Donnons de cette femme célèbre une lettre écrite à sa fille, le 20 février 1671, sur un incendie dont elle a été témoin ; ce sera, en même temps, un exemple de sa manière et un modèle pour les jeunes gens : Vous saurez qu’avant-hier au soir mercredi, après être revenue de chez M. de Coulanges, où nous faisions nos paquets les jours d’ordinaire, je songeai à me coucher.
Songez que c’est uniquement la fortune de votre tante qui a fait celle de votre père et la vôtre.
[Notice] Si la simplicité, le naturel, la grâce et la délicatesse sont des mérites classiques par excellence, on ne s’étonnera pas de voir figurer ici quelques pages du cahier où Eugénie de Guérin notait ses plus intimes pensées, sans songer qu’elle aurait des lecteurs.
C’est en ayant l’air d’y songer le moins qu’on y réussit le mieux. […] Il ne s’agit pas d’étudier les mouvements et les gestes les plus gracieux, afin de les exécuter en public, sans songer s’ils conviennent plus ou moins à notre extérieur et à nos dispositions naturelles. […] Ils ne durent pas songer à célébrer les plaisirs et le repos des champs, tant que ces plaisirs et ce repos furent pour eux les objets d’une jouissance journalière. […] Le Songe de Salomon peut être considéré comme un très beau morceau de poésie pastorale. […] Quiconque ouvre Homère doit songer qu’il va lire le plus ancien livre du monde après la Bible.
Il cherche vos besoins au fond de votre cœur ; Il vous épargne la pudeur De les lui découvrir vous-même : Un songe, un rien, tout lui fait peur, Quand il s’agit de ce qu’il aime.
Un planteur doit songer à se défendre contre les attaques des tribus environnantes.
On croit en eux, parce qu’ils croient en eux-mêmes, parce qu’ils parlent et agissent, sans songer au spectateur qui les regarde, qui les écoute.
Quand on songe quelle était l’admiration du soldat pour Napoléon, et combien il tenait à mériter ses éloges, on ne sera pas surpris de l’effet que devait produire ces simples mots. […] — Les souvenirs portés | sur les ailes d’un songe. — Dans ces tableaux trompeurs, — par eux seuls animés, — Il reprend ses travaux, — ses jeux accoutumés. — Le berger endormi | tient encor sa houlette, — Le poète son luth, — le peintre sa palette. […] L’effroi arrête le courage, glace le cœur ; un être épouvanté n’a plus la conscience de ses actes, il ne songe plus aux lois qui le régissent, son état normal est bouleversé. césure, en rompant le rhythme, imite cet effet extraordinaire, et nous le fait remarquer malgré nous.
Déjà sa politique astucieuse menaçait la liberté d’Athènes ; l’alarme commençait à se répandre parmi ce peuple léger et frivole, qui ne songeait aux moyens de détourner le danger que quand le danger était inévitable. […] Une chose dont je suis bien persuadé, c’est qu’ivre de sa grandeur et de ses succès, Philippe a pu rêver tous ces grands projets, en voyant surtout que personne ne songe à le troubler dans ses conquêtes ; mais qu’il ait pris ses mesures de manière à ce que les plus vides de sens d’entre nous (car rien de moins sensé qu’un fabricateur de nouvelles) soient instruits de ses démarches ultérieures, c’est ce que je ne saurais jamais croire.
Cela ne signifie pas qu’il doive entièrement oublier ses auditeurs pour ne songer qu’à ses lecteurs.
Augustin Potier, évêque de cette ville, dont la reine avait songé à faire un premier ministre, mais qui était d’une incapacité absolue.
Les citoyens d’une ville bien policée jouissent de l’ordre qui y est établi, sans songer combien il en coûte de peines à ceux qui l’établissent ou le conservent, à peu près comme tous les hommes jouissent de la régularité des mouvements célestes sans en avoir aucune connaissance ; et même, plus l’ordre d’une police ressemble par son uniformité à celui des corps célestes, plus il est insensible ; et par conséquent il est toujours d’autant plus ignoré qu’il est plus parfait.
