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19. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome II (3e éd.) « Seconde partie. Des Productions Littéraires. — Section II. Des Ouvrages en Vers. — Chapitre II. Des petits Poèmes. »

Lorsque satisfait de mes faibles soins pour le repos de ta vieillesse cassée, tu verses des larmes de joie ; lorsque tournant tes regards vers le ciel, tu me donnes ta bénédiction d’un air content, ah ! […] Mes regards obscurcis n’ont pas encore longtemps à vous parcourir ; bientôt je vous quitterai pour d’autres campagnes plus heureuses. […] C’est alors qu’une fureur poétique le transporte ; une ardeur divine l’embrase ; le voilà dans ces moments heureux pour le génie : toute la nature se découvre à ses regards ; il va en épuiser les richesses, et répandre sur tous les objets cet esprit de vie qui les anime, et ces grands traits qui les font paraître avec toute la perfection imaginable. […] Au feu de ses regards, au son de sa parole,                      Les Philistins307 ont fui. […]                      Les ennemis de sa gloire                      Sont vaincus de toutes parts :                      La pompe de sa victoire                      Frappe leurs derniers regards.

20. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Extraits des classiques français. Deuxième partie. Poésie — La Fontaine 1622-1695 » pp. 339-378

  Sans lui, j’aurais fait connaissance Avec cet animal qui m’a semblé si doux8   Il est velouté comme nous, Marqueté, longue queue9, une humble contenance, Un modeste regard, et pourtant l’œil luisant. […] Sous un sourcil épais il avait l’œil caché, Le regard de travers, nez tortu, grosse lèvre. […] Car, sachez que les immortels Ont les regards sur nous. […] Tout à coup le nom d’un parent, d’un ami, vient frapper nos regards : alors nous nous écrions ; alors le fait général se singularise, et prend une signification fatale ; alors cette mort se sépare et se distingue des autres par le sentiment qu’elle nous inspire. […] C’est en vain que vous me vantez les belles montagnes de la Suisse ou des Pyrénées, les lacs de l’Italie septentrionale, la mer Méditerranée vue des hauteurs de Sorrente, les grands bois, les eaux limpides, la neige sur la montagne, le soleil dans la vallée : tout cela charme un instant mes regards.

21. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Chateaubriand, 1768-1848 » pp. 409-427

À son front orné de deux croissants, à sa barbe antique et limoneuse, vous le prendriez pour le dieu mugissant du fleuve, qui jette un regard satisfait sur la grandeur de ses ondes et la sauvage abondance de ses rives1. […] Suspendus sur le cours des ondes, groupés sur les rochers et sur les montagnes, dispersés dans les vallées, des arbres de toutes les formes, de toutes les couleurs, de tous les parfums, se mêlent, croissent ensemble, montent dans les airs à des hauteurs qui fatiguent les regards. […] Mariant leurs parfums, leurs formes, leurs couleurs, Suspendus sur les eaux, groupés sur les montagnes, Mille arbres différents, dans ces riches campagnes, Charmeront tes regards ; sur leurs dômes épais, Le beau magnolia, noble roi des forêts, Lève son front paré de roses virginales.

22. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Lacordaire, 1802-1861 » pp. 542-557

Ce regard jeté à la fois sur notre excellence et sur sa cause nous maintient dans une grandeur sérieuse, qui nous remplit sans nous éblouir, à la différence de cette fausse gloire qui ne vient pas de la justice, mais de la faveur du peuple ou des événements, et qui, nous revêtant d’une pourpre mensongère, nous exalte d’autant plus qu’elle est moins méritée. […] Ainsi, aux jours du moyen âge, on voyait des chrétiens quitter leur patrie pour se donner à quelque cathédrale qui se bâtissait sur les bords d’un fleuve étranger ; contents de leur journée, parce qu’elle avait servi, ils regardaient, le soir, de combien l’œuvre s’était avancée vers Dieu, et, lorsque, après vingt ou trente ans d’un obscur travail, la croix brillait au sommet du sanctuaire élevé de leurs mains, ils y jetaient un dernier regard, et, prenant leurs enfants et leurs souvenirs, ils s’en allaient, sans laisser leur nom, mourir en paix dans la bienheureuse pensée d’avoir fait quelque chose pour Dieu1. […] L’homme est là tout entier, avec son élan, sa passion, son indépendance, son imagination, son esprit d’entreprise et d’enthousiasme, sa hauteur de caractère, digne en un mot des regards de la postérité.

23. (1853) Principes de composition et de style (2e éd.) « Seconde partie. Étude des genres de littérature, en vers et en prose. — Chapitre XIII. Genre oratoire, ou éloquence. »

Il faut observer que l’éloquence peut exister indépendamment de la parole ; il suffit de l’émotion pour en produire l’effet : ainsi, il y a l’éloquence du regard, l’éloquence du geste, l’éloquence des larmes, et même l’éloquence du silence. […] Devant un peuple assemblé, l’éloquence prend un autre ton, un autre caractère ; elle s’adresse moins à la logique qu’à la passion ; elle emprunte plus de puissance à la voix, au geste, au regard, aux images, qu’à l’enchaînement des mots et des idées ; elle sait que son triomphe tient à l’ébranlement momentané des cœurs.

24. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Madame de Staël, 1766-1817 » pp. 399-408

En contemplant le regard de Niobé4, de cette douleur calme et terrible qui semble accuser les dieux d’avoir été jaloux du bonheur d’une mère, quel sentiment s’élève dans notre sein ! […] Elle rédigeait un bulletin de nouvelles pour le jeune souverain qui avait visité Paris et ne pouvait détacher ses regards de cette capitale du plaisir et des arts.

25. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Diderot, 1713-1784 » pp. 303-312

Allez à la campagne, tournez vos regards vers la voûte des cieux, observez alors sa physionomie, et vous jurerez qu’on a détaché une partie de la grande toile lumineuse que le soleil éclaire, pour la transporter sur le chevalet de l’artiste ; ou fermez votre main, et faites-en un tube qui ne vous laisse apercevoir qu’un espace limité de l’horizon, et vous jurerez que c’est un tableau de Vernet, qu’on a pris sur son chevalet et transporté dans le ciel. […] Alors sa bouche se serait entr’ouverte, ses regards distraits se seraient portés au loin, le travail de sa tête fortement occupée se serait peint sur son visage ; et Michel eût fait une belle chose.

26. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Guizot. Né en 1787. » pp. 469-478

Victor Hugo parle ainsi de l’Histoire : Muse, il n’est point de temps que tes regards n’embrassent ; Tu suis dans l’avenir leur cercle solennel ; Car les jours et les ans, et les siècles ne tracent Qu’un sillon passager dans le fleuve éternel. […] Quand l’orateur souverain, pris d’une subite pensée, montait à la tribune ; quand cet homme se trouvait face à face avec son peuple ; quand il était là debout ; quand son regard sardonique et lumineux, fixé, du haut de cette tribune, sur les hommes et sur les idées de son temps, avait l’air de mesurer la petitesse des hommes sur la grandeur des idées, alors il n’était plus ni calomnié, ni hué, ni injurié ; ses ennemis avaient beau faire, avaient beau dire, avaient beau s’ameuter contre lui, le premier souffle de sa bouche ouverte pour parler faisait crouler tous ces entassements.

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