d’élève en quittant le gymnase ; il a manqué aux devoirs d’un citoyen en prenant les armes sans autorisation, et enfin, si on voulait le considérer comme soldat, il serait encore coupable comme ayant combattu sans ordre et sans chef. » Accuser Isadas est une tâche facile. […] Je me retirais toujours dans les campagnes et dans les vignes les plus reculées, offrant le travail de mes mains à qui voulait l’acheter ; pendant l’été, je n’étais pas en peine, mais pendant l’hiver les moyens me manquaient.
… » Ils manquaient de variété. […] Ils croiront que je suis un méchant, un brutal, que je te laisse manquer de tout, que je te bats, que je t’assomme (gradation) ; mais non, ils savent bien que je t’aime, que j’ai bon cœur, que je décide de te voir tranquille et contente (correction). […] Corneille a le génie, mais le goût lui manque quelquefois.
Dans un fragment sur la guerre des dieux contre les géants, ce boursouflé déclamateur nous représente un de ces derniers faisant voler dans les airs l’île de Lemnos, avec tout l’atelier de Vulcain ; un autre arrachant le mont Ida avec ses forêts et ses fleuves ; et le poète ne manque pas d’observer que, tandis que la montagne était sur les épaules du géant, une de ses rivières coulait le long de son dos, etc. — Milton a transporté cette même fiction dans son Paradis Perdu, mais en l’ennoblissant par les détails, et en la relevant par le choix des expressions.
Mais ce n’est pas sa faute ; il ne lui a manqué que le dernier coup, le coup qui aurait épuisé le reste de son sang et de sa vie.
Je ne sais si Horace pardonnait à Plaute les scènes en patois carthaginois de son Pœnulus, mais la Bruyère disait de Molière : « Il ne lui a manqué que d’éviter le jargon et d’écrire purement ; » et Marmontel, en justifiant d’ailleurs sur ce point Molière, Dufresny, Dancourt, et, du même trait, nos vaudevillistes du jour, ne permet pourtant l’emploi du jargon villageois, même dans la comédie, qu’à deux conditions : s’il contribue au comique de situation, ou s’il marque une nuance de simplicité dans les mœurs, comme dans l’Ecole des femmes, par exemple, où il sert à distinguer la simplicité grossière de Georgette de la naïveté d’Agnès.
Alors les aperçus dogmatiques des siècles antérieurs ne se conservent que dans les préjugés du peuple et des classes qui lui ressemblent par leur manque de lumières ; ils se perpétuent surtout dans quelques doctrines qui, pour cacher leur faiblesse, aiment à se couvrir d’un voile mystique.
Ceux qui se mêlent de donner des préceptes se doivent estimer plus habiles que ceux auxquels ils les donnent ; et s’ils manquent en la moindre chose, ils en sont blâmables.
mon ami, vous m’avez prouvé qu’il y avait en Angleterre des gens d’esprit, et je trouverai peut-être l’occasion, une autrefois, de vous prouver qu’il y a en France des gens de bon sens. » Je vous conte cette histoire à la hâte ; mettez à mon récit toutes les grâces qui y manquent, et puis, quand vous le referez à d’autres, il sera charmant.
Le sol emporté devant nous manque à nos pas, tandis que d’autres colonnes de sable, enlevées derrière nous, roulent sur nos têtes.
4° Pour les locutions familières, les expressions proverbiales, les phrases toutes faites et les noms propres composés : Le juge prétendait qu’à tort et à travers On ne saurait manquer, condamnant un pervers. […] Ny manquez pas du moins : J’ai quatorze bouteilles D’un vin vieux… Boucingot n’en a pas de pareilles.
Cette ode s’appuie toujours, dans les leçons qu’elle donne, sur des exemples sensibles ; d’un autre côté, pour l’homme de bien, et surtout pour le chrétien, elle ne peut manquer d’avoir un caractère plus ou moins religieux : voilà pourquoi elle se rapproche de l’ode héroïque et surtout de l’ode sacrée. […] Nos anciens poètes du temps de Ronsard, qui se faisaient gloire de parler grec en français, ne manquèrent pas d’essayer aussi des dithyrambes ; mais ni notre langue, ni notre imagination, ni notre goût ne se sont prêtés à cette docte extravagance.
Mais, comme le remarque M. de La Harpe, d’après le judicieux Rollin, qui l’avait observé avant lui, les mœurs républicaines autorisaient cette licence ; et ni Démosthène ni Eschine n’ont manqué par conséquent au précepte de l’art, qui défend de violer les convenances reçues.
tout l’effet de cette explosion d’éloquence serait manqué sans l’admirable préparation oratoire qui l’amène.
Il est minuit ; Fiesque, le chef de la conjuration, visite une dernière fois sa flotte ; en passant d’un navire à l’autre, le pied lui manque, il tombe et disparait à jamais sous les flots ; c’est-à-dire que le hasard inintelligent, brutal, vient anéantir en un instant, sans lutte possible, toutes les combinaisons des passions et des volontés humaines.