C’est une vraie manie, il faut réserver le style brillant pour les descriptions et ne pas songer à faire une pièce d’éloquence.
Il put dire avec fierté : « J’ai passé cinquante ans à mon bureau », et il songeait sans doute à lui-même, en définissant le génie, une longue patience.
Je n’y saurais songer sans crainte et sans espoir ; Et, quoi qu’on en ait dit, ma raison s’épouvante De ne pas le comprendre, et pourtant de le voir.
C’est aussi par les circonstances que Virgile raconte la mort de César, l’histoire de Polyphême et des Cyclopes, l’épisode de Laocoon et la rencontre d’Andromaque ; que Fléchier décrit la mort de Turenne ; que Racine embellit le récit du songe d’Athalie, et fait raconter à Mithridate sa défaite par Pompée.
Tantôt par la singularité : Un lièvre en son gîte songeait : Car que faire en un gîte, à moins que l’on ne songe ?
Comment l’Énéide n’aurait-elle pas enthousiasmé les Romains, et comment son auteur n’aurait-il pas été populaire, si l’on songe au culte de ce peuple pour ses origines fabuleuses et à sa soif de despotisme et de gloire ? […] Elle ne songe un instant à se donner à son vainqueur que pour sauver de la mort Astyanax. […] Plan. — Dans les théories qu’il a émises sur l’Éloquence, Fénelon songeait surtout à celle de la chaire, mais ses préceptes sont généraux et embrassent l’art de bien dire tout entier. […] Cette pensée remplit mon âme d’une profonde tristesse, car je songe qu’il me faudra quitter celle vie avant d’avoir fait pour Votre Majesté tout ce que j’avais projeté d’accomplir dans l’intérêt de sa gloire et du bonheur public. […] les uns, ne se proposant qu’une leçon de morale, n’ont garde de songer au récit, de peindre, d’animer leurs créatures ; les autres, au contraire, se préoccupant peu de la morale qu’on peut tirer de leurs fables, se bornent à un récit anecdotique, mais sec et comme résumé à plaisir ; et pourtant, du peu que monsieur de La Fontaine leur a pris, à savoir quelques sujets dont parfois le titre seul est emprunté, voyez ce qu’il a su faire !
Songez qu’on avait donné à ses livres le nom des Muses.
Chacun songe en veillant ; il n’est rien de plus doux : Une flateuse erreur emporte alors nos âmes ; Tout le bien du monde est à nous… Quand je suis seul, je fais au plus brave un défi : Je m’écarte, je vais détrôner le sofi4 ; On m’élit roi, mon peuple m’aime : Les diadèmes vont sur ma tête pleuvant.
Il est comme s’il n’était pas, et sa vie entière n’est qu’un songe malheureux.
Voyez, monsieur, si en effet vous avez écrit, et songez qu’une ligne innocente, mais mal interprétée, vous coûterait la vie.
Ma fille, tendre objet de mes dernières peines, Songe au moins, songe au sang qui coule dans tes veines : C’est le sang de vingt rois, tous chrétiens comme moi ; C’est le sang des héros, défenseurs de ma loi ; C’est le sang des martyrs… Voltaire.
La prédilection que son père avait pour lui, et sa supériorité sur ses frères, qui lui fut annoncée dans un songe, excitèrent la jalousie et la haine de ceux-ci, au point qu’un jour qu’il était allé les voir à la campagne, où ils faisaient paître les troupeaux, ils résolurent de le tuer. […] Peu de temps après, il en fit de même à l’égard d’un songe effrayant qu’avait eu Pharaon.
