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103. (1807) Principes généraux des belles-lettres. Tome I (3e éd.) « Première partie. De l’Art de bien écrire. — Section III. De l’Art d’écrire pathétiquement. — Chapitre I. Du Pathétique. » pp. 280-317

Des plantes, des métaux tu connais la vertu, Des différents pays les mœurs, la politique, La cause des frimas, de la fortune, du vent,             Des astres le pouvoir suprême ;             Et sur tant de choses savant,             Tu ne te connais pas toi-même. […] N’est-ce pas qu’on apprend à faire servir à l’ambition, à la grandeur, à la politique, et la vertu, et la Religion, et le nom de Dieu » ?

104. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « Chapitre VII. des passions  » pp. 89-97

Mais, ainsi que le praticien s’instruit principalement dans les hôpitaux et au lit des malades, c’est surtout dans les assemblées politiques ou religieuses ; dans la place et la voie publique, au parterre des théâtres, dans la société intime où l’a placé la nature ou le hasard, que l’écrivain étudiera les passions : Segnius irritant animos demissa per aurem, Quam quæ sunt oculis subjecta fidelibus… Un fait dont on a été témoin, un mot, un signe caractéristique, échappés d’instinct à la passion, que l’observation les recueille, que la méditation les mûrisse, et ce travail sera plus utile que tous les commentaires de la philosophie, que tous les modèles de la poésie et de l’éloquence.

105. (1872) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, accompagnés de notes et notices. Cours supérieurs et moyens. Prose et poésie « Extraits des classiques français — Première partie. Prose — Balzac, 1596-1655 » pp. 2-8

Mais c’est trop moraliser pour un villageois, et trop s’enfoncer dans la politique pour un infirme qui se laisse conduire dans le vaisseau où il se trouve embarqué, sans entreprendre d’aider les matelots ni de corriger le pilote1.

106. (1882) Morceaux choisis des prosateurs et poètes français des XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles. Cours supérieur. Poètes (2e éd.)

Le véritable objet de cette pièce est de peindre le fanatisme politique, et de montrer l’excès de délire et de férocité où des maximes fausses et l’entraînement de la volupté peuvent conduire un homme d’ailleurs plein d’honneur. […] Le but que Corneille s’y est proposé, bien différent de celui de tant d’autres pièces, où il fait triompher la grandeur romaine, a été de dépeindre la politique des Romains au dehors, de faire connaître leur impérieuse manière d’agir avec les rois leurs alliés, leurs maximes pour les empêcher de s’accroître, et les soins qu’ils prenaient de traverser leur grandeur quand elle commençait à leur devenir suspecte à force de s’augmenter et de se rendre considérable par de nouvelles conquêtes. […] Il bannit de la scène les souillures des premiers siècles, comme la licence des derniers, et fit monter à leur place les vertus morales, politiques, et quelquefois même les plus grandes vertus chrétiennes. […] C’est un remarquable essai de réaction contre le fastidieux genre des tragédies en raisonnements amoureux et en dissertations politiques. […] Les Satires n’avaient pas déplu à ce monarque, et elles avaient même dû lui être d’autant plus agréables qu’elles avaient quelquefois un objet politique.

107. (1853) De la rhétorique, ou De la composition oratoire et littéraire (2e éd.) « PRÉFACE. » pp. -12

Ainsi s’en vont les études sérieuses, et les arts, qui ne peuvent fleurir qu’avec elles, périssent en germe dans l’atmosphère glacée dont les enveloppent l’apathie générale et les préoccupations exclusives de la politique.

