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27. (1853) Petit traité de rhétorique et de littérature « Chapitre XI. Grands poèmes. »

Il faut donc que le poète, pour instruire, y mette de l’ordre et de la méthode ; que, pour instruire en poète, c’est-à-dire pour plaire en même temps qu’il instruit, il fasse usage des ornements que peut fournir le langage des muses. […] Outre la beauté continue du style, il y a des ornements spéciaux à la poésie didactique : ce sont les épisodes et les descriptions épisodiques. […] L’histoire ne souffre point les ornements empruntés de l’art ; on veut, au contraire, que l’épopée charme, plaise, touche, étonne. […] Forme de l’épopée régulière. — Style. — Ornements. […] Il emploie avec succès le vrai, le vraisemblable, le possible et l’impossible, qu’il présente d’une façon vague et comme dans un nuage, pour dérober à l’esprit la contradiction des idées138 ; et au milieu de ces inventions, il doit toujours conserver les qualités générales de la narration, savoir la brièveté, la clarté, la vraisemblance ; et ses ornements, qui consistent dans les pensées, les expressions, les tours, les allusions, les allégories, etc.

28. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section deuxième. La Tribune du Barreau. — Chapitre VI. D’Aguesseau et Séguier. »

Les ornements se présentent d’eux-mêmes sous la plume de l’écrivain sagement philosophe, sans qu’il ait besoin de les chercher ; jamais la raison ne s’exprima avec plus de noblesse et de candeur : c’est Démosthène parlant le langage de Platon. […] C’est là qu’il pèse scrupuleusement jusques aux moindres expressions, dans la balance exacte d’une juste et savante critique : c’est là qu’il ose retrancher tout ce qui ne présente pas à l’esprit une image vive et lumineuse ; qu’il développe tout ce qui peut paraître obscur à un auditeur médiocrement attentif ; qu’il joint les grâces et les ornements â la clarté et à la pureté du dicours ; qu’en évitant la négligence, il ne fuit pas moins l’écueil également dangereux de l’affectation ; et que, prenant en main une lime savante, il ajoute autant de force à son discours, qu’il en retranche de paroles inutiles ; imitant l’adresse de ces habiles sculpteurs qui, travaillant sur les matières les plus précieuses, en augmentent le prix à mesure qu’ils les diminuent, et ne forment les chefs-d’œuvre les plus parfaits de leur art, que par le simple retranchement d’une riche superfluité ».

29. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Racine, 1639-1699 » pp. 150-154

Nul goût, nulle connaissance des véritables beautés du théâtre ; les auteurs aussi ignorants que les spectateurs ; la plupart des sujets extravagants et dénués de vraisemblance ; point de mœurs, point de caractères ; la diction encore plus vicieuse que l’action, et dont les pointes et de misérables jeux de mots faisaient le principal ornement ; en un mot, toutes les règles de l’art, celles même de l’honnêteté et de la bienséance, partout violées. Dans cette enfance, ou, pour mieux dire, dans ce chaos du poëme dramatique parmi nous, votre illustre frère, après avoir quelque temps cherché le bon chemin, et lutté, si je l’ose ainsi dire, contre le mauvais goût de son siècle, enfin inspiré d’un génie extraordinaire, et aidé de la lecture des anciens, fit voir sur la scène la raison, mais la raison accompagnée de toute la pompe, de tous les ornements dont notre langue est capable ; accorda heureusement la vraisemblance et le merveilleux, et laissa bien loin derrière lui tout ce qu’il avait de rivaux, dont la plupart, désespérant de l’atteindre, et n’osant plus entreprendre de lui disputer le prix, se bornèrent à combattre la voix publique déclarée pour lui, et essayèrent en vain, par leurs discours et leurs frivoles critiques, de rabaisser un mérite qu’ils ne pouvaient égaler.

30. (1843) Nouvelle rhétorique, extraite des meilleurs auteurs anciens et modernes (7e éd.)

Il n’est point de sorte de récit où les ornements soient mieux placés. […] Pour l’éloquence et la poésie, comme pour l’architecture, il faut que tous les morceaux nécessaires se tournent en ornements naturels ; mais tout ornement qui n’est qu’ornement, est de trop : retranchez-le, il ne manque rien ; il n’y a que la vanité qui en souffre. […] La naïveté admet les ornements du style ; mais elle veut que ces ornements ne se montrent que dans la simplicité de la nature et avec une sorte de négligence. […] On se sert de périphrases pour l’ornement du discours, surtout en poésie. […] avez-vous remarqué ces roses, ces points, ces petits ornements coupés et sans dessein suivi ?

31. (1872) Cours élémentaire de rhétorique

Embellir des ornements du style une pensée naïve, une pensée vive, ce serait leur ravir leur mérite. […] Ces pensées demandent à être revêtues des ornements, des grâces de l’expression. […] Il ne rejette pas tous les ornements, puisqu’il a lui-même ses grâces particulières ; mais il est ennemi des ornements affectés où le travail se montre trop à découvert. […] Il faut que les ornements naissent du sujet et n’aient point un air affecté ni trop recherché. […] Elle sert à l’ornement du discours, et à cet égard les poètes en font un fréquent usage.

32. (1863) Discours choisis ; traduction française par W. Rinn et B. Villefore. Première partie.

Cette maison, avant l’arrivée de Verrès, était si bien décorée, qu’elle faisait l’ornement de la ville même. […] Verrès soupait chez lui : celui-ci avait fait servir son argenterie sans ornement et toute nue, pour n’être pas dépouillé lui-même. […] Et sa passion pour les ornements de lits, elle est incroyable ; car quand même il aurait voulu avoir pour chacune de ses salles à manger, soit à Rome, soit dans ses maisons de campagne, trente lits bien dressés, avec tous les autres ornements d’un repas, il aurait encore paru en trop acheter. […] Il crut que sa maison serait elle-même un ornement de Rome, si elle ne recélait point les ornements d’une ville conquise. […] les ornements des temples et des villes rempliront-ils ses maisons à Rome et à la campagne ?

33. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre premier. Éléments généraux du Goût et du Style. — Chapitre IV. Du Beau et des Plaisirs du Goût. »

Le plus habile des artistes, la nature a recherché la variété dans tous ses ornements, et affecté une espèce de mépris pour la régularité. […] Que l’art ajoute à cette belle scène quelques ornements analogues au ton général du tableau, comme un pont jeté sur la rivière, la fumée qui s’élève du hameau, à travers les arbres, et la vue, dans l’éloignement, de quelque grand édifice, qui réfléchisse majestueusement les rayons du soleil naissant, nous éprouverons tout ce qu’ont de plus doux et de plus aimable les sensations qui caractérisent le beau.

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