L’avocat ne doit dire que la vérité ; mais il doit éviter cependant de rien laisser échapper qui puisse nuire à sa cause.
Bourdaloue a raconté les hauts faits et les victoires du prince de Condé ; il en trouve la cause dans les éminentes qualités de son héros : « J’appelle le principe de ces grands exploits, cette ardeur martiale, qui, sans témérité ni emportement, lui faisait tout oser et tout entreprendre ; ce feu qui, dans l’exécution, lui rendait tout possible et tout facile ; cette fermeté d’âme que jamais nul obstacle n’arrêta, que jamais nul péril n’épouvanta, que jamais nulle résistance ne lassa ni ne rebuta ; cette vigilance que rien ne surprenait ; cette prévoyance à laquelle rien n’échappait ; cette étendue de pénétration avec laquelle… ; cette promptitude à prendre son parti que… ; cette science qu’il pratiquait si bien et qui le rendait si habile à… ; cette activité… ; ce sang-froid… ; cette tranquillité… ; cette modération et cette douceur pour les siens… ; cet inflexible oubli de sa personne qui… ; etc.
La troisième, qui était à la Croix du Tirouer3, ne se voulut pas payer de cette monnaie ; et un garçon rôtisseur, s’avançant avec deux cents hommes et mettant la hallebarde dans le ventre du premier président, lui dit : « Tourne, traître ; et si tu ne veux être massacré toi-même, ramène-nous Broussel ou le Mazarin et le chancelier en otage. » Vous ne doutez pas, à mon opinion, ni de la confusion ni de la terreur qui saisit presque tous les assistants ; cinq présidents au mortier et plus de vingt conseillers se jetèrent dans la foule pour s’échapper.
Il eût rendu compte d’un inconnu qui s’y serait glissé dans les ténèbres : cet inconnu, quelque ingénieux qu’il fût à se cacher, était toujours sous ses yeux ; et si enfin quelqu’un lui échappait, du moins, ce qui fait presque un effet égal, personne n’eût osé se croire bien caché.
Sa voix redoutable Trouble les enfers ; Un bruit formidable Gronde dans les airs ; Un voile effroyable Couvre l’univers ; La terre tremblante Frémit de terreur ; L’onde turbulente Mugit de fureur ; La lune sanglante Recule d’horreur2 Dans le sein de la mort ses noirs enchantements Vont troubler le repos des ombres : Les mânes effrayés quittent leurs monuments ; L’air retentit au loin de leurs longs hurlements ; Et les vents, échappés de leurs cavernes sombres, Mêlent à leurs clameurs d’horribles sifflements3.
Il n’est pas fort vif au dehors, mais il a beaucoup de vivacité au dedans, et peu de chose échappe à ses réflexions.
Chacun d’eux a sa qualité particulière et saillante ; tel raconte avec une abondance qui entraîne, tel autre, sans suite, va par saillies et par bonds, mais en passant, il trace en quelques traits des figures qui ne s’effacent jamais de la mémoire des hommes ; tel autre enfin, moins abondant ou moins habile à peindre, mais plus calme, plus discret, pénètre d’un œil auquel rien n’échappe dans la profondeur des événements humains, et les éclaire d’une éternelle clarté.
Ses descriptions touchantes lui échappent comme un cri d’enthousiasme, comme l’élan d’une prière, comme le tressaillement involontaire d’un cœur ému.
L’esprit français rayonne plus que jamais au dehors mais il échappe à la direction du monarque. […] Ceux qui pour échapper à la persécution ont quitté la France après la fatale révocation de l’Édit de Nantes sont morts en exil. […] Vous avez pu, Monsieur, apprécier comme je viens de le faire les caractères de la tragédie du Cid ; quelque chose pourtant a dù vous échapper qui déplaît à la représentation. […] Le lecteur qui sait apprécier toutes les qualités d’un ouvrage, à qui n’échappent ni l’habile disposition des matières, ni le choix heureux des pensées, ni la mesure, ni la justesse des raisonnements ou la vérité des caractères, ni les nuances les plus délicates du style, passe, à bon droit, pour un homme de goût. […] Là, elle montre l’intuition aiguisée des femmes et la confiance des âmes honnêtes et jeunes ; elle ne soupçonne pas, elle pressent un piège ; mais son exquise candeur la perd, elle laisse échapper son secret ; toutefois avec quelle discrétion, quelle pudeur craintive !