Lafontaine a pleinement résolu les deux problèmes : après ses vers si faciles et si harmonieux, il n’a plus été permis de songer à un autre langage ; et quoique resté inimitable sous ce point de vue comme sous tant d’autres, il a bien fallu l’imiter au moins pour le rhythme et la mesure. […] Songeons que la description n’est qu’un moyen de relever ce qu’il y a de moral et d’essentiel dans un ouvrage, et qu’elle doit, directement ou indirectement, concourir à rendre mieux la pensée principale d’un auteur.
Avant tout, songez à bien faire, et non pas rapidement et beaucoup ; Scribendi recte, nam ut multum, nil moror… Soyez bien convaincu que la facilité de bon aloi ne s’acquiert que par un travail sévère et obstiné.
L’âge viril plus mûr inspire un air plus sage, Se pousse auprès des grands, s’intrigue, se ménage ; Contre les coups du sort songe à se maintenir, Et loin dans le présent regarde l’avenir.
Ayez soin encore de ne pas vous arrêter aux propositions que nul ne songe à contester, allez immédiatement au nœud de la controverse ou de la cause.
Deux singuliers, l’un terminé par une voyelle, l’autre par une consonne, ne riment pas : foi et exploit ; songea et orgeat.
Ce n’est point dans l’adolescence, lorsqu’on étudie la rhétorique, qu’il faut songer à bien inventer et à bien disposer.
Pas plus qu’un songe de la nuit.
Je tremble, quand je songe avec quelle facilité votre successeur, quel qu’il soit (car vous aurez un successeur, et bientôt peut-être), améliorera le sort des hommes qui vous avaient été confiés, et leur fera trouver son administration plus protectrice, plus prévoyante, plus soigneuse d’eux-mêmes et plus humaine que la vôtre. » 2.
Rappelons-nous que ce tableau n’est pas un code, mais un recueil d’analyses curieuses, et n’imitons pas ces poëtes tragiques, copistes malheureux de Corneille et de Racine, qui disaient : Ici je mettrai un songe, là un récit, ailleurs un monologue.
Ils ne songèrent point à prendre pour sujet spécial de leurs compositions la tranquillité et les plaisirs de la campagne, tant que ces biens furent pour eux des objets familiers et d’une jouissance journalière ; ce fut lorsque les hommes, réunis dans les grandes villes, commencèrent à se plaindre de toutes les misères que la corruption y avait entassées, cl à regretter la vie douce et innocente dont avaient joui leurs ancêtres au milieu des scènes champêtres et des occupations pastorales, qu’ils conçurent l’idée de célébrer ce bonheur dans leurs vers, et que la poésie pastorale revêtit sa forme actuelle.
Mais que de gens, songez-y bien, ne croyaient pas aux complots que je dénonçais ! […] Mais enfin, à quoi songent ces malheureux ? […] Tâche d’être homme ; songe à quel point tu es engagé, et vois à quoi t’oblige désormais la nécessité. […] Mais, au nom des dieux immortels, bannissez-le de vos cœurs, je vous en conjure, et, oubliant le soin de ma sûreté, ne songez qu’à vous et à vos enfants. […] Vous n’avez point songé à ce tribunal, à cette assemblée, à ce concours si nombreux qui vous considère en ce moment avec indignation on ?
Celui qui, en les cultivant, ne songe pas à s’élever soi-même et à élever les autres à une plus haute perfection, n’est qu’un discoureur puéril et frivole, et il ne mérite pas d’être admis dans le sanctuaire des lettres. […] S’il ne songeait qu’à être compris et à éviter les fautes de langage, on se dégoûterait bientôt de son style, et il n’atteindrait pas son but. […] Au nom du lieu si saint qui n’est ouvert qu’à vous, Lieu terrible où de Dieu la majesté repose, Quelque dure que soit la loi qu’on vous impose, De ce coup imprévu songeons à nous parer. […] Sans doute, on doit distinguer la critique sincère de ces censeurs pointilleux qui ne songent qu’à mordre et à déchirer : ce sont là des Zoïles qu’il faut savoir mépriser. […] Ainsi Chateaubriand a comparé Virgile et Racine, le songe d’Énée et le songe d’Athalie.
