La moralité se place indifféremment au commencement ou à la fin. […] Dans le premier cas, il doit employer un style ferme, plein et nerveux ; dans le second, un style fin et enjoué, mais toujours simple, naturel et facile97. […] Si c’était au commencement, elle s’appelait isode, ou pièce d’entrée ; si c’était au milieu, on la nommait embole, ou pièce d’entracte ; si c’était à la fin, on la désignait sous le nom d’exode, ou pièce de sortie. […] Voilà la stance de dix vers octosyllabes revenue ; après elle viendra la stance de quatre alexandrins suivis de deux hexasyllabes, et ainsi jusqu’à la fin. […] Il pousse sa verve avec la même force depuis le début jusqu’à la fin ; mais il n’a peut-être pas assez de ce pliant, de cette souplesse qui donne la grâce ; sa force dégénère quelquefois en dureté119.
Aujourd’hui surtout que l’on nous donne en mille romans la monnaie du vieux poëme épique, comme en mille lithographies et en mille statuettes, celle de la peinture et de la sculpture, le plus mince fabricant de nouvelles croirait déroger en débutant tout bonnement comme les contes de fées : « Il était une fois un roi… ou un bûcheron. » Ouvrez le premier roman venu, vous êtes sûr d’y trouver, après un titre plus ou moins prétentieux, quelque chose comme ceci : « Vers la fin du mois d’octobre dernier, un jeune homme entra dans le Palais-Royal… » ou, pour varier : « Vers la fin du mois de septembre 1800, un étranger arriva devant le palais des Tuileries… » ou bien : « Assez, Caroline, voici la nuit ; remettons à demain vos réflexions sur cette lecture… » ou encore : « Voyez ce brick ! […] Point de flatterie d’ailleurs, si ce n’est fine et convenable ; recourez à la crainte de l’opinion, appuyez ou combattez les préjugés, etc.
Ce serait un plus grand défaut encore que ce qui est dit au commencement, ou au milieu d’un traité, eût besoin d’être éclairci par ce qui est dit à la fin. […] Dans les œuvres de Lucien, né, vers la fin du premier siècle de notre ère, à Samosate, ville de Syrie, et professeur de philosophie et d’éloquence à Athènes, on trouve un petit traité sur la manière d’écrire l’histoire, qui est un chef-d’œuvre. […] N’est-il pas ridicule de voir l’abbé Desfontaines, qui n’avait aucune connaissance en physique, prendre parti dans les querelles des newtoniens et des cartésiens, et écrire ces phrases singulières ou plutôt insensées : Quoique le newtonianisme soit une doctrine qui renverse toute la physique et éteint toutes les lumières que Dieu nous a données sur les propriétés de la matière, sur l’ordre et le mécanisme de la nature, et qu’il soit presque inconcevable qu’il puisse y avoir un homme qui soit newtonien de bonne foi, il faut avouer, cependant, que cette philosophie, hérissée de calculs géométriques et armée de fines observations, ne laisse pas, en plusieurs points, de donner de l’embarras aux cartésiens, et de les mettre souvent sur la défensive.
Comme il sentit sa fin approcher, il pria, par un petit bulletin, sa femme de mander quelques gentilshommes, siens voisins, afin de prendre congé d’eux. […] Une amitié posthume 13 Quoyque des fines gents14 se moquent du soing que nous avons de ce qui se passera icy aprez nous, comme nostre ame, logee ailleurs, n’ayant plus à se ressentir des choses de ça bas15, j’estime toutes fois que ce soit16 une grande consolation à la foiblesse et briefveté de cette vie, de croire qu’elle se puisse farmir1 et alonger par la reputation et par la renommee ; et embrasse tresvolontiers une si plaisante et favorable opinion engendree originellement en nous2, sans m’enquerir curieusement ny comment, ny pourquoi. […] Son humeur visoit encores à une aultre fin : de me rallier avecques le peuple et cette condition d’hommes qui a besoing de nostre ayde ; et estimoit que je feusse tenu de regarder plustost vers celuy qui me tend les bras que vers celuy qui me tourne le dos : et feut cette raison pour quoy5 aussi il me donna à tenir sur les fonts6 à des personnes de la plus abjecte fortune, pour m’y obliger et attacher.
Le premier, (M. de Plaisance), célèbre les vertus de son nouveau « catholicon élaboré, calciné, sublimé au collège de Tolède, électuaire souverain qui surpasse toute pierre philosophale. » Le second, (M. de Pellevé), étale ses ingrédients éventés, « fin galimatias composé tout exprès pour guérir les écrouelles. » A cette scène de tréteaux succède la promenade solennelle qui doit appeler sur l’assemblée les bénédictions d’en haut. […] Je voy je ne sçai quels degoustez de nostre noblesse qui parlent de conserver la religion et l’Estat tout ensemble : et que les Espagnols perdront à la fin l’un et l’autre si on les laisse faire.
Madame Guéton et son frère donnaient de très-bons conseils ; nous étions tous dans la consternation : le feu était si allumé qu’on n’osait en approcher, et l’on n’espérait la fin de cet embrasement qu’avec la fin de la maison de ce pauvre Guitaut. […] Il faut donc à la fin vous le dire : il épouse dimanche, au Louvre, avec la permission du roi, mademoiselle, mademoiselle de... […] Ces importantes questions ne se décident pas par vos demi-mots et par vos branlements de tête, par ces fines railleries que vous nous vantez et par ce dédaigneux souris. […] Il faut se reposer sur celui qui fait tout pour notre bien, par rapport à ses fins cachées. […] Je souhaite de me retirer et de mener désormais une vie plus tranquille, c’est-à-dire plus régulière et plus sainte, Je sens que mon corps s’affaiblit et tend vers sa fin.
Rien n’est encore plus opposé à la véritable éloquence que l’emploi de ces pensées fines et la recherche de ces idées légères, déliées, sans consistance, et qui, comme la feuille du métal battu, ne prennent de l’éclat qu’en perdant de la solidité2. […] Entre ces marais infects qui occupent les lieux bas, et les forêts décrépites qui couvrent les terres élevées, s’étendent des espèces de landes, des savanes qui n’ont rien de commun avec nos prairies ; les mauvaises herbes y surmontent, y étouffent les bonnes ; ce n’est point ce gazon fin qui semble faire le duvet de la terre, ce n’est point cette pelouse émaillée qui annonce sa brillante fécondité : ce sont des végétaux agrestes, des herbes dures, épineuses, entrelacées les unes dans les autres, qui semblent moins tenir à la terre qu’elles ne tiennent entre elles, et qui, se desséchant et repoussant successivement les unes sur les autres, forment une bourre grossière, épaisse de plusieurs pieds. […] Leur bec est une aiguille fine, et leur langue un fil délié ; leurs petits yeux noirs ne paraissent que deux points brillants ; les plumes de leurs ailes sont si délicates qu’elles en paraissent transparentes. […] C’est peu qu’en un ouvrage où les fautes fourmillent, Des traits d’esprit semés de temps en temps pétillent ; Il faut que chaque chose y soit mise en son lieu, Que le début, la fin, répondent au milieu ; Que d’un art délicat les pièces assorties N’y forment qu’un seul tout de diverses parties.