Les preuves faibles sont la plupart étrangères au sujet ; s’en servir, ce serait faire soupçonner que l’on manque de preuves fortes et conciliantes.
Péroraison de l’Éloge funèbre du Prince de Condé Jetez les yeux de toutes parts ; voilà tout ce qu’a pu la magnificence et la piété pour honorer un héros : des titres, des inscriptions, vaines marques de ce qui n’est plus ; des figures qui semblent pleurer autour d’un tombeau, et de fragiles images d’une douleur que le temps emporte avec tout le reste ; des colonnes qui semblent vouloir porter jusqu’au ciel le magnifique témoignage de notre néant ; et rien enfin ne manque dans tous ces honneurs que celui à qui on les rend.
Gandar) : « Nous manquons de tant de choses, que nous serions toujours dans l’affliction, si Dieu ne nous avait donné l’espérance, comme pour charmer nos maux et tempérer par quelque douceur l’amertume de cette vie.
Ramsay, élève de ce célèbre archevêque, m’a écrit ces mots : « S’il était né en Angleterre, il aurait développé son génie, et donné l’essor sans crainte à ses principes, que personne n’a connus. » Citons encore M. de Sacy : « Le Télémaque est le livre d’un grand poëte, d’un sage, d’un homme de génie, auquel a manqué pourtant l’une des plus précieuses qualités : la candeur, la vraie simplicité d’âme, une certaine naïveté de bon sens, qui fera le charme éternel d’Homère et de Bossuet.
Maillet, à qui il ne manque que de la paresse, du relâche, de la détente de tête, pour travailler admirablement, et qui a travaillé avec autant d’éloquence que de courage, il y a vingt ans, contre la tyrannie de l’époque, comme l’attestent des opuscules, dont je vous ai remis, il y a dix ans, un exemplaire qui vous aurait fait connaître son mérite si vous l’aviez lu, mais que vous n’avez pas lu, parce que, occupé comme vous l’êtes, vous ne lisez rien, et je crois que vous faites bien, par une prérogative qui n’appartient qu’à vous ; M.
C’est ce qu’on va voir dans ce morceau d’une jolie épître de Piron, intitulée les Plaisirs du prieuré de… Rien ne manque aux délicats ; Cuisine en ragoûts féconde, Table où tout nectar abonde, Et la glacière à deux pas ; Les lits les meilleurs du monde, Plume entre bons matelas, Doux sommeil entre deux draps ; Un calme dont rien n’approche ; Jamais le moindre fracas De carrosse ni de cloche ; Paix, bombance, liberté, Liberté sans anicroche ; L’horloge à la vérité Rarement est remonté238, Mais souvent le tournebroche. […] Il en a mis plusieurs en vers : cette imitation ne manque ni de mouvement ni de chaleur, et peut figurer à côté de l’original. […] La Motte a fait dans le genre sublime des odes qui manquent d’élévation, de chaleur et de génie.
Ce que dit un historien au sujet de Pompée est outré et excessif : Telle fut la fin du grand Pompée, après trois consulats et autant de triomphes, et après avoir dompté l’univers ; la fortune s’accordant si peu avec elle-même à l’égard de ce héros, que la terre qui venait de lui manquer pour ses victoires, lui manqua pour sa sépulture.
Vous serez pour nos neveux, comme vous l’avez été pour nous, un sujet éternel de division : les uns vous éléveront jusqu’au ciel ; les autres diront qu’il vous a manqué ce qu’il y a de plus glorieux, de guérir les maux de la patrie ; ils diront que vos grands exploits peuvent appartenir à la fortune, et que vous n’avez pas fait ce qui n’aurait appartenu qu’à vous.
Aussi ne manque-t-il jamais l’occasion de coudre, d’une manière quelconque, un lieu commun à sa narration ; et si l’on retranchait de ses discours les plus vantés tout ce qui n’est que dissertations vagues, définitions, analyses, etc., on réduirait à un bien petit nombre de pages la plus longue de ces productions.
Fontenelle même, bien qu’on puisse lui reprocher quelque manière, surtout dans la Pluralité des mondes, ne manque pourtant point à ce principe.
Cette autre, de de Cailly, quoique portant sur un jeu de mots, est très mordante : il s’agit des rentes sur l’Hôtel-de-ville qui, dans l’ancien régime, n’étaient pas payées très exactement ; et quand l’argent manquait, un arrêt du conseil retranchait tout simplement un terme aux rentiers.
C’est ainsi qu’en général les écrivains sages et froids, qui, dans leur marche compassée, affectent le goût, en manquent souvent ; ils évitent les écarts et les fautes ; mais, incapables d’un vrai sublime ou d’une noble simplicité, ils ont recours à des agréments froids et recherchés, qui ne valent pas mieux que des fautes, et sont plus contagieux, parce qu’ils sont moins choquants.