Je vise à la concision, je deviens obscur ; on court après la grâce : adieu le nerf et la chaleur ; tel vise au sublime, et se perd dans l’enflure ; par excès de prudence, et pour échapper à la tempête, celui-là se traîne terre à terre ; celui-ci croit trouver la variété dans le merveilleux, et son pinceau bizarre nous représente un dauphin dans les bois, un sanglier dans les flots. […] J’échappe à la censure, il est vrai : mais aurai-je mérité des louanges ? […] Pourquoi donc, dans un poëme où les beautés dominent, critiquerais-je amèrement quelques taches, effets inévitables de la négligence, ou qui auront échappé à la faiblesse humaine ? […] Et pourquoi se scandaliser, d’ailleurs, qu’il ait échappé à Horace une de ces fautes si bien excusées dans ces vers dont nous invoquerons pour lui le bénéfice ?
Les Troglodites périrent tous ; de tant de familles il n’en resta que deux qui échappèrent aux malheurs de la nation.
Ils m’échappent, la mort me les vient arracher ; Et, frappés avant moi, le tombeau les dévore : J’irai bientôt les joindre.
Malgré son respect pour les doctrines orthodoxes, il ne put échapper aux tempêtes théologiques soulevées contre lui par un docteur protestant qui accusait d’athéisme ce chrétien philosophe, dont Bossuet et Fénelon furent les admirateurs.
Ici, un enfant échappé du naufrage est porté sur les épaules de son père ; là, une femme étendue morte sur le rivage, et son époux qui se désole.
Enseveli dans une atmosphère de sable embrasé, le guide échappe à ma vue.
Les circonstances étaient-elles difficiles, les esprits fatigués d’une longue discussion, on intimidés par le danger, un cri, un mot décisif s’échappait de sa bouche, sa tête se montrait effrayante de laideur et de génie, et l’assemblée éclairée ou raffermie rendait des lois, on prenait des résolutions magnanimes.
Il y a même dans les auteurs médiocres des beautés cachées, ou mal rendues, qui n’échappent point à l’œil pénétrant de l’homme de goût. […] Ils seraient bien plus dignes d’excuses, si portant déjà le deuil, l’amertume, dans le cœur, ils en laissaient échapper quelques traits au-dehors. […] Je croirais même qu’elle pourrait échapper à l’homme, dont le discernement et le goût n’auraient été ni exercés ni cultivés par une lecture réfléchie de ces deux écrivains.
La naïveté est un sentiment qui a l’air d’échapper au cœur, de se trahir ingénument et sans réflexion. […] déjà tout commence à se ternir ; les jardins sont moins fleuris, les fleurs moins brillantes, les couleurs moins vives, les prairies moins riantes, les eaux moins claires ; tout pâlit, tout s’efface ; l’ombre de la mort se présente ; on commence à sentir l’approche du gouffre fatal ; mais il faut aller sur le bord ; encore un pas : déjà l’horreur trouble les sens, la tête tourne, les yeux s’égarent… Il faut marcher ; on voudrait retourner en arrière ; plus de moyens : tout est évanoui, tout est tombé, tout est échappé. » L’allégorie personnifie aussi les idées, les sentiments et les passions.
Ce fut alors que lui échappa ce mot célèbre, et si louable dans la bouche d’un ennemi et d’un rival : Eh !
Trop vaste, il fatigue l’esprit et lui échappe ; trop resserré, il le satisfait mal.
Si vous vous refusez à l’admettre, c’est que le rapport entre le sujet et l’attribut vous échappe, c’est-à-dire que vous ne savez comment ranger l’idée individuelle : Milon, meurtrier de Clodius, dans l’idée générale innocent.
Cette vie, que nous ne possédons jamais que par diverses parcelles qui nous échappent sans cesse, se nourrit et s’entretient d’espérance ; l’avenir, nous ne le tenons que par espérance, et jusques au dernier soupir, c’est l’espérance qui nous fait vivre : et puisque nous espérons toujours, c’est un signe très-manifeste que nous ne sommes pas dans le lieu où nous puissions posséder les choses que nous souhaitons.
