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84. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — La Bruyère 1646-1696 » pp. 100-117

Image naïve des peuples, et du prince qui les gouverne, s’il est bon prince2 Giton ou le riche Giton a le teint frais, le visage plein, et les joues pendantes, l’œil fixe et assuré, les épaules larges, l’estomac haut, la démarche ferme et délibérée : il parle avec confiance, il fait répéter celui qui l’entretient, et il ne goûte que médiocrement tout ce qu’il lui dit ; il déploie un ample mouchoir3, et se mouche avec grand bruit ; il crache fort loin, et il éternue fort haut ; il dort le jour, il dort la nuit, et profondément ; il ronfle en compagnie ; il occupe à table et à la promenade plus de place qu’un autre ; il tient le milieu en se promenant avec ses égaux ; il s’arrête, et l’on s’arrête ; il continue de marcher, et l’on marche ; tous se règlent sur lui ; il interrompt, il redresse ceux qui ont la parole ; on ne l’interrompt pas, on l’écoute aussi longtemps qu’il veut parler, on est de son avis ; on croit les nouvelles qu’il débite. […] Diphile ou la manie des oiseaux Diphile commence par un oiseau, et finit par mille : sa maison n’en est pas égayée, mais empestée ; la cour, la salle, l’escalier, le vestibule, les chambres, le cabinet, tout est volière5 : ce n’est plus un ramage, c’est un vacarme ; les vents d’automne, et les eaux dans leurs plus grandes crues ne font pas un bruit si perçant et si aigu ; on ne s’entend non plus parler les uns les autres que dans ces chambres où il faut attendre, pour faire le compliment d’entrée, que les petits chiens aient aboyé.

85. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Lacordaire, 1802-1861 » pp. 542-557

Qui verrait en moi autre chose qu’un esprit faible, léger, inconsistant, dominé avant tout par le besoin du bruit ? […] Nous nous surfaisons tous le bruit de notre nom ; nous croyons tous que tout le monde s’occupe de nous.

86. (1811) Cours complet de rhétorique « Livre troisième. Des Trois Genres principaux d’Éloquence. — Section deuxième. La Tribune du Barreau. — Chapitre premier. Objet du genre judiciaire. »

Cette insatiable avidité de parler s’exerce indifféremment sur tout, dévore tout comme un vaste incendie, et fait contracter à un jeune homme la déplorable habitude de parler de tout avec une légèreté dont on ne sent ni ne veut sentir les conséquences ; de sacrifier les ridicules des personnes présentes, la réputation et l’honneur des absents, avec une précipitation dont on serait soi-même effrayé, si une réflexion solide pouvait trouver sa place dans une tête vide d’idées, et étourdie du bruit qu’elle-même excite autour d’elle.

87. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Prosper Mérimée Né en 1803 » pp. 286-290

Loin de penser à une sortie de l’ennemi, il s’imaginait que le bruit provenait d’une querelle entre ses propres soldats.

88. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — Racine, 1639-1699 » pp. 150-154

Ni Corneille, dans son petit ménage de Rouen, écrivant Polyeucte au bruit des fuseaux de sa femme, ni Racine faisant la procession dans sa chambre, un cierge à la main, ne passaient pour des prodiges ; on aurait presque défini le grand poëte : un bon père de famille qui fait de beaux vers. » (Études littéraires et morales, t. 

89. (1881) Cours complet de littérature. Poétique (3e éd.) « Poétique — Première partie. De la poésie en général — Chapitre premier. Des caractères essentiels de la poésie » pp. 9-15

La foudre est peur lui la voix d’une puissance formidable et irritée contre la terre ; le zéphir est le souffle d’un génie bienfaisant : le bruit du ruisseau, c’est la plainte d’un être souffrant ; au retour du printemps, la terre se réveille et sourit de plaisir ; en hiver, elle est triste et désolée.

90. (1843) Nouvelle rhétorique, extraite des meilleurs auteurs anciens et modernes (7e éd.)

On voit le renard approcher son oreille de la glace, et il semble dire : « Ce qui fait du bruit se remue ; ce qui se remue n’est pas gelé ; ce qui n’est pas gelé est liquide ; et ce qui est liquide plie sous le faix : donc si j’entends, près de mon oreille, le bruit de l’eau, elle n’est pas gelée, et la glace n’est pas assez épaisse pour me porter. » Aussi voit-on le renard s’arrêter et reculer lorsqu’il entend le bruit de l’eau. […] Enfin, il trouve un témoignage du même genre dans les bruits vulgaires et dans l’opinion publique. […] La renommée est, selon les intérêts différents, le cri de la vérité ou du mensonge : c’est un vain bruit, ou un oracle de Dieu même. […] Nous craignons non seulement les reproches publics, mais les pensées même les plus secrètes, les vains bruits, les fausses imputations, une fable, un rien, tout nous alarme : nous voulons lire sur tous les visages, dans tous les yeux. […] Homère fait entendre par son harmonie le bruit des flots, le choc des vents, le cri des voiles déchirées, la chute du rocher de Sisyphe.

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