108. (1868) Extraits des classiques français, dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième siècles, à l’usage de tous les établissements d’instruction. Cours supérieurs. Première partie : prose « Extraits des classiques français. première partie — La Bruyère, 1646-1696 » pp. 155-177

Ils parlent de guerre à un homme de robe, et de politique à un financier ; ils savent l’histoire avec les femmes ; ils sont poëtes avec un docteur et géomètres avec un poëte. […] Une naissance auguste, un air d’empire et d’autorité, un visage qui remplisse la curiosité des peuples empressés de voir le prince6, et qui conserve le respect dans le courtisan ; une parfaite égalité d’humeur ; un grand éloignement pour la raillerie piquante, ou assez de raison pour ne se la permettre point1 : ne faire jamais ni menaces ni repròches ; ne point céder à la colère, et être toujours obéi ; l’esprit facile, insinuant ; le cœur ouvert, sincère, et dont on croit voir le fond, et ainsi très-propre à se faire des amis, des créatures et des alliés ; être secret toutefois, profond et impénétrable dans ses motifs et dans ses projets ; du sérieux et de la gravité dans le public ; de la brièveté, jointe à beaucoup de justesse et de dignité, soit dans les réponses aux ambassadeurs des princes, soit dans les conseils ; une manière de faire des grâces2 qui est comme un second bienfait ; le choix des personnes que l’on gratifie ; le discernement des esprits, des talents et des complexions3, pour la distribution des postes et des emplois ; le choix des généraux et des ministres ; un jugement ferme, solide, décisif dans les affaires, qui fait que l’on connaît le meilleur parti et le plus juste ; un esprit de droiture et d’équité qui fait qu’on le suit jusqu’à prononcer quelquefois contre soi-même en faveur du peuple, des alliés, des ennemis ; une mémoire heureuse et très-présente qui rappelle les besoins des sujets, leurs visages, leurs noms, leurs requêtes ; une vaste capacité qui s’étende non-seulement aux affaires de dehors, au commerce, aux maximes d’État, aux vues de la politique, au reculement des frontières par la conquête de nouvelles provinces, et à leur sûreté par un grand nombre de forteresses inaccessibles ; mais qui sache aussi se renfermer au dedans, et comme dans les détails4 de tout un royaume ; qui en bannisse un culte faux, suspect et ennemi de la souveraineté, s’il s’y rencontre ; qui abolisse des usages cruels et impies5, s’ils y règnent ; qui réforme les lois et les coutumes6, si elles étaient remplies d’abus ; qui donne aux villes plus de sûreté et plus de commodités par le renouvellement d’une exacte police, plus d’éclat et plus de majesté par des édifices somptueux ; punir sévèrement les vices scandaleux ; donner, par son autorité et par son exemple, du crédit à la piété et à la vertu ; protéger l’Église, ses ministres, ses droits, ses libertés1 ; ménager ses peuples comme ses enfants2 ; être toujours occupé de la pensée de les soulager, de rendre les subsides légers, et tels qu’ils se lèvent sur les provinces sans les appauvrir ; de grands talents pour la guerre ; être vigilant, appliqué, laborieux ; avoir des armées nombreuses, les commander en personne ; être froid dans le péril3, ne ménager sa vie que pour le bien de son État, aimer le bien de son État et sa gloire plus que sa vie ; une puissance très-absolue, qui ne laisse point d’occasion aux brigues, à l’intrigue et à la cabale ; qui ôte cette distance infinie4 qui est quelquefois entre les grands et les petits, qui les rapproche, et sous laquelle tous plient également ; une étendue de connaissances qui fait que le prince voit tout par ses yeux, qu’il agit immédiatement par lui-même, que ses généraux ne sont, quoique éloignés de lui, que ses lieutenants, et les ministres que ses ministres ; une profonde sagesse qui sait déclarer la guerre, qui sait vaincre et user de la victoire, qui sait faire la paix, qui sait la rompre, qui sait quelquefois, et selon les divers intérêts, contraindre les ennemis à la recevoir ; qui donne des règles à une vaste ambition, et sait jusqu’où l’on doit conquérir ; au milieu d’ennemis couverts ou déclarés, se procurer le loisir des jeux, des fêtes, des spectacles ; cultiver les arts et les sciences, former et exécuter des projets d’édifices surprenants ; un génie enfin supérieur et puissant qui se fait aimer et révérer des siens, craindre des étrangers ; qui fait d’une cour, et même de tout un royaume, comme une seule famille unie parfaitement sous un même chef, dont l’union et la bonne intelligence est redoutable au reste du monde.

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