Les années semblent longues quand elles sont encore loin de nous ; arrivées, elles disparaissent, elles nous échappent en un instant, et nous n’aurons pas tourné la tête, que nous nous trouverons, comme par un enchantement, au terme fatal qui nous paraît encore si loin et ne devoir jamais arriver.
Un homme qui a échappé à une maladie mortelle a été indisposé, et, dans quelques provinces du Midi, il a été seulement un peu fatigué.
La naïveté de la pensée consiste dans la vue soudaine d’une vérité qu’on ne soupçonnait pas, ou dans un premier mouvement qui paraît nous échapper sans étude ni réflexion. […] Ce dernier trait, d’abord contenu, échappe à la naïveté de l’enfant, et l’effet en est terrible. […] Une naïveté est une sottise qui échappe par mégarde à l’étourderie ou à l’irréflexion. […] …………………… Les soins ne purent faire Qu’elle échappât au temps, cet insigne larron. […] Dans le premier âge surtout, le mérite du fond et les beautés de la forme échappent presque toujours à l’œil distrait de celui qui lit.
. — La poésie est difficile à définir d’une manière absolue, parce que le sentiment, qui en est l’âme, échappe à la définition par sa mobilité, son indépendance et ses transports. […] Le savant devient écrivain, lorsqu’il laisse échapper ses sentiments et ses émotions dans le récit des merveilles de la nature, dans la description du système du monde, dans l’analyse des facultés de l’âme et la démonstration de la vérité. […] Le Dilemme est un syllogisme double ; il tire de deux propositions contraires une seule et même conclusion, il met l’adversaire entre deux alternatives auxquelles il ne peut échapper. […] Fénelon est innocent, dans son admirable style, des hardiesses malheureuses de nos jours ; Buffon, avec son génie et son beau langage, n’échappe pas au reproche d’avoir trop emprunté, pour enrichir la langue et le style, à l’industrie et à la science. […] On peut lui reprocher l’abus de la symétrie et des antithèses, une perfection qui n’échappe pas à la monotonie ; mais l’élégance et l’habileté de son style méritent encore l’attention des gens de goût.
Échappés de ces flammes et couchés plusieurs jours sur des ruines et des monceaux de cendres, nous avons invoqué Marc-Aurèle : Marc-Aurèle a réparé nos malheurs.
l’homme instruit, dont le goût est perfectionné par l’étude, découvre mille beautés, mille nuances délicates qui échappent aux esprits sans culture ; il les savoure avec délices, tandis que les autres n’en ont qu’un sentiment confus et incomplet.
N’attendez pas qu’elles fassent aucun effort pour échapper à leur jugement ou pour l’abréger.
Si pourtant l’objet de notre étude ce jour-là, et en quelque sorte de notre dévotion, est un de ces morts fameux et si rares dont la parole remplit les temps, l’effet ne saurait être ce que nous disons : l’autel alors nous apparaît trop lumineux ; il s’en échappe incessamment un puissant éclat qui chasse bien loin la langueur des regrets et ne rappelle que des idées de durée et de vie.
Elles ont reçu le nom de fugitives, sans doute parce que, à cause de leur peu d’étendue, elles semblent s’échapper avec la même facilité et de la plume qui les produit et des mains qui les recueillent.
Enfin les choses extrêmes sont pour nous comme si elles n’étaient point, et nous ne sommes point à leur égard : elles nous échappent ou nous à elles. […] Quelque terme où nous pensions nous attacher et nous affermir, il branle et nous quitte ; et si nous le suivons, il échappe à nos prises, nous glisse et fuit d’une fuite éternelle. […] Pellisson s’élève avec force et éloquence contre une pareille distinction, dont le secret motif ne lui échappe pas. […] par où échapper ? […] C’est un danger auquel vous avez échappé : un plus grand danger peut vous attendre.
