… « Si mon dénonciateur suborne un témoin, que ce soit un homme simple et droit, que l’horreur des cachots n’empêche pas de revenir à la vérité, dont on l’aura un moment écarté. » Telle eût été ma prière ardente ; et si ces vœux avaient été exaucés, encouragé par tant de condescendance, j’aurais ajouté : « Suprême bonté, s’il est encore écrit que quelque intrus doive s’immiscer dans cette horrible affaire et prétendre à l’honneur de l’arranger, en sacrifiant un innocent et me jetant moi-même dans des embarras inextricables, je désirerais que cet homme fût un esprit gauche et lourd ; que sa méchanceté maladroite l’eût depuis longtemps chargé de deux choses incompatibles jusqu’à lui, la haine et le mépris public. […] Un de ses derniers billets À Collin d’Harleville 3 Pour lire un joli poëme, s’amuser d’un ouvrage, il faut, mon cher citoyen, avoir le cœur sérieux, la tête libre ; et bien peu de ces doux moments sont réservés à la vieillesse.
L’histoire nous montre souvent le spectacle d’une population riche et croissante au milieu des combats les plus meurtriers ; mais il y a des guerres vicieuses, des guerres de malédictions, que la conscience reconnaît bien mieux que le raisonnement : les nations en sont blessées à mort, et dans leur puissance, et dans leur caractère ; alors vous pouvez voir le vainqueur même dégradé, appauvri, et gémissant au milieu de ses tristes lauriers, tandis que sur les terres du vaincu, vous ne trouverez, après quelques moments, pas un atelier, pas une charme qui demande un homme. » 1. […] C’est d’elle que viennent toutes les palpitations généreuses des antres peuples, tous les changements insensibles du mal au bien qui s’accomplissent parmi les hommes en ce moment, et qui épargnent aux États des secousses violentes.
Quand la vérité du jour ou du moment devenait difficile à aborder en face, vous l’avez quelquefois adroitement tournée, et vous avez dû prendre les nuances au lieu de grands traits, sachant faire applaudir même ce que vous ne disiez pas. […] L’histoire, la biographie, les détails de mœurs vivifient sa critique : une inflexible morale, un dévouement vrai et de cœur à tout ce qui honore, console et relève l’humanité, à la liberté, à la religion, à la vérité, semblent rendre encore son goût plus pur et plus sévère ; cet enchaînement de tableaux historiques, d’anecdotes racontées avec l’esprit le plus brillant, de réflexions morales et d’analyses judicieuses et profondes, qui se mêlent sans confusion, conduit le lecteur jusqu’au bout du livre sans qu’il ait un moment l’envie de s’arrêter.
Un tel classique a pu être un moment révolutionnaire, il a pu le paraître du moins, mais il ne l’est pas ; il n’a fait d’abord main basse autour de lui ; il n’a renversé ce qui le gênait que pour rétablir bien vite l’équilibre au profit de l’ordre et du beau. […] Les admirations contemporaines les plus unanimes et les mieux méritées ne peuvent rien contre ; la résignation la plus humble, comme la plus opiniâtre résistance, ne hâte ni ne retarde ce moment inévitable, où le grand poëte, le grand écrivain entre dans la postérité, c’est-à-dire où les générations dont il fut le charme et l’âme cédant la scène à d’autres, lui-même il passe de la bouche ardente et confuse des hommes à l’indifférence, non pas ingrate, mais respectueuse qui, le plus souvent, est la dernière consécration des monuments accomplis.
Si quelques morceaux paraissent, au premier abord, placés hors de la série qui leur convient, nous répondrons, d’un côté, qu’il est bon de surprendre quelquefois les jeunes gens par des difficultés qui les retrempent, qui les exaltent, qui les prémunissent contre une indolente sécurité : de l’autre, qu’il est juste de ménager, de loin en loin, par un travail plus facile, des moments de repos à l’intelligence, qui ne doit pas être tendue par de continuels efforts.
. — Voltaire, Lettre à Maffei, en tête de sa Mérope : « Aristote, cet esprit si étendu, si juste et si éclairé dans les choses qui étaient alors à la portée de l’esprit humain, Aristote, dans sa Poétique immortelle, ne balance pas à dire que la reconnaissance de Mérope et de son fils était le moment le plus intéressant de toute la scène grecque.
Pour peu qu’on réfléchisse un moment, il est aisé de s’en convaincre. […] En voici un exemple divertissant : Au moment d’aborder sa péroraison, un prédicateur Lyonnais apercevant un chien qui rôdait dans l’église en cherchant son maître, et détournait visiblement l’attention de l’auditoire, s’interrompit pour dire au Suisse : héros de l’Helvétie, chassez ce symbole de la fidélité. […] II est hors de lui réellement, car son âme l’a quitté peut-être un moment pour aller embrasser celle de ses sœurs qui a fait entendre un son divin, et l’a laissé seul avec la parole humaine qui est impuissante à vous satisfaire. […] Et tous trois à l’envi s’empressaient ardemment A qui dévorerait ce règne d’un moment. […] Elles ne sont jamais plus belles que lorsqu’on ne les voit pas, selon le précepte de Boileau : Dans les transitions la muse toujours sage, Sait cacher au lecteur le moment du passage.
J’ai acheté les deux ouvrages nouveaux, et je lis en ce moment celui de votre ami. […] Il ne faut jamais répéter on avec deux rapports différents : = on croit n’être pas trompé ; et l’on nous trompe à tout moment. […] Dites plutôt : on croit n’être pas trompé, et l’on est trompé à tout moment. […] Ainsi Racine a fort bien dit : Faites qu’en ce moment je lui puisse annoncer, Un bonheur où peut-être il n’ose plus penser. […] Ceux qui, dans ce moment, se présentent à ma mémoire, sont les participes ri et plus.