Boileau seulement définissait l’ode d’après les modèles antiques, sans songer aux effusions lyriques qui remplissent l’Écriture sainte, et qui s’épanchaient dans l’éloquence de Bossuet. […] Examinez ma vie, et songez qui je suis. […] Je songe avec respect de combien je suis née Au-dessous des grandeurs d’un si noble hyménée, etc. […] Le mépris que les hommes d’action, d’affaires, de science ont quelquefois pour le charme et l’harmonie du langage paraît d’une sévérité singulière, quand on songe à Descartes, à Pascal, à Bossuet, à Buffon, à Voltaire, à Montesquieu. […] « Aussi avait-il pour maxime : Écoutez, c’est la maxime qui fait les grands hommes, que, dans les grandes actions, il faut uniquement songer à bien faire, et laisser venir la gloire après la vertu. » (Oraison funèbre de Condé.)
Mais voilà précisément ce que ne veulent point admettre ceux pour qui cet avenir aurait nécessairement quelque chose d’effrayant ; et, comme il n’y a plus de terme à la folie de l’homme abandonné à lui-même, ils ne rougissent pas de se ravaler à la condition de la brute, et ils commencent par se persuader qu’ils n’ont point d’âme, pour se dispenser de songer à son état futur.
« J’y avais songé, répondit-il, et je l’eusse retranché, si le parterre était composé de juges comme vous. » Les Proverbes de Th.
Il n’y a nul mérite, sans doute, mais aussi nulle chance d’erreur, dans l’emploi de ces formes consacrées, aussi vieilles, semble-t-il, que le français même, dont tout le monde use, sans y songer, en parlant ou en écrivant, et qui n’en sont pourtant pas moins des figures : il est enflammé de courroux ; lisez Cicéron ; donnez-moi un petit verre ; chevaucher sur un bâton, etc.
Songez-vous au bonheur qui les a signalés ?
Cette nuit, dans l’erreur d’un songe, Au rang des dieux j’étais monté.
Lorsque mon sujet me saisit, j’évoque tous mes personnages et les mets en situation : — Songe à toi, Figaro, ton maître va te deviner. — Sauvez-vous vite, chérubin ; c’est le comte que vous touchez. — Ah !
Le songe du jeune élève. […] Il se trouve placé, en songe, entre deux chemins, l’un riant et semé de fleurs, l’autre escarpé et conduisant à un temple magnifique qui se perd dans les nues ; il entend une voix céleste qui lui ordonne de choisir. […] Il songe à l’affreux spectacle qu’offrira Rome livrée au pillage et à l’incendie. […] Le déplacement d’une fascine, l’ouverture inaperçue d’un trou de rat, peuvent suffire pour amener l’événement ; mais si les Hollandais y songent, c’est pour le prévenir, nullement pour s’en effrayer. […] Le jeune homme pouvait fuir : il n’y songe même pas ; il résiste à son ennemi ; il le tue, et, plein de joie, apporte ses dépouilles à son père.
., de cette foule de scélérats que fournit surabondamment l’histoire et je conclurais « qu’il n’y a pas de bonheur pour les puissants, s’ils ne sont honnêtes. » Que je veuille prouver « que tout n’est que vanité sur la terre, je dirai : “La santé, la vie, la gloire ne sont que vanité ; les grandeurs, les plaisirs, les richesses ne sont que vanité, donc tout n’est que vanité.” » Telle serait la structure aride et sèche d’une induction purement logique ; mais voyons comment Bossuet a su l’embellir sans en altérer la force : « La santé n’est qu’un nom, la vie n’est qu’un songe, la gloire n’est qu’une apparence, les grâces et les plaisirs ne sont qu’un dangereux amusement. […] Bossuet, après avoir dit « que la santé n’est qu’un nom, la vie un songe, la gloire une apparence et que tout est vain en nous », se reprend et ajoute aussitôt : « Mais dis-je la vérité ? […] On fait allusion à des faits historiques ou fabuleux, à des usages ; quelquefois même on joue sur les mots : Ton roi, jeune Biron, te sauve enfin la vie Et t’arrache sanglant aux fureurs des soldats, Dont les coups redoublés achevaient son trépas, Tu vis, songe, du moins, à lui rester fidèle. […] Ce que tu m’as promis, songe à l’exécuter. […] C’est Lusignan qui parle, avec toute l’effusion de la tendresse paternelle, à sa chère fille : Ma fille, tendre objet de mes dernières peines, Songe au moins, songe au sang qui coule dans tes veines.
Je ne songerai plus que rencontre funeste, Que faucons, que réseaux. […] On conçoit à peine comment les plans en furent tracés, et dans quels termes les ordres furent expédiés aux ouvriers ; cela semble une pensée fugitive, une rêverie brillante, qui aurait pris tout à coup un corps durable, un songe réalisé.
Songez bien que ces deux qualités ne sont admissibles dans la forme que quand elles existent dans le fond.
Songez au moins qu’un ennemi cent fois plus terrible vous menace… Les rats, à qui les chats imposent encore, les rats, Messieurs, sont aux aguets ; ils n’attendent que le moment où vous aurez prononcé l’arrêt fatal que mon adverse partie sollicite, pour entrer en campagne et venir s’établir dans vos habitations, que vous serez forcés, oui, Messieurs, que vous serez forcés de leur abandonner.
Vous avez là Octave et Antoine couchés à cette table, dans votre vaisseau ; ils ne songent qu’à faire bonne chère.
Si l’on se demande ce qu’eût été Molière en un siècle où tout esprit indépendant avait à craindre le Châtelet, le Parlement et la Sorbonne, Molière privé d’un théâtre et réduit à dérober son bon sens sous la livrée de la folie, on songera tout naturellement au pantagruélisme de Rabelais, côtoyant les piéges sans y tomber, et sauvant ses audaces par l’apparente insanité d’un rire sans cause.
L’âge viril, plus mûr, inspire un air plus sage, Se pousse auprès des grands, s’intrigue, se ménage2, Contre les coups du sort songe à se maintenir, Et loin dans le présent regarde l’avenir.
C’est là son objet : tirer des lettres un enseignement pratique, songer moins à conduire l’esprit que le cœur, prendre plus de souci de la morale que de l’esthétique.
Ces deux grands objets ont entre eux une si merveilleuse conformité, se prêtent mutuellement une force si admirable, qu’il serait impossible de songer à les séparer, sans vouloir les affaiblir.
Non, c’est de l’avoir faite reine malheureuse. » Vous voyez que la pensée interrompue un instant est bientôt reprise ; mais quand Athalie dit avec fureur à Joad : Je devrais sur l’autel où ta main sacrifie Te … Mais du prix qu’on m’offre il faut me contenter : Ce que tu m’as promis songe à l’exécuter.
Pour moi je ne songerai toute ma vie qu’à marquer au Roi et à vous la reconnaissance de ce que je dois à l’un et à l’autre : trop heureux, Madame, si vous êtes aussi persuadée de mes sentiments que je le mérite. » Une lettre de félicitation ou de condoléance à un ami, est facile à faire, parce qu’on se réjouit ou l’on s’afflige réellement avec lui.
Quand j’ai voulu traiter le sujet qui fait l’objet de cet ouvrage, j’ai dû songer d’abord à la définition générale de la Rhétorique, elle a amené quelques développements et une division.
Tant que vous serez désunis, et que chacun ne songera qu’à soi, vous n’aurez rien à espérer, que souffrance, et malheur, et oppression1.
Et Marie et Jésus songent-ils à s’élever ?
. — Pourtant songez-y, vous dirai-je ; Nous avons abattu le dernier privilége : Que reste-t-il encor qui puisse être emporté, Sinon les fondements de la société ?
Si Rutebeuf a de nobles accents lorsqu’il songe aux revers des armes chrétiennes, et au Saint-Sépulcre resté aux mains des infidèles, les amers sarcasmes de sa verve hardie contre les puissants nous avertissent pourtant que le jour approche où le relâchement des mœurs, la rivalité des pouvoirs spirituel et temporel, l’ambition de l’Église ou des souverains, la misère publique, l’affranchissement des communes, et la décadence d’institutions impuissantes enhardiront les indépendants ou les téméraires.
Tout le monde se garde contre le préjudice ordinaire, comme on le fait contre les maladies ordinaires ; or, contre une maladie qui n’a jamais affecté personne, nul ne songe à se garantir. […] Car, lorsqu’on est dans ce cas, on ne tente pas de convaincre des juges que l’on redoute, et l’on ne peut songer à se justifier devant des gens qui vous haïssent, ou vous portent envie. […] De même à l’égard de ceux qui s’humilient devant nous et qui ne nous contredisent point, car ils font voir qu’ils se reconnaissent nos inférieurs ; or les inférieurs craignent leurs supérieurs, et quiconque éprouve de la crainte ne songe pas à mépriser. […] Et en effet, on ne redoute pas ce qui est encore bien loin de nous : ainsi tout le monde sait qu’il faudra mourir ; mais, comme ce n’est pas immédiat, on n’y songe pas. […] Et d’une manière générale, lorsqu’on sera disposé à s rappeler que la même calamité est tombée sur soi-même, ou sur les siens, ou encore à songer qu’elle peut nous atteindre, nous ou les nôtres.
Avestissement. Ce Cours gradué de Versions latines n’est, comme le Cours de Thèmes latins qui l’a précédé, que la syntaxe appliquée et pour ainsi dire en action. Il en suit le développement pas à pas, sans rien donner à l’inconnu, et ne présente jamais d’autres difficultés grammaticales que celles que l’élève peut résoudre à l’aide des règles précédemment étudiées(1). Tout le monde sait que les livres latins, même les plus élémentaires, qu’on fait expliquer aux commençants, sont loin de remplir cette condition. Cornélius Népos et Phèdre n’ont pas pris soin de graduer les difficultés de leur texte conformément à l’ordre de Lhomond ou de tout autre grammairien.
C’est un corps animé d’une infinité de passions différentes, qu’un homme habile fait mouvoir pour la défense de la patrie : c’est une troupe d’hommes armés, qui suivent aveuglément les ordres d’un chef, dont ils ne savent pas les intentions : c’est une multitude d’âmes, pour la plupart, viles et mercenaires, qui, sans songer à leur propre réputation, travaillent à celle des rois et des conquérants : c’est un assemblage confus de libertins, qu’il faut assujettir à l’obéissance ; de lâches, qu’il faut mener au combat ; de téméraires, qu’il faut retenir ; d’impatients, qu’il faut accoutumer à la confiance ». […] L’éloquence, dit Cicéron71, veut qu’on s’accommode au goût et à l’oreille au peuple : elle songe à gagner et à toucher les esprits ; et dans ce but qu’elle se propose, les raisons doivent être pesées, non dans la balance des savants, mais dans celle du sens commun et de la multitude.
Songez qu’on travaille pour ses propres intérêts, en s’occupant de ceux de son frère : l’illustration d’un frère devient pour nous une décoration personnelle, et nulle autre n’en saurait être autant honoré.
Ma fille, tendre objet de mes dernières peines, Songe au moins, songe au sang qui coule dans tes veines.
« Non, après ce que nous venons de voir, la santé n’est qu’un nom, la vie n’est qu’un songe, la gloire n’est qu’une apparence, les grâces et les plaisirs ne sont qu’un dangereux amusement : tout est vain en nous, excepté le sincère aveu que nous faisons devant Dieu de nos vanités, et le jugement arrêté qui nous fait mépriser tout ce que nous sommes.