I, ode 13) : L’homme, en sa course passagère, N’est rien qu’une vapeur légère, Que le soleil fait dissiper ; Sa clarté n’est qu’une nuit sombre, Et ses jours passent comme l’ombre, Que l’œil suit et voit échapper. […] Avec quelle puissance d’imagination Milton, dans son Paradis perdu, a-t-il su nous tracer, à son tour, le sombre désespoir et l’orgueil intraitable de Satan, lorsque, échappé des enfers et voyant pour la première fois le chef-d’œuvre de la Divinité, le soleil, il s’écria : Globe resplendissant, majestueux flambeau ! […] Ainsi l’éclair s’échappe de la nue qui porte le tonnerre. […] il n’échappera pas.” » Il y a dialogisme encore dans ces locutions : « Que pensez-vous que l’on dise ? […] La réticence ou aposiopèse (du grec ἀποσιώπησις) est une figure par laquelle on s’interrompt brusquement pour passer à une autre idée, mais de telle manière que ce qu’on a comme laissé échapper suffise, pour l’intelligence de ce qu’on affecte de sous-entendre.
Cela est si vrai, qu’il nous en échappe souvent dans la conversation ; au lieu que nous ne faisons guère d’hexamètres que quand nous sortons du style simple. […] La troisième espèce est par le souvenir ; lorsqu’à la vue d’un objet on éprouve quelque affection marquée : comme dans les Cypriens de Dicéogène, où le héros, voyant un tableau, laisse échapper des larmes ; et, dans l’apologue d’Alcinoüs, Ulysse entend le joueur de cithare : il se rappelle un souvenir, et pleure ; ce qui le fait reconnaître.
Condorcet plus heureux, libre dans sa prison, Échappait au supplice en buvant le poison. […] Vainqueur d’Éole et des Pléiades, Je sens d’un souffle heureux mon navire emporté : Il échappe aux écueils des trompeuses Cyclades, Et vogue à l’immortalité.
La naïveté, si bien caractérisée par Marmontel, est une espèce d’ingénuité, de franchise enfantine que nous aimons à rencontrer et à laquelle il échappe des traits qui nous font sourire. […] Enfin, je suis échappé des bandits, des Espagnols et de la mer.
Le las était usé ; si bien que, de son aile, De ses pieds, de son bec, l’oiseau le rompt enfin : Quelque plume y périt ; et le pis du destin Fut qu’un certain vautour, à la serre cruelle, Vit notre malheureux, qui, traînant la ficelle Et les morceaux du las qui l’avait attrapé, Semblait un forçat échappé. […] Il compose ses personnages et les met en scène avec l’habilité de Molière ; il sait prendre dans l’occasion le ton d’Horace, et mêler l’ode à la fable ; il est à la fois le plus naïf et le plus raffiné des écrivains, et son art échappe dans sa perfection même. » 2.
De retour chez eux, les savants conseillers cherchent dans tout Cicéron le merveilleux passage qui leur avait échappé ; ils le cherchèrent fort longtemps.
Aussitôt qu’il eut porté de rang en rang l’ardeur dont il était animé, on le vit presque en même temps pousser l’aile droite des ennemis, soutenir la nôtre ébranlée, rallier le Français à demi vaincu, mettre en fuite l’Espagnol victorieux, porter partout la terreur, et étonner de ses regards étincelants ceux qui échappaient à ses coups.
Mais disons un mot à ce propos des répétitions qui échappent involontairement.
Ses soldats près de lui, d’un œil plein de courroux, Regardaient ces vaincus échappés à leurs coups.
Après qu’on a lu un certain nombre de pages, tout vous échappe ; on sait seulement que l’auteur a dit des choses ingénieuses, et a souvent parlé en orateur.
Mais il en advint « tout au rebours », et son imagination, « comme un cheval échappé », se donna tant de carrière que, pour réprimer ses saillies, et « lui en faire honte », il crut devoir « mettre en rôle toutes ses chimères ».
Quintilien rapporte que Périclès demandait aux dieux, avant de monter à la tribune, de ne pas laisser échapper un mot qui pût offenser le peuple. […] Une armée de cent mille hommes, commandée par les empereurs de Russie et d’Autriche, a été en moins de quatre heures coupée ou dispersée : ce qui a échappé à votre feu s’est noyé dans les lacs. […] Soyez toujours d’accord avec vous-même, et montrez de la constance, même dans la conversation : un homme est souvent jugé sur un mot qui lui échappe. […] Cette manière d’interroger son adversaire le met dans l’impossibilité d’échapper à l’évidence, et le force à se condamner lui-même. […] Vaste et profond dans ses vues, et s’élevant toujours par ces notions abstraites et générales qui sont pour lui comme des livres abrégés, il échappe à tout moment aux regards de la foule et s’envole fièrement dans les régions supérieures.
Comme il n’y a point de figure qui caractérise mieux que la prosopopée cet état d’exaltation de l’âme, où tout ce qui lui échappe est nécessairement sublime, il n’en est point qui soit plus familière aux poètes inspirés, qui se place plus naturellement sous leur plume, et dont ils tirent un parti plus brillant.
Pendant tout le reste du récit, l’âme d’Hermione est bouleversée par le désespoir, et ne peut laisser échapper que ces mots : Qu’ont-ils fait !
Enfin, les bourreaux fatigués s’arrêtent1, la hache échappe de leurs mains : je ne sais quelle vertu céleste, émanée de la croix, commence à les toucher eux-mêmes ; à l’exemple des nations entières, subjuguées avant eux, ils tombent aux pieds du Christianisme, qui, en échange du repentir, leur promet l’immortalité, et déjà leur prodigue l’espérance.
Quelle honte pour nous, quelle injustice, si Nicias, qui a été notre défenseur dans le sénat d’Athènes, est condamné chez nous au supplice, ou même éprouve quelque traitement rigoureux, et si, au contraire, Alcibiade, l’auteur de cette guerre désastreuse, échappe à notre vengeance et à celle des Athéniens ! […] Mais enfin, pour rabattre, au moins en partie, l’orgueil des Romains, et pour échapper aussi au blâme des Samnites, j’enlèverai aux ennemis leurs armes, dont ils se sont toujours servis contre nous, et l’argent qu’ils nous ont ravi. […] Agathocle échappé furtivement de Syracuse, traversant la mer avec quelques vaisseaux, n’a-t-il pas été sur le point de s’emparer de cette Carthage ? […] Annibal, dès qu’il apprend que les gardes du roi paraissent dans le vestibule, veut s’échapper par une porte de derrière, qu’il pensait être à l’abri de tous les regards.
Ton esprit ne sait pas planer dans ces hauteurs Où tout scrupule échappe aux vrais législateurs ; Les terrestres liens t’empêchent de m’y suivre ; D’un misérable orgueil ta parole t’enivre ; Des flatteurs empressés te prodiguent l’encens ; L’or, l’amour, les festins ont captivé tes sens, Et la dépouille belge, hélas !
Ainsi s’échappait l’imagination affolée : Tum data libertas animis, resolutaque legum Frenis Musa ruit… […] Montchrestien (mort en 1521) Notice Antoine de Montchrestien, fils d’un apothicaire de Falaise, cultiva la poésie au milieu des hasards tragiques d’une vie de procès, de duels et de proscription, qui le conduisit en Angleterre pour échapper à un procès criminel, le ramena gracié en France, le fixa dans l’Orléanais par des travaux industriels, la fabrication d’instruments en acier, et finit par une mort sanglante dans une échauffourée de huguenots. […] IV) par son père qui lui demandait d’être abbé renté comme son oncle et non poète comme lui, il s’échappe et rejoint l’oncle poète à Paris.
Si cette espèce de néologisme se bornait à dénaturer le langage seulement, la contagion serait moins rapide, et ses effets moins multipliés ; les esprits justes et les personnes instruites seraient à l’abri du ravage, ou échapperaient sans effort à la séduction.
La lettre, par la nature multiple des sujets qu’elle aborde, échappe à des préceptes absolus ; elle doit cependant observer un certain ordre dans la disposition des principaux points de son sujet. […] Pour faire mieux saisir le sens de ces mots, qui échappent à une définition complète, indiquons quelques écrivains célèbres chez lesquels ces dons se rencontrent, soit isolés, soit réunis.
De là cette étude profonde que recommandaient les anciens de l’intérieur d’une cause et de ses différentes faces ; de là leur attention à choisir leurs moyens, à s’attacher aux forts, à passer sur les faibles, à rejeter tous les mauvais ; de là l’importance qu’ils attachaient à ne jamais laisser échapper un mot qui donnât prise à l’adversaire, et non-seulement à dire ce qu’il fallait, mais sur toute chose, à ne jamais dire ce qu’il ne fallait pas ; de là le soin qu’ils prenaient de connaître le caractère, le génie, le tour d’esprit, et pour ainsi dire, le jeu de l’adversaire, et de cacher le leur, en variant leur marche et en déduisant leur dessein... […] Une armée de cent mille hommes, commandée par les empereurs de Russie et d’Autriche a été, en moins de quatre heures, ou coupée ou dispersée ; ce qui a échappé à votre feu s’est noyé dans les lacs.
Quand la guerre dévastera l’Italie, quand les villes seront saccagées, les maisons livrées aux flammes, penses-tu donc échapper aux feux de la haine allumés contre toi ? […] Mais voici que Politès, échappé au massacre de Pyrrhus… Sin autem ad pugnam exierint.
(Il était prisonnier, et à peine échappé au bûcher préparé pour lui).
Comme Protée résiste aux prières des mortels, strophe 1, et le prêtre de Delphes au Dieu qui l’agite, strophe 2, ainsi, quand l’enthousiasme poétique veut s’emparer de moi, je lutte longtemps pour échapper à sa puissance, strophe 3, mais une fois vainqueur, il m’enlève jusqu’au sublime ; Ce n’est plus un mortel, c’est Apollon lui-même Qui parle par ma voix.
Incapables de tromper, Ils ont peine à s’échapper Des pièges de l’artifice.
Il faudra que la guerre contre les Anglais fasse saigner la France au cœur pour que des cris chevaleresques lui échappent encore, comme le dernier soupir de la muse épique.
N’a-t-il pas dit : « Il faut rire avant d’être heureux, de peur de mourir sans avoir ri. » Observateur profond, et peintre de caractères, il excelle dans l’art d’attirer l’attention par des remarques soudaines, des traits vifs et pénétrants, des métaphores passionnées, des hyperboles à outrance, des paradoxes simulés, des contrastes étudiés, des expressions originales, de petites phrases concises qui partent comme des flèches, des allégories ingénieuses, et des morceaux d’apparat où l’esprit étincelle dans les moindres détails Le berger et son troupeau 1 Quand vous voyez quelquefois un nombreux troupeau qui, répandu sur une colline vers le déclin d’un beau jour, paît tranquillement le thym et le serpolet, ou qui broute dans une prairie une herbe menue et tendre2 qui a échappé à la faux du moissonneur, le berger, soigneux et attentif, est debout auprès de ses brebis ; il ne les perd pas de vue, il les suit, il les conduit, il les change de pâturage ; si elles se dispersent, il les rassemble ; si un loup avide paraît, il lâche son chien qui le met en fuite ; il les nourrit, il les défend ; l’aurore le trouve déjà en pleine campagne, d’où il ne se retire qu’avec le soleil.
Les désirs changent d’objets : ce qu’on aimait, on ne l’aime plus ; on était libre avec les lois, on veut être libre contre elles : chaque citoyen est comme un esclave échappé de la maison de son maître ; ce qui était maxime, on l’appelle rigueur ; ce qui était règle, on l’appelle gêne ; ce qui était attention, on l’appelle crainte.
« Alors même que par une faveur singulière nous avons accompli ou possédé une partie de ce qui excitait nos désirs, quelle âme humaine n’a en elle-même au bout d’un certain temps assez d’illusions détruites, assez de déceptions accumulées, assez de ruines intérieures pour qu’au moindre souvenir qui les agite il ne s’en échappe, comme une noire vapeur, un nuage épais de tristesse ?
Et enfin, après des jours qui ont été des siècles, tout à coup, de cet abîme sourd et insensible, de cet enfant qui à peine a fait croire par un sourire qu’il entendait l’amour qui l’a mis au monde, la parole s’échappe et répond.
Ils aiment les pensées fortes, les grands mouvements ; mais les nuances